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Critique de Dandine


Un tres bon cru de Sciascia. Un roman historique, avec l'accent sur "roman". de la pure fiction, donc quelque chose de tres different de "Mort de l'inquisiteur", ou Sciascia s'etait essaye a romancer et donner vie a de vrais documents d'archives. Mais son esprit caustique y apparait de facon tout aussi virulente et c'est peut-etre encore plus subversif vu que c'est plus agreable a lire.


J'ai l'impression qu'on a l'habitude de cataloguer Sciascia comme auteur de romans policiers. Moi je prefere l'apparenter a un espace plutot qu'a un genre litteraire: la Sicile. Et la il est bien entoure: Lampedusa, Pirandello, Camilleri… Et quant a sa position envers la societe de son temps (ou du notre, une seule generation nous separant de sa mort) je souscris a un signalement lu je ne sais plus ou: un voltairien a la cour de la Cosa Nostra.


Ici il nous promene dans la Palerme de la fin du 18e siècle. Un abbe falsifie un manuscript arabe, une vie du Prophete sans interet particulier, et le transforme en une ancienne histoire de la Sicile maure. Ca fait beaucoup de bruit et lui vaut beaucoup d'honneurs. Il pousse alors la supercherie et invente de toutes pieces un nouveau manuscript, intitule "L'archive d'Egypte" (ou "Le conseil d'Egypte", le titre du livre changeant selon les pays et les differentes editions), qui prouverait que les terres que possedent les nobles du cru auraient ete expropriees illegalement. C'est la panique dans la haute societe sicilienne, d'ores et déjà ebranlee par les ambitions renovatrices de la monarchie napolitaine, qui regne alors sur l'ile. Pour comble, surgit alors un avocat saoul des idees des lumieres (des francais qui foutent la merde partout), qui tente une revolution – ratee.



On percoit la, sous la trame historico-policiere, quelques themes recurrents dans l'oeuvre de Sciascia: la critique du pouvoir absolu, du fanatisme, la reflexion sur les structures sociales et l'origine du "mal sicilien", l'opposition constante entre forces modernisatrices et conservatrices. Mais Sciascia ne fait pas dans l'indoctrination. Il permet une lecture ouverte a toutes les interpretations. Sa reflexion permet la notre. L'abbe imposteur (un humaniste de genie, en fait), est-il un vulgaire delinquant ou un revolutionnaire subversif? Et a l'oppose, l'avocat qui tente un coup d'etat, n'est-il pas une girouette, se laissant porter par des modes passageres? Comme ce livre est avant tout un roman, c'est avec grand plaisir que nous suivons le regard ironique, lucide, desabuse et malgre tout bienveillant, que l'auteur jette sur la nature et les contradictions des hommes.


Sciascia est un mage, un enchanteur. Ce livre a du piquant. Lecture recommandee donc.


P.S. Apres avoir poste ce billet, j'ai lu ceux d'autres babeliotes. Je n'en ai apprecie aucun. Je n'aime pas les membres qui ont moins de critiques appreciees que de critiques qu'ils ont eux postees. Pourquoi lire ceux qui ne lisent pas les autres? Pourquoi apprecier leurs ecrits? Babelio est un lieu d'echanges. On peut verifier ce que veut dire echange dans tout dictionnaire.
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