Citations sur On peut se dire au revoir plusieurs fois (89)
Que mon tour arrive plus tôt, c'est triste, mais ça ne constitue pas une injustice monstrueuse. J'ai tout de même eu ma chance : celle d'avoir fait des rencontres extraordinaires, d'avoir connu l'amour, d'avoir eu des enfants, d'avoir eu des frères et des amis exceptionnels, d'avoir laissé ma marque. J'ai vécu des expériences très enrichissantes, cancer compris. Ma vie, je n'ai pas l'impression de l'avoir laissée filer. Si elle devait se terminer à 50, 51 ou 52 ans, ce n'est pas tragique. Vivre jusqu’à 80 ans sans avoir rien réalisé de mes rêves et de mes aspirations, voilà qui aurait été un crève-coeur.
Ce jour-là, en sortant du centre de radiologie,
je suis rentré chez moi à vélo. J'ai toujours adoré faire du vélo à Paris et je me souviens de ce trajet comme d'un moment privilégié. Évidemment, après la nouvelle que je venais d'entendre, il aurait été plus prudent de repartir en taxi, car les pavés inégaux n'étaient pas très indiqués dans ma
situation. Mais précisément, après la nouvelle que je venais d'entendre, j'avais besoin d'air.
Selon Marshall Rosenberg, le grand génie qui est l'inventeur de la communication non violente, la principale source du sens de la vie c'est de contribuer au bien-être de ceux qui nous entourent.
Tous ceux qui ont eu des problèmes sérieux de santé le savent. Quand on est malade et invalide, on se sent facilement très seul.
Me découvrir fragile, mortel, souffrant, effrayé, m'a ouvert les yeux sur l'infini trésor de la vie et de l'amour.
Que mon tour arrive plus tôt, c'est triste, mais ça ne constitue pas une injustice monstrueuse. J'ai tout de même eu ma chance : celle d'avoir fait des rencontres extraordinaires, d'avoir connu l'amour, d'avoir eu des enfants, d'avoir eu des frères et des amis exceptionnels, d'avoir laissé ma marque.
Rien ne donne plus de sens à notre existence. Mes enfants font partie des plus belles réussites de ma vie. Pourtant quand je pense à Charlie et Anna, qui sont si petits, j'épprouve une grande tristesse. Moi qui parle sans cesse de "contribuer", je crains de ne pas pouvoir le faire pour ces êtres charmants qui en ont le plus besoin. J'espère tout de même leur laisser une image qui les aidera quand ils grandiront. J'imagine les messages vidéos que j'enregistrerais à leur intention en me mettant devant ma webcam et les lettres que je leur écrirai. Je leur parlerai de ce que j'espère pour eux, de ce que je vois déjà en eux. De la source de leur élan. Je leur dirai comme je suis triste de ne pas être présent dans leur vie. Et aussi ma conviction qu'ils ont en eux mêmes ce qu'il faut pour grandir en mon absence : le souvenir, même ténu, même indirect, qu'ils garderont de moi, et surtout la force de leur mère.
Si le stress positif est sans contexte un des grands moteurs de la puissance vitale,je pense aujourd'hui qu'il agit parfois comme une drogue sur le psychisme.
Bien sûr le fait d'avoir traversé le miroir,d'être devenu moi même un patient,d'avoir connu les angoisses, les peines et les espoirs d'un malade ça aide à devenir plus humain.
Quand on a traversé le risque et qu'on a survécu, on n'est plus tétanisé devant le danger. On "apprend le courage".