- Attention, Cendrillon!
Il a ramassé mon escarpin et a fait mine de le garder.
- J'ai peut être intérêt à conserver ce soulier au cas où j'aurais besoin de te retrouver?
Julie, quinze ans, est habituée aux lubies de sa meilleure amie Ashleigh, même si, à cause d’elle, elle se retrouve parfois dans des situations improbables. Après le roi Arthur, la stratégie militaire ou le ballet, la dernière passion en date de cette éternelle enthousiaste : Jane Austen ! Ashleigh veut à tout prix trouver le M Darcy d’aujourd’hui en participant au bal d’une prestigieuse école de garçons. Et voici les deux inséparables vêtues de crinolines, en chasse pour dénicher le parfait héros austenien… mais attention à ne pas choisir le même (heureux) candidat !
- Attention, Cendrillon!
Il a ramassé mon escarpin et a fait mine de le garder.
- J'ai peut être intérêt à conserver ce soulier au cas où j'aurais besoin de te retrouver?
J'ai hoché la tête et je me suis enfermée de nouveau dans le mutisme. Je me serais donné des coups de fouet tellement mes remarques étaient stupides. Autant lui dire carrément que j'avais conservé et chéri chaque souvenir de lui au fond de mon coeur comme un trésor. Pas cool, pas cool... Et confondre le kendo avec Nintendo... quelle gaffe ! Il devait me prendre pour une andouille.
- Tu veux t'incruster à une Réunion des Constipés Anonymes ? T'as fumé un carambar ou quoi ? Quel est le rapport avec Jane Austen ?
- T'as pété un macaron ? C'est déjà assez humiliant de s'incruster à un bal, si en plus, il faut y aller déguisée en meringue, non ! Je jette l'éponge.
- [...] Tu es doué dans tout ce que tu entreprends où il existe des trucs que tu ne sais pas faire ?
Il a éclaté de rire.
- Euh... des tas ! Je suis même assez nul sur l'essentiel. Par exemple, il y a une chose dont je me sentais complètement incapable jusqu'à maintenant, mais je commence à me demander si... Voyons...
Et il m'a embrassée.
Comme ses lèvres étaient froides... puis chaudes ! Mon sixième baiser. Mon premier, en réalité. Le ciel bleu, le fleuve bleu, son regard bleu embrumé, la condensation de nos souffles qui formait un seul et même nuage. Mes doigts gelés, son cou frais, tiède sous l'écharpe. J'ai touché sa fossette. Nous nous sommes embrassés encore.
- Je reviens sur ce que j'ai dit, a-t-il déclaré d'une voix rauque. Tu as raison. Je suis capable de tout.
Et miracle : comme si je l'avais invoqué, il m'est apparu. Il se faufilait dans la foule en compagnie de Zach Liu. Ce dernier l'a poussé devant moi avec un petit sourire satisfait.
- Tiens, ma sauterelle, je t'apporte un cadeau d'anniversaire en retard.
M.Klamp dictait sa loi. Pas de retard ; interdiction de parler au-dessus de quarante décibels ; pas de lacets défaits ; pas de sous-vêtements visibles ; interdiction de manger, mâcher du chewing-gum, du tabac, du bétal, des feuilles de coca, des mollets d'élèves ( à moins de s'appeler M.Klamp ) ; ou d'enseignants (même exception) ; pas de démonstration de mauvaise humeur superflus (même exception), ni de témoignages d'affection superflus (sans exception) ; pas d'animaux domestiques pesant au-dessus de trente grammes ou au-dessous d'une tonne ; et interdiction de chanter, sauf en langue bulgare. M.Klamp ne me faisait pas peur. Et il valait mieux, puisque je l'avais aussi en maths.
Pendant la phase arthurienne d'Ashleigh, maman avait déguisé le père noël en chevalier, et ses rennes en licorne.