AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de JustAWord


Devenu aussi populaire que son ennemi juré au fils du temps, le clown psychopathe de Gotham City a inspiré bien des artistes depuis sa création.
Cette fois, c'est Jeff Lemire (Descender, Sweet Tooth, Black Hammer) qui s'y colle épaulé par Andrea Sorretino (Green Arrow, Gideon Falls) au dessin et Jordie Bellaire pour la colorisation.
Ce one-shot en 3 numéros (+ un épilogue) introduit deux personnages : le psychiatre Ben Arnell et l'énigmatique Mr Sourire.
Bienvenue à nouveau dans l'esprit dérangé du Joker !

Dans Killer Smile, Ben Arnell tente de percer à jour l'énigme psychiatrique du plus fameux psychopathe de Gotham City : le Joker.
Au fur et à mesure de ses entretiens, Ben Arnell perd pied face au réel et sa famille commence à le trouver de plus en plus bizarre. En s'enfonçant dans l'univers mental du Joker, Ben rencontre un personnage fictif dans une BD pour enfant dérangeante à souhait : Mr Sourire est-il réel ?
Sans en dévoiler davantage sur l'intrigue principale de Killer Smile, il faut préciser que ce n'est pas la première fois qu'une approche psychiatrique est tenté avec le Joker, c'était d'ailleurs le cas dans Arkham Asylum de Grant Morrison et Dave McKean. Ici, pourtant, Jeff Lemire ajoute une dimension quasiment virale au Joker comme si sa folie était hautement contagieuse.
En parallèle, l'américain dissèque certains mécanismes de la malade mentale comme l'anosognosie (le fait de ne pas se rendre compte de sa pathologie) ou encore la déréalisation (sentiment d'irréalité du monde extérieur). Plus loin, Jeff Lemire s'interroge sur les perturbations premières de l'esprit du Joker et la beauté qu'il perçoit dans le rire…à sa façon. La déformation d'un sentiment qui finit par confiner au pathologique.
Ouvertement inspiré par le Killing Joke d'Alan Moore (pour sa fin géniale) et par Joker de Lee Bermejo (pour le look plutôt voyou), Killer Smile joue perpétuellement avec le réel et brise ses personnages.

Au centre, on trouve une création géniale, celui du petit monde de Mr Sourire, un personnage de BD troublant puisqu'il tue à la tronçonneuse avec l'apparence d'un bonhomme enfantin. Mr Sourire, au fil du temps, finit par incarner une certaine dissonance cognitive, la graine de folie qui germe et qui fausse les émotions et la perceptions du monde. Une folie que l'on peut combattre mais qui reste derrière le palais, entêtante, inquiétante. L'occasion est d'ailleurs trop belle pour Jeff Lemire pour ne pas se lancer dans un numéro expérimental dans l'épilogue (Batman : The Smile Killer) où il inverse les rôles et remplace le Joker par le Batman pour montrer que celui-ci souffre potentiellement du même type de folie paranoïaque que son adversaire de toujours. On rejoint ainsi les dernières cases de Killing Joke et le message sous-jacent de Arkham Asylum.
Mais tout cela ne serait rien, ou pas grand chose, dans le coup de crayon formidable d'Andrea Sorrentino qui arrive non seulement à capter la folie des personnages mais aussi à l'illustrer de façon créative et inattendue en morcelant, éclatant, déformant ses planches. Magnifié par la palette saisissante de Jordie Bellaire, Killer Smile se transforme en un sombre cauchemar où même les couleurs pourtant chatoyantes d'un conte pour enfant deviennent dérangeantes.

Joker : Killer Smile s'intègre dans le panthéon des oeuvres fondamentales sur le Joker…mais aussi sur le Batman. Plongée dans la folie et dans son aspect le plus inattendu, la contagion, l'opus de Jeff Lemire et Andrea Sorrentino capte une nouvelle facette d'un personnage qui n'en finira jamais de nous surprendre. Ne le ratez pas !
Lien : https://justaword.fr/joker-k..
Commenter  J’apprécie          210



Ont apprécié cette critique (20)voir plus




{* *}