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Critique de BazaR


Pas facile de se lancer dans la philo.

Ce petit livre regroupe les lettres que ce sont échangées, entre 1664 et 1665, le philosophe Spinoza et un courtier en grain, Blyenbergh, plein de curiosité pour la philosophie de Spinoza. C'est plutôt touffu pour moi, et écrit et traduit selon les règles de l'époque. Je suis bien content que le livre – qui s'adresse avant tout à des lycéens au minimum – contiennent de l'analyse de texte qui m'a aidé à éclairer ce que je lisais.

C'est Blyenbergh qui commence l'échange, en déclarant qu'il est fan de l'auteur et qu'il a des questions sur son livre « Les principes de la philosophie de Descartes ». Spinoza répond avec joie, croyant avoir affaire à un homme qui s'intéresse aux raisonnements philosophiques. Mais la deuxième lettre arrive comme un coup de théâtre. Blyenbergh, qui est calviniste, avoue que s'il doit choisir entre une explication philosophique et une affirmation issue de l'Écriture, c'est la deuxième qui l'emportera sans discussion. Spinoza comprend alors que leurs axiomes de base sont discordants, car lui voit l'Écriture comme une parabole destinée à expliquer les lois de Dieu au « vulgaire » (à celui qui ne réfléchit pas dessus), et donc certainement pas comme le Verbe incarné.
Les rapports se tendent dès lors. Les deux hommes font un usage intensif de raisonnements logiques directs ou par l'absurde, mais ils ne peuvent s'accorder car leurs points de départ ne sont pas les mêmes. Spinoza s'en aperçoit immédiatement mais tente malgré tout d'expliquer sa position, Blyenbergh ne comprend pas et insiste. Ils se voient physiquement une fois. Mais, lassé, Spinoza finit par rompre le contact.

Il ne faut pas voir ici l'affrontement d'un érudit et d'un ignare fondamentaliste. Les deux hommes savent raisonner, mais Spinoza est peut-être plus affuté. On saisit certains éléments de la philosophie de Spinoza qui s'éloigne de la théologie. Il n'est pas en accord avec Descartes, par exemple sur le libre arbitre (Spinoza ne croit pas que cela existe, Descartes oui). Il ne croit pas qu'il existe quelque chose comme le Mal absolu, que Blyenbergh assimile au péché originel par exemple.
Les positions de Spinoza en plein XVIIe siècle ne sont pas faciles à tenir. D'autres ont été menacés du bûcher relativement peu de temps auparavant (Galilée c'est 40 ans avant). Lui-même a été exclu de la synagogue en 1656, avec des mots d'une violence incroyable : « Nous le maudissons comme Élie maudit les enfants et avec toutes les malédictions que l'on trouve dans la Loi. Qu'il soit maudit le jour, qu'il soit maudit la nuit ; qu'il soit maudit pendant son sommeil et pendant qu'il veille, etc. ».

Un livre peu facile à lire pour moi, donc, mais assurément intéressant, et éclairci par le dossier associé.
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