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Critique de Eve-Yeshe


Vanessa décide enfin de prendre la plume pour raconter ce qu'elle a vécu avec un écrivain longtemps (trop) encensé par les media. Nous sommes au milieu des années quatre-vingt !

Elle raconte son enfance entre un père, dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'il est parano : jaloux, possessif, maltraitant psychologiquement : une tache sur une nappe suffit à déclencher la violence, ou le fait de savoir qu'on a touché à ses livres (ils ne sont plus tout à fait à leur place, alors crise… (on est loin d'un TOC).

Vanessa a six ans quand le couple se sépare, il ne paye pas de pension, voit à peine sa fille, donc il s'ensuit un lien fusionnel mère fille, ce que je trouve curieux…

Elle se réfugie dans les livres car sa mère travaille dans une petite maison d'édition à l'époque, ce qui lui permet de rencontrer des écrivains, journalistes… « tout ce beau monde est cultivé, brillant, spirituel, et parfois célèbre ».

Un soir sa mère l'emmène à un dîner, avec quelques personnalités du monde littéraire » dont G. qui a déjà détecté en elle sa future proie. Elle est tellement à la recherche d'un substitut paternel, et tellement besoin d'être aimée qu'elle tombe dans ses filets. « La présence de cet homme est cosmique ». Elle a treize ans, il en a cinquante, c'est surtout cela qui est co(s)mique…

Elle pense être amoureuse, et être aimée de lui. En fait, elle aime l'idée d'être amoureuse, en quelque sorte « l'idéal de l'amour » alors qu'elle entièrement sous son influence. Elle accepte tout, les caresses d'un « vrai pro de l'amour », il la sodomise mais il lui apprend l'amour (en fait le sexe, mais elle confond les deux) tel un Pygmalion…

Comment résister à un homme qui écrit de si belles lettres d'amour ?

Vanessa Springora décrit très bien tout le processus de l'emprise que G. exerce sur elle, et le fait qu'elle n'en a pas conscience, puisqu'il lui dit qu'il l'aime, le lui écrit. Ils forment un « vrai couple » puisqu'ils font l'amour, se promènent mains dans la main, dans la rue. Il va même jusqu'à l'attendre pas loin du collège, sans se cacher !

L'homme la fascine et le fait qu'il soit un écrivain connu, c'est flatteur… Et puis, après tout, le tout-Paris intello sait qu'il aime sodomiser les petits garçons quand il va à Manille par exemple, mais on continuer à l'encenser, alors comment une gamine de quatorze ans pourrait-elle ne pas être subjuguée par l'aura du « Maître à la gueule de bonze…

Je comprends qu'il lui a fallu du temps pour comprendre que c'était un prédateur et qu'il se lasserait d'elle pour une proie plus jeune. Mais, je n'ai pas ressenti autant d'empathie que je m'attendais à en ressentir, à la lecture du résumé, et c'est très perturbant.

Cette lecture a déclenché chez moi un profond dégoût : vis-à-vis de G. dont je n'ai jamais lu un seul livre car ce personnage sulfureux m'a toujours donné envie de vomir et à changer de chaîne quand il était reçu en grande pompe à Apostrophe, un homme qui écrit et fait publier son journal avec tous les détails et dans lequel il fait figurer toutes les lettres d'amour que V. (et les autres, avant et après) lui a écrite et sans jamais leur demander leur avis.

« Vous voyez bien qu'il s'agit d'amour », voilà ce que suggère ce pervers qui a milité pour l'abaissement de la « majorité sexuelle » encore une escroquerie… Il a même été à l'origine d'une pétition dans ce sens et certains de ceux qui l'ont signée sont archi-connus. Il n'y a pas que dans l'Église que se cachent ces pourris. Il y aurait un grand ménage à faire car les prédateurs sexuels sont loin d'être une espère en voie de disparition.

D'autres choses m'ont profondément choquée dans ce livre : comment les parents de V. ont pu ne rien faire : le père a fait semblant d'essayer, mais la mère n'est pas nette du tout (pour moi elle est à enfermer pour non-assistance à personne en danger !) : elle laisse faire, on a l'impression à la fois qu'elle est jalouse, et aimerait être à la place de sa fille, mais aussi que c'est flatteur pour elle que G. s'intéresse à sa fille.

Cette mère ne reconnaîtra jamais qu'elle a eu tort : tout est de la faute, de V. de toute manière elle était en avance pour son âge, à quatorze ans !

Et Cioran qui dit à V. que si elle le quitte, ce pervers, il va avoir beaucoup de peine ! on rêve ? Ces intellos de gauche, soixante-huitards attardés sont vraiment à part !

Autre source de dégoût : c'était une autre époque ! ah bon, la pédophilie, parce que c'est quand même de cela qu'il s'agit, c'était normal ? L'exhiber dans les livres aussi ? il y a beaucoup de personnes qui auraient dû intervenir et n'ont rien fait.

Dernier malaise : quand le gynécologue lui propose une intervention chirurgicale pour un hymen trop serré, V. parle de viol ! en gros, elle a été violée par un scalpel, mais pas par G.

Néanmoins, c'est un ouvrage qu'il est important de lire, malgré de dégoût, pour bien comprendre le processus de l'emprise, et surtout, ce qui dans la vie d'une adolescente en mal d'amour, a pu conduire à une telle relation « bourreau victime ». Un pervers sait très bien détecter la faille qui fait une proie facile.

Pour terminer, je tire mon chapeau au magazine ELLE où il était interdit, dès les années 90 de prononcer le nom de cet « écrivain » alors que Bernard Pivot vient seulement de reconnaître qu'il n'aurait pas dû! François Busnel s'est excusé de l'avoir reçu une seule fois en disant que cette seule fois était déjà une de trop. Quant à l'éditeur, il vient juste de suspendre les ventes du « Journal »…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de lire ce livre et de découvrir son auteure dont la plume est intéressante…

#Leconsentement #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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