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Critique de CecileMK


Après "Ton absence n'est que ténèbres" qui m'a enthousiasmé, j'ai enchainé avec le dernier roman de Jon Kalman Stefansson. Si celui-ci n'atteint pas les sommets du précédent, j'ai encore eu beaucoup de plaisir à retrouver la prose magnifique et poétique de l'auteur. Ce roman a certainement une place à part dans l'oeuvre de l'écrivain, dans le sens où c'est celui qui contient le plus d'éléments autobiographiques. Alors que dans "Ton absence n'est que ténèbres", l'auteur avait recours à un narrateur amnésique en charge de mettre sur papier la mémoire des autres et que la perte de son identité propre était une condition nécessaire à son travail d'écrivain, ici, Jon Kalman Stefansson prend le contre-pied de cette position. C'est bien à partir de ses propres souvenirs qu'il construit "Mon sous-marin jaune". Mais il y mêle une fantaisie qui nous dit que les souvenirs se rapprochent aussi beaucoup des rêves, cette fantaisie qui s'accorde très bien à celle du film d'animation " de George Dunning "Yellow submarine" sorti en 1969, à l'esthétique psychédélique. Les Beatles se retrouvent ainsi dans un bus un été avec notre jeune narrateur, en partance pour les territoires du nord de l'Islande. Mais les collisions temporelles réuniront aussi le narrateur, âgé de soixante ans et Paul McCartney dans un parc londonien...avec une vieille Traban jaune. Cette fantaisie se retrouve aussi dans les titres des sous-chapitres (dont nous avons l'habitude dans tous les romans de Stefansson) qui ont souvent un effet comique. Cette fantaisie est inextricablement liée au deuil, à la douleur de l'absence (thèmes centraux de toute l'oeuvre de Stefansson), et à l'incommunicabilité avec le père. Jon Kalman Steffanson réussit donc à créer un roman lumineux, comme le jaune de son sous-marin, même si "la tristesse est cette braise en nos coeurs".

"Les chansons "Things We Said Today" et "Yellow Submarine", la seconde interprétée par Ringo Starr, étaient mes titres préférés des Beatles à la fin de l'année 1969 et au début de la suivante. Il est inutile d'expliquer pourquoi j'aimais tant le premier, mais il n'en va pas de même de "Yellow Submarine", que peu de gens considèrent comme un chef d'oeuvre. Ma mère a essayé de m'apprendre à le jouer à l'harmonica que sa soeur nous avait envoyé de l'étranger, en me disant que le texte parle de notre désir à la fois douloureux et puéril de trouver un havre de paix, un lieu où l'on est en sécurité, un univers parallèle où les contraintes et les mauvais coups du monde ne nous atteignent pas.
Puis elle est morte. Elle a sombré dans les ténèbres, s'est évanouie dans le silence, où elle s'est changée en douleur muette, devenant le sommet plus haut de l'Islande. Quelques mois plus tard, la vie et les profiteurs ont semé la discorde parmi les Beatles. le groupe s'est séparé, dissous dans l'hostilité, le monde a commencé à se disloquer et l'être humain à se perdre."
"Nous vieillissons, notre passé prend toujours plus de place en nous, la vie se change en deuil de ceux qui sont partis, elle n'est plus que le souvenir des cimetières que chaque jour nous visitons- et la tristesse est cette braise en nos coeurs."
"La traban avance lentement. Nous sommes dans la seconde quinzaine d'octobre 1969. Elle est sur la route de Keflavik, et un long voyage l'attend. Elle va aussi vite qu'un chien mélancolique, pourtant elle finira par atteindre sa destination. Elle vogue, entêtée, à travers les années, à travers les décennies...
Elle est morte, je crains qu'elle ne soit partie, c'est la réalité. Il s'agrippait au volant parce que chacune de ces syllabes était aussi lourde qu'un sac de ciment."
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