En voyant le titre du roman, j'ai pensé à la chanson d'amour de Brel ; « Ce soir j'attends
Madeleine, j'ai apporté du lilas… ». J'ai aussi imaginé
Proust croquant sa petite
madeleine pleine de délicieuses réminiscences...
Résultat : complètement à côté de la plaque ! Car cette
Madeleine-là n'inspire pas l'amour, seulement la concupiscence. Elle n'a pas de beaux souvenirs non plus et ne se trouve pas
du côté de chez Swann. Non, il faut plutôt chercher du côté de chez
Zola. Car il y a du déterminisme dans l'existence médiocre de
Madeleine.
A quarante ans, l'horizon affectif de
Madeleine, agent immobilier à Brest, est bouché comme le ciel du Finistère sous le crachin. Une enfance chaotique avec un père violent tué par l'alcool, une adolescence bourrée de complexes, puis des expériences amoureuses plus que décevantes ont fini par la persuader qu'on ne pouvait pas s'intéresser à elle, qu'elle ne méritait pas d'être aimée. Alors quand un homme l'approche, elle le prend comme il vient et ne s'attend pas à ce qu'il reste. D'ailleurs, "les garçons se limitent à trouver l'entrée de
Madeleine puis la sortie de son appartement". Ses rêves, elle les réserve à Brandon Bradley, son héros de série télé favori.
Mais voilà que Castellot, client parisien cherchant à acheter une maison en Bretagne, vient rompre la routine. Leurs blessures intimes s'unissent dans une relation épisodique qui devient régulière. Et pour la première fois,
Madeleine se surprend à espérer. Mais la vie se chargera de lui rappeler le morne destin qui est le sien.
Ce court roman condense bien des désillusions, des frustrations et des souffrances.
Amanda Sthers a une écriture brève et forte, parfois crue pour mieux faire ressortir les petites cruautés ordinaires qui tissent la vie de son anti-héroïne. Avec
Madeleine, il ne faut pas s'attendre à une lecture paisible. On prend plutôt une claque, mais une claque qui a du style, c'est ce qui compte.