La couleur des sentiments

Apprendre que votre bonne est une voleuse, c'est comme d'apprendre que l'instituteur de votre gosse est un pédophile. On leur laisse pas le bénéfice du doute, on s'en débarrasse tout de suite.

Je plonge dans ses beaux yeux bruns et elle regarde dans les miens. Seigneur, ce regard, on dirait qu'elle a déjà vécu cent ans. Et je vous jure que je vois, tout au fond, la femme qu'elle sera. L'avenir, l'espace d'une seconde.

Je sens quelque chose qui cède en moi. Je suis vaporeuse. Je suis folle. Et sourde. Sourde à ce téléphone imbécile qui reste muet.

Qui aurait cru qu'un cœur brisé pouvait vous brûler à ce point ?

Je commence à sentir que pour lui, je ne suis peut-être pas là moi-même. Et je comprends soudain ce que je savais depuis le début de la soirée. Il me regarde mais c'est à elle qu'il pense. Elle est partout. Dans la colère que je vois dans son regard, sur la langue de Mr et Mrs Whitworth, sur ce mur d'où l'on a retiré sa photo.

La vérité. Ce mot là, ça me rafraîchit, comme de l'eau qui coulerait sur mon corps tout collant de sueur. Qui refroidirait la chaleur qui m'a brûlée toute ma vie. La vérité, je me répète dans ma tête, juste pour sentir ça encore une fois.

J'ai envie de crier assez fort pour que Baby Girl m'entende, de crier que sale, c'est pas une couleur, que les maladies, c'est pas les Noirs

It's mighty strange, without a doubt, Nobody knows you when you are down and out.

Le manuel de chasse au mari de Mrs Charlotte Phelan énonçait comme règle numéro un : une fille petite et jolie a pour atouts supplémentaires le maquillage et la façon de se tenir. Une grande, son compte épargne.

Elle porte un pull rouge moulant avec une jupe rouge et assez de maquillage pour faire peur à une pute