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Critique de Quarto


Je connais mal Strindberg. Peut-être ai-je vu autrefois une représentation de Mademoiselle Julie, mais sans même que je me souvienne pourquoi, je ne me rappelle de rien.

Peut-être que, comme pour Mulukuku il y a quelques jours, le boulevard qui m'est laissé en l'absence de précédente critique, l'ivresse d'être le premier rédacteur (je blague), me pousse à me lancer. J'y vais !

Je connais donc mal August Strindberg, mais je connais mieux désormais le jeune Strindberg, car c'est lui le fils de la servante dont il raconte les 18 premières années (1849-1867) à la troisième personne, choix singulier qui ajoute une distance dans le récit de ses souffrances et de ses frustrations, écho au sentiment d'étrangeté qu'il éprouve et de la solitude qu'il subit et subira : "Sa sympathie pour les hommes ne devait pas être payée de retour."

Le personnage, le sujet du livre, est donc le fils de la servante d'un bourgeois obtus, père taciturne remarié à la mort de la mère avec la gouvernante. "Toute sa vie, il aura ce regret de sa mère, il se sentira seul."

Le père est un obstacle avant de n'être plus rien, incapable de compréhension et plus encore d'amour pour son fils ainé, de surcroît accablé d'un petit frère. "Il resta comme le gui, qui ne peut pousser sans être soutenu par un arbre : il devint une plante grimpante qui devait se chercher un tuteur."

J'ai été impressionné par la puissance de ce personnage, ce qu'il parvient à devenir quand tout paraît devoir l'entraver, la famille, la société suédoise puritaine qui réprouve "son instinct sexuel", la religion qu'il affronte avec orgueil : "Sa chair était trop jeune et trop saine pour avoir le désir d'être cloué la croix."

Nous sommes encore sous les Lumières, au moment d'un compromis social profitable à la bourgeoisie qui "maintient une certaine apparence démocratique". Mais Strindberg n'est pas dupe et, dans sa solitude, il rêve avec confiance à l'avènement d'un monde heureux. Sa critique sociale est pleine d'espoir.

Mais ça c'est le jeune Strindberg, le fils de la servante. Plus tard il changera, abandonnera ses idéaux démocratiques, et l'éternel persécuté sera aussi victime du délire de la persécution. Mais ça, c'est une autre histoire.

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