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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Grâce à la dernière opération MG Mauvais genres de Babélio, j'ai eu la chance de découvrir cette auteure polonaise peu connue sous nos cieux. Elle nous propose un roman qui oscille entre polar historique et cosy mystery.

Nous sommes en 1895 à Cracovie au moment des fêtes de Pâques, Zofia Turbotynska est l'épouse d'un professeur d'anatomie vétérinaire, ce qui en fait une notable, statut auquel elle tient. Elle s'occupe de sa maison avec l'aide de sa servante Franziska, participe à des évènements mondains et aux nombreuses activités de sa paroisse. Deux ans auparavant elle a résolu un meurtre et ne va pas tarder à mettre son talent de détective en oeuvre. Sa deuxième bonne, Karolina, une jeune fille de dix-sept ans a brusquement donné sa démission le samedi de Pâques, mais le mardi matin, on retrouve son corps outragé et poignardé dans la Vistule. Franziska révèle que sa collègue avait rencontré un ingénieur qui lui a promis de l'épouser et de l'emmener en Amérique. le commissaire y voit une rivalité entre son fiancé officiel, un ouvrier et le nouveau qui aurait mal tourné, d'ailleurs, un activiste socialiste bien connu a été abattu lors de son arrestation et il le déclare coupable de ce meurtre. Zofia y voit une solution trop facile, sa bonne a retrouvé la carte du fameux ingénieur et l'a même aperçu à plusieurs reprises lors de fêtes l'été suivant. Avec l'aide de Franziska, elle se lance dans une enquête minutieuse qui durera plus d'un an et saura triompher de nombreux obstacles pour faire éclater la vérité.

Le contexte historique est intéressant, on est à la fin de l'empire austro-hongrois dans la bonne société polonaise. Ignacy, le mari de Zofia ne joue aucun rôle dans l'intrigue, sinon de mettre en valeur son épouse par contraste. Il ne se soucie que des controverses scientifiques et politiques de son temps, il est conservateur, grand admirateur de l'empereur, vu comme le gardien de la stabilité sociale. Il ne s'occupe évidemment pas de la vie domestique. C'est un mari aimant et attentionné qui laisse une grande liberté à sa femme. Au début du livre, Zofia partage les vues conservatrices de son mari, mais elle évoluera au fil de son enquête. Elle rencontre des personnages qui remettent en question son point de vue, ce qu'elle saura faire intelligemment. Ainsi elle rencontre un sexologue, science débutante et surtout un journaliste socialiste qui lui ouvrira les yeux sur la réalité de la condition des femmes les plus pauvres. Elle portera désormais un autre regard sur la prostitution et luttera contre la traite humaine.

Le statut et le rôle des femmes est au centre de ce roman, Zofia y est une notable avec toutes les obligations qui en découlent et qu'elle ne remet pas en question. Elle adopte le point de vue de son mari et on l'appelle toujours Madame le professeur, du titre d'Ignacy. Elle est une privilégiée, elle est bienveillante envers ses bonnes et a de bons rapports avec elles, mais la mort de Karolina va lui ouvrir les yeux sur la misère des plus pauvres qui sont souvent contraintes à la prostitution par nécessité. Certaines femmes luttent pour l'émancipation et l'instruction de leurs semblables, ce à quoi Ignacy et Zofia s'opposent. On pensait dans le milieu conservateur que l'instruction rendait les femmes stériles.

Le roman oscille entre polar historique bien documenté de par son contexte et mystery cosy vu que notre enquêtrice est une maîtresse de maison consciencieuse pour qui l'activité de détective est un loisir. Par rapport à ce genre littéraire, cet ouvrage manque de légèreté et d'humour. Les pensées de Zofia lors de ses entretiens avec le sexologue et le journaliste, écrites en italique, sont amusantes, mais la conversation reste très sérieuse. La vérité restera confidentielle au grand dam de Zofia, mais les puissants ne sont pas encore traînés sur la place publique à cette époque, ce qui la contrarie et lui fait voir le pouvoir sous un jour nettement moins favorable. le titre du livre marque la prise de conscience de l'héroïne, qui entrevoit « par un rideau déchiré » la condition des femmes pauvres.

Les deux héroïnes principales sont très attachantes. L'intrigue a de la peine à démarrer, la première moitié du roman est très lente, on se perd dans les détails domestiques et les descriptions des vêtements portés par chaque personnage, on se croit dans un journal féminin. Heureusement la deuxième partie est nettement plus dynamique et aussi plus intéressante quand Zofia commence à enquêter sur le trafic de femmes. Dans l'ensemble j'ai beaucoup aimé ce livre, un grand merci à Babélio et aux Editions Agullo pour leur confiance.
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Quelle joie de retourner dans les appartements de l'impertinente Zofia Turbotynska ! Dans la Cracovie de la fin du XIXème siècle, elle est à la fois en parfaite adéquation avec le décor et décalée par rapport à ses concitoyens.

La grande dame polonaise est restée fidèle à elle-même pour notre plus grand bonheur. Dans ce deuxième épisode, c'est un personnage de son entourage qui est la victime. La volonté de Zofia de rechercher et de trouver la vérité devient alors encore plus forte. Elle va faire preuve de persévérance et utiliser toutes ses influences afin de récolter les réponses à ses questions. Comme à son habitude, elle n'hésite pas à court-circuiter les forces de l'ordre en utilisant son talent de persuasion.

Cette série nous ouvre les portes sur le monde bourgeois de l'époque. A travers les échanges entre les protagonistes, l'autrice met en lumière les moeurs et les pensées de cette catégorie sociale. Cet épisode n'est d'ailleurs pas avare de commentaires et d'actes dédaigneux envers les petites gens.

La place de la femme est aussi au coeur des investigations. Malgré une héroïne forte, ce roman dépeint une société patriarcale qui définit strictement les devoirs des femmes. Même l'insolente et caractérielle Zofia ne fait pas bouger les lignes. Elle apporte toujours du piment à l'aventure, grâce à ses répliques, elle est parfois comme un chien dans un jeux de quilles mais elle reste toujours dans les limites de bienséance et des coutumes.

J'ai trouvé cet opus un peu moins divertissant que le précédent. J'y ai retrouvé avec plaisir le tableau sans concession du monde de cette époque mais il m'a manqué une dose supplémentaire d'humour qui était beaucoup plus présente lors de la première enquête. J'ai néanmoins passé un bon moment de lecture et tant que Zofia continue à faire des siennes, je serai là pour profiter du spectacle !
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A Cracovie, en 1895, on ne plaisante pas avec Pâques chez Zofia Turbotynska. Les préparatifs vont bon train, d'autant que Karolina, femme de chambre, vient de donner sa démission. On la retrouve morte le lendemain sur les bords de la Vistule. Zofia va devoir faire appel à ses dons d'enquêtrice...

Après "Madame Mohr a disparu", on retrouve le duo d'auteurs polonais et leur héroïne Zofia. Son enquête va la mener dans les bas-fonds de Cracovie, loin des salons mondains qu'elle affectionne. Elle continue, dans son style bien particulier, de faire semblant de collaborer avec la police et mène son enquête de son côté.

Je ne suis pas forcément fan de cosy-crime mais il faut bien reconnaître qu'il revêt ici une saveur spéciale. Dans un style à la fois soigné et caustique, les auteurs parviennent à peindre la bourgeoisie polonaise avec humour. Ils abordent ici aussi la place des femmes au XIXème siècle, entre la guindée Zofia qui cherche à s'encanailler et la défunte Karolina qui cherchait à échapper à son statut.

Zofia est une Miss Marple plus qu'attirante. Sous ses airs coincés, elle cherche à comprendre le monde qui l'entoure, en allant au-delà des apparences auxquelles elle tient tant. Une série polar originale à découvrir !
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Six mois après la publication du premier tome de ce qui s'annonce être une série de romans policiers rétro, et dont le nom de l'auteure, Maryla Szymiczkowa, cache en réalité un duo d'écrivains, Agullo Éditions nous propose le second tome des aventures de Zofia Turbotyńska, notre truculente femme de professeure au nom de poisson, au titre qui en dit très peu sur les thèmes abordés que l'on s'apprête à lire. Néanmoins, la métaphore est là et se rappelle au lecteur à travers le texte. Même protagoniste, même lieux, Cracovie, la Vistule, la colline du Wavel et son château, Kazimierz et son quartier juif, d'autres crimes, d'autres enjeux, un autre pan de l'histoire polonaise. Je crois que j'ai eu une petite préférence pour cette intrigue-là que pour la précédente, ce qui n'enlève rien à la qualité du premier titre.

Cette fois, tout s'embrase au coeur même du foyer de Zofia, puisque tout part de la disparition et de la mort de sa très jeune femme de chambre de dix-sept ans, Karolina Schulz : la jeune fille est retrouvée près du fleuve, le corps meurtri par les coups, souillé par une agression sexuelle. Zofia, qui a besoin d'autre chose que de penser aux menus hebdomadaires dont se délecte Ignacy son époux, va se lancer à corps perdu dans l'enquête pour lever le voile sur le mystère de la mort de sa servante, qui venait juste de quitter la maisonnée Turbotyński. Si les choses paraissent simples au début, tour à tour, chacun pense à un suicide puis à une mauvaise rencontre, la proximité de Karolina avec Franciszka l'autre servante de la maison va ouvrir le doute sur les circonstances de cette mort soudaine. Il n'en faut pas davantage que de concert avec sa cuisinière, Franciszka, qui va devenir sa complice le temps de l'enquête, la curieuse et extravagante Zofia Turbotyńska, tous les sens en branle, se décide à poursuivre plus avant le travail de la police cracovienne.

Dans les romans de Maryla Szymiczkowa, Cracovie dévoile ses pires côtés, ces quartiers d'où suinte la misère, exploitée à travers tripots et lupanars, mais aussi sous son meilleur jour, à travers la visite de l'Empereur d'Autriche-Hongrie. Et justement, Zofia se situe à la croisée de ces deux mondes, même si de par son statut elle est plus aisée chez les personnes de son rang, elle possède les us et coutumes. Pourtant, ce sont les bas-quartiers qu'elle va écumer, grimée quelquefois, afin de découvrir que la jeune femme de chambre se serait de décider à quitter son service pour se marier à l'ingénieur qui la courtisait depuis quelques semaines - dans l'ignorance la plus totale de Zofia - et partir avec lui pour les Etats-Unis. Les investigations, si elles sont quasiment bâclées par l'appareil judiciaire - qui se préoccupe d'une jeune femme pauvre, d'autant plus qu'elle fut servante - sont reprises par Zofia, et les rebondissements sont de mise. Car les apparences sont trompeuses, seule Zofia s'avère être assez acharnée au point d'en ouvrir grand les rideaux qui dissimulent un état de fait beaucoup moins glorieux.

Le couple Turbotinsky, bourgeois cracoviens, lui éminemment professeur, sont plutôt conservateurs et pas vraiment des ardents défenseurs des droits de la femme, bien au contraire. Zofia dit se complaire dans son rôle de femme de professeur, avec les activités qui sont les siennes, oeuvres de bienfaisance, concours, même si à l'évidence, il semblerait qu'une activité lui manque, puisqu'elle est attirée comme un aimant par ses enquêtes criminelles qui lui tombent pile sous le nez. La mort de Karolina va pourtant l'obliger à quitter ses souliers de femme de professeur pour mettre la question du traitement de la femme en plein devant ses yeux, lui faisant réaliser les extrémités dans lesquelles elles sont poussées afin de gagner leur pain. Et si sa position n'a pas fondamentalement changé, elle finit presque par s'investir personnellement dans les fléaux qu'elle découvre derrière ses rideaux impeccables, propres et repassées, et protecteurs : ici-bas, la vie des femmes ne vaut pas grand-chose, elle est monnayable, elle est remplaçable. Toutes, loin de là, n'ont pas la chance d'une Zofia bien née, beaucoup ne verront que la bassine où elle lave le linge souillé des autres pour unique perspective.

J'aime décidément ce contexte historique dont nous dispense les auteurs autour d'une Cracovie qui n'en a pas fini de nous dévoiler ses secrets : j'apprécie particulièrement les digressions sur l'état de la société cracovienne de l'époque, où comme un double allocutaire de Zofia, nous apprenons causes de la pauvreté des agriculteurs du terroir, où l'on apprend l'existence du réseau de traite des blanches qui n'a franchement rien à envier à nos proxénètes des réseaux mafieux actuels. Et plus, globalement, la situation de Cracovie au coeur à l'époque de l'autrichienne Galicie, dont on apprend qu'elle était la région la plus pauvre de l'Empire, notamment par une comparaison avec l'Angleterre. C'est une combinaison idéale entre histoire des territoires polonais et fiction, qui est, ici encore, très réussie.

Je suis très curieuse de connaître l'évolution de Zofia Turbotinskaya, qui à travers cette enquête, commence à avoir une conscience sociale plus aiguisée, même si Ignacy son époux reste un anti-socialiste convaincu et à vrai dire, à mes yeux, une sorte de pantin qui ignore tout des activités de sa femme. J'attends, avec impatience encore une fois, la suite des aventures de notre cracovienne préférée.
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