-Juste douze heures !
-Douze heures durant lesquelles j’ai cru qu’il t’était arrivé quelque chose. Un accident, ce genre de merde ! En fin d’après-midi, j’ai même cru que tu avais repris Teissier ; il s’est montré moins désagréable que d’habitude quand il a débarqué avec Nazadian en salle de soins.
Je me redresse, courroucée.
-Tu me crois si changeante ?
-J’éprouve des craintes aussi, c’est nouveau, tout ça. Je n’ai pas l’habitude d’être dépendant de quelqu’un. Tu n’es pas la seule à avoir souffert, hier.
Deux heures plus tard, Valentina et moi nous adonnons à un nouvel exercice : la lecture commune des œuvres de prédilection de Cheri Myers, commentée par SMS. Ce soir, l’étudiant anglais tatoué fait l’amour à l’héroïne. Au téléphone…
Sevi dit des choses aussi cochonnes ? 😉 Pourquoi tu ne veux pas me dire comment il se débrouille au lit ? Val !
Je suis intraitable depuis le début : elle ne saura rien, et elle fulmine !
Il est du genre sauvage ? Il te plaque contre un mur et ne te laisse pas respirer ? Peut-être… Il est du genre romantique, attentif ? Il veille à ce que chaque fois qu’il te touche, tu vibres ? Il y a de ça… Tu fais chier… Comment il est alors ?
Je reçois un autre message :
Pour toi, printsessa Ella… On frappe à la porte au même moment.
Il est… là ! 😉 À+ Val !
Je me précipite, pieds nus, à l’entrée de la chambre. — Tu as gardé ta robe ? s’étonne Sevi quand je lui ouvre. Pour que je te déshabille ?
Cheri rit, puis se penche pour me confier une dernière chose :
— On dirait que tu as vu un fantôme, Ella…
— C’est le cas.
— Il se fout du trophée, mais il a juré qu’il ne repartirait pas sans toi.
Quel aplomb ! Je ne devrais pas être étonnée, pourtant !Je me redresse, mécontente.
— Je suis venue pour toi, Cheri. Seulement pour toi.
Je l’ai dit assez fort pour qu’il l’entende. Les yeux vert d’eau se plissent ; je viens de corser le jeu – ou de lui donner plus d’intérêt.Les journalistes nous observent déjà ; je quitte la partie avant que les flashs ne crépitent.
— Il fait quoi dans la vie, Karl ?
— Du proxénétisme et du trafic de drogue, évidemment, raille-t-il, narquois.— Je n’ai pas envie de plaisanter, Sevi.
— Son père est banquier en Biélorussie.
— Bon, c’est pareil…