Citations sur Télérama hors-série. Courbet fou de peinture (14)
Dans ses portraits, Courbet ne s'interroge pas sur son moi profond, et encore moins sur le temps qui passe... Avec force et décision, il se projette dans le monde.
Courbet se frotte aux scènes de genre, à la nature morte, au portrait, à toutes les catégories académiques, pour mieux les transgresser. Son "Enterrement" relève autant du portrait de groupe que de la scène d'histoire. Son "Atelier" allie l'allégorie et le manifeste. Ses portraits surprennent, par leur absence totale de psychologie.
Là où la tradition académique rapproche plutôt la nature morte du portrait, Courbet fait évoluer le genre dans une autre direction, à mi-chemin du paysage. Un trait commun à toutes ses compositions florales : leur absence totale de réalisme.
Courbet ne s'embarrasse pas d'allégories pour peindre le corps des femmes. Aux yeux des contemporains, évidemment, sa peinture fait scandale.
Jusqu'à quel point Courbet peut-il être considéré comme un peintre engagé ? Certes, l'homme a cultivé l'amitié de Proudhon et projeté la destruction de la colonne Vendôme. Au milieu du XIXe siècle, il incarne surtout une figure, celle de l'artiste démiurge, seul placé au dessus des lois.
A l'inverse de ses confrères romantiques, Courbet ne peuple pas ses toiles de phénomènes ou de créatures artificiels. Aucune anecdote chez lui mais, sous l'amas de matière, une paradoxale expérience du vide.
A l'inverse du Gréco, qui mêle savamment les thèmes de la mort et de la résurrection, ou encore de David clairement inscrit dans la peinture d'histoire, Courbet ne livre aucune clef de lecture pour son "Enterrement à Ornans". On n'y trouve ni allégorie, ni transcendance , ni drame, ni espoir.
Courbet ne peint pas sur le motif mais "dans le motif." Il s'en approche au plus près et, par le choix des matières et des techniques, donne à toucher des écorces, des épidermes, des embruns...
Face à "Origine du monde", le spectateur se retrouve en situation de voyeur.
Courbet travaille sous l'emprise de ses sens, avec l'oeil et le toucher. Sans jamais théoriser, il abolit les distances, redistribue le regard entre le peintre, son modèle et le spectateur, souvent placé en situation de voyeur.