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Critique de CDemassieux


Avec L'âme française, Denis Tillinac, excellent chroniqueur, entre autres, à Valeurs actuelles, ajoute sa pierre à l'édifice de réappropriation de l'identité française dans ce qu'elle a de plus noble – nostalgiques du pétainisme, ceci ne vous concerne pas !
Après Eric Zemmour, Alain Finkielkraut ou Philippe de Villiers, le voilà qui s'avance sur les sentiers de notre histoire pour en « pomper le miel » (Balzac). Mais Denis Tillinac, pour autant qu'il soit sincère dans sa geste d'une France de droite ancrée dans le passé et l'histoire, ne saurait ignorer que l'actuelle droite transpire un libéralisme qui n'a pas peu contribué à mettre à genoux la Nation. Alors de quelle droite parle-t-on ? Car, d'emblée, on ne peut s'empêcher d'avoir peur en lisant des phrases comme celle-ci : « Peu d'impôts, peu de lois, empiètements aussi restreints que possible dans les domaines de l'éducation, de l'économie, de la culture et même de la santé publique. » Un rêve américain en somme, le même à qui l'on doit la descente aux enfers de notre pays, mondialisme oblige !
Au-delà du bonheur esthétique – autrement dit parfaitement gratuit s'agissant d'un essai politique – de lire une prose qui ne manque pas de titiller mes papilles littéraires, la droite dont Tillinac se fait le thuriféraire reste toutefois à mon sens un fantasme, particulièrement de nos jours où ses ténors se sont vautrés dans la fange ultra mondialiste qui ne jure plus par la chevalerie ou l'âme aventurière mais bel et bien le fric, si possible gagné vite, peu importent les moyens !
Ces gens-là ne font, à dire vrai, que singer une gauche si bien portraiturée par l'auteur : « Dans les marges de l'ordre social, des insoumis se cherchent des complices pour détruire la norme en vue d'instaurer un autre ordre social. Ceux-là sont de gauche. »
Effectivement, la gauche n'a qu'un idéal matérialiste à opposer au romanesque d'un De Gaulle, par exemple. Idéal menteur, de surcroît : « Quoiqu'il en ait, le socialisme “ multiculturel ” est le complice objectif du mercantilisme multinational. » CQFD ! Or, si c'est « dans les coeurs bien équipés en idéal que se forgent les victoires », nous comprenons pourquoi la France s'effondre lentement mais sûrement depuis que règne le souvenir – jouisseur et sans retenue spirituelle ou simplement morale – de Mai 68 !
Heureusement, au fil des pages, se dessine un autre concept de droite, ni financier ni totalitaire. Un concept d'enracinement culturel, de mémoire et de traditions, toutes choses qui effraient autant une actuelle droite, craignant d'être traitée de réactionnaire en y souscrivant, qu'une gauche pétrie de détestation du passé : « La gauche n'aime pas les racines, elle n'y voit qu'une crispation identitaire. »
Oui, la droite, pourvu qu'elle se décide à renaître de ses cendres, peut être un roman là où la gauche n'est qu'un mode d'emploi terne prétendant nous imposer un bien-être artificieux, jusque dans les rapports homme-femme, souligne Tillinac, omettant que chaque représentante du beau sexe « sera toujours en instance d'évasion dans un ailleurs insaisissable », ajoute-t-il. Non, la femme ne sera jamais l'exacte semblable de l'homme, malgré les théories fumeuses de certaine ministre de l'Education nationale. Heureusement : qu'aurions-nous à aimer follement si la femme ne l'était plus en tant que telle ?!
Tillinac, dans ces pages, nous repose aussi de l'inanité intellectuelle des gloseurs sans consistance qui nous assènent leur pitoyable prose comme parole d'Evangile ! Comme il est plaisant de lire les noms De Chateaubriand et Barbey d'Aurevilly, ces pierres de l'immense et indéboulonnable cathédrale littéraire française ! Mais il est aussi plaisant d'entendre teinter notre histoire, laquelle n'a pas débuté par intermittence entre 1789 et 1981 ! Malgré la légende persistante, avant la Gauche ce n'était déjà plus la préhistoire !
Cette histoire-là, que la droite a lâchement abandonnée pour être dans l'air du temps, perdure dans les consciences. Et c'est moins la place de la Bastille que Versailles, le Louvre ou Notre-Dame de Paris que les touristes viennent contempler ; ces témoins d'un passé dont, à moins d'exhiber une fois de plus son opportunisme, la gauche ne saurait se proclamer l'héritière. Voilà où Tillinac veut peut-être en venir : il existe encore une droite qui frissonne au son des cloches de village !
De la crypte de Saint-Denis au féminin si sacré à nos yeux d'hommes français, Tillinac égrène ainsi une mythologie érudite et non moins entraînante d'une sincère et authentique droite. Hélas, à l'heure où j'écris, celle-ci est une arlésienne…

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