Miracle à la combe aux Aspics

— Les sourdes, les aveugles, les éclopées, les dindes, les muettes, celles aux oreilles décollées, aux grandes gueules, les crasseuses, les salopes, les gouines, s’emporta l’oncle, tout ce qui est femelle se trouve un mari de nos jours.

Le fils cadet se tordait les mains de terreur en attendant les jeux amoureux de son frère et de sa belle-sœur, leurs mugissements inhumains, glapissements déchaînés, brames joyeux, bêlements forcenés, piaillements affectueux, beuglements fiévreux, miaulements caressants, grognements menaçants et aboiements réjouis.

* Le silence régnait, car Jozo ne tolérait aucun bruit quand il f regardait sa série mexicaine, Ivres d’amour.
Mais ce soir-là, il ne put se concentrer sur les événements à l’écran, à cause du bruit provenant de la chambre au-dessus de la cuisine. Domagoj et les deux percepteurs regardaient avec effroi le vieux grimacer, et ils sursautaient chaque fois qu’ils entendaient un objet chuter, les murs trembler, ou que s’élevait un braiment sauvage :
- Oh, espèce de brute ! Qu’est-ce que tu me fais, espèce d’animal !
Le fils cadet se tordait les mains de terreur en entendant les jeux amoureux de son frère et de sa belle-sœur, leurs mugissements inhumains, glapissements déchaînés, brames joyeux, bêlements forcenés, piaillements affectueux, beuglements fiévreux, miaulements caressants, grognements menaçants et aboiements réjouis. Au moment où, de la chambre de Kresimir, se fit entendre un piaulement enjôleur, Jozo éteignit rageusement la télévision, se leva et se mit à haranguer d’une voix grave les représentants de la jeune génération :
- Prenez garde, mes enfants, déclara-t-il doctement en levant l’index. Notre existence terrestre est pleine de tentations, chaque occasion est bonne pour que le mal fonde sur nos âmes chrétiennes. Il n’y a pas de plus grand malheur que lorsque les plus candides d'entre nous se mettent à réfléchir avec leur burette. Quand un homme, jeune, succombe au péché de la chair, il n'a plus sa tête et ne sait plus où il va. La femme s'en empare, elle le concasse, le brise, le réduit en bouillie. Ce jeune homme, hier encore fort comme un boeuf, se trouve laminé. Il salive comme un veau devant l'arrière-train de la femelle, on ne le voit plus au café, il ne joue plus à la pétanque, ni aux cartes, il ne va plus à la chasse, il fuit la boisson et la rixe. Tout ce que le Seigneur nous a donné de beau et de bon, à nous les hommes, il le rejette. Le diable l'a serré contre son sein et l'a anéanti. C'est tout ce que j’avais à vous dire, mes enfants. Et à présent, je vais me coucher, et vous, faites comme bon vous semble.

* - C’est difficile, de nos jours, fiston, lui dit l’oncle Ive après que Crezymir lui eut expliqué la raison de sa venue. Il n’y a plus de femmes. Je regarde les jeunes, aujourd’hui, personne n’a de petite amie. Il y a pénurie, même ici en ville.
- Allez, allez, dit tant de Rosa, encourageante, lui caressant les cheveux, on peut sûrement trouver un ancien modèle au rabais
- Des clous ! cria l’oncle. Elles se marient toutes avant que tu dises ouf ! Tu te souviens d’Alfirevic, celui qui travaillait avec moi, qui a une fille sourde-muette ? Pendant des années, il me disait « Ive, si seulement j’arrivais à la marier », et elle, sainte mère de Dieu, elle a à peine trente ans et c’est la troisième fois qu’elle divorce. Chaque fois qu’elle en trouve un, il lui faut à peine 6 mois pour entamer des disputes.
- Comment une muette peut-elle se disputer ? demanda la tante pensive.
- Les sourdes, les aveugles, les éclopés, les dindes, les muettes, celles aux oreilles décollées, aux grandes gueules, les crasseuses les salopes, les gouines, s’emporta l’oncle, tout ce qui est femelle se trouve un mari de nos jours. Mais après, je ne sais pas…Tu devrais essayer de passer par une agence .
- Une agence ?s’étonna Crezymir.
- Aujourd'hui, il y a des agences, j'ai lu ça dans le journal l'autre jour : tu leur fournis des renseignements - qui tu es et d'où tu viens, ce que tu aimes et comment tu l'aimes - et l'ordinateur choisit la fille qui te convient le mieux. Pas besoin de chercher, en cinq minutes tout est plié, qu'ils disent.
- Oh, je ne les toucherais même pas avec un bâton, ces filles de l'ordinateur, dit la tante avec défiance. Qui te dit qu'elles sont en bonne santé, qu'elles ne sont pas contaminées ?
- Contaminées ? Par quoi ? s'étonna oncle Ive.
- Par un virus électronique, pardi.
- Oh Rosa, bon Dieu, tais-toi. Tais-toi avant que quelqu’un t’entende. Comment ces petites pourraient-elles être contaminées par un virus électronique ?
- Je ne sais pas, moi…, répondit Rosa avec prudence.
- Tu vois que tu ne sais pas. Tu te mêles de choses dont tu n’as pas idée.
- Trouve-t’en une dans une agence., plus cultivée que moi ! répliqua la tante en se tournant vers le fils aîné de sa défunte sœur. Ne l’écoute pas. Personne, dans la famille, ne s’est marié par ordinateur, toi non plus. Sors un peu. Il fait beau, c’est le printemps, la ville est pleine de belles filles, c’est un plaisir de les regarder. Tu ne vas pas aller dans une agence, en passant à côte de ces merveilles du bon Dieu.
- J’ai seulement dit que ce serait plus simple, insista oncle Ive.
- Des nèfles ! répondit Rosa. Celles qui attendent qu’une agence leur trouve un homme, ce sont des feignasses qui restent toute la journée sur leur canapé à manger des biscuits. Il faut se donner de la peine pour trouver un petit ami : se remuer, s’habiller, se maquiller, s’attacher les cheveux, il faut savoir parler, savoir rire, être intelligente, jolie, charmante, rusée… Suer sang et eau, petit, et pas attendre qu’il vienne de lui-même. Par ordinateur ? Laisse-moi rire !

"La justice a les jambes courtes. Elle est lente, dit-on, mais persévérante."

"... la poignée antérieure lui va comme un nichon à une poule" à propos d'une kalach

"Nous sommes à la recherche d'un taliban adopté par un combattant tchétchène marié à une séparatiste basque"

En évoquant l'intercommunale d'électricité "... Ils reviennent pour un oui ou un non. C'est la deuxième fois en trente ans qu'ils viennent me facturer l'électricité. Je ne peux plus tolérer ça"

- Blessures corporelles graves, privation illégale de liberté, esclavagisme, banditisme, brigandage armé, mise en danger de la vie et des biens, entrave à l'action d'un agent public dans l’exercice de ses fonctions, violence contre les fonctionnaires, détention illégale d'armes et d'engins explosifs, conclut l'avocat en jetant un regard inquiet au père et à ses quatre fils.
- C'est grave ? demanda Jozo innocemment.

Le fils aîné de Jozo Aspic n'avait jamais tenu un balai de sa vie; bien qu'il craignît de ne pas savoir l'utiliser, ses doutes se dissipèrent quelques instants plus tard. Cela lui plut, même : il fut empli d'une mystérieuse satisfaction à la vue des planches qui apparaissaient sous la couche de poussière, du-moins jusqu'à l'arrivée de Zvonimir et de Branimir.