Grâce à ses sociétés minières qui versaient chaque année des centaines de millions de francs CFA en redevances et impôts, le Québec avait ici le poids politique d’un grand pays, même si on savait, dans les cabinets ministériels, qu’il ne s’agissait que d’une province du Canada. En outre, on y parlait français.
On ne pouvait être haut fonctionnaire en Afrique de l’Ouest si on ne savait distinguer les politiciens influents des pantins.
Je vis parmi les riches, mais je ne suis pas riche.
Les femmes font vivre l’Afrique, mais elles n’ont pas voix au chapitre.
Nous travaillons sept jours par semaine, vingt-quatre heures par jour. Le patron peut nous appeler à minuit et nous devons accepter le travail qu’il nous propose. Nous faisons notre métier avec passion, mais, après quelques années, l’usure s’installe. Il faut aussi survivre, cumuler les emplois pour nourrir la famille. Cela nous rend très vulnérables aux conflits d’intérêts. Comment faire, quand il faut d’abord survivre?
Je suis dans un autre monde, dans un autre temps. C’est bouleversant. J’en oublie ce que je faisais et ce que j’étais, ailleurs, avant. L’Afrique est dangereuse. Elle entre sans prévenir dans les pores de la peau.
C’est l’Afrique. Il faut porter ce qu’on peut.
Quand on quitte les grands boulevards de la capitale, c’est comme se lancer dans une guérilla urbaine. Impossible de s’orienter. Impossible de se repérer.
N’oublie pas que tout n’est pas mauvais dans la culture africaine. L’amour des enfants est omniprésent chez nous. La famille est sacrée. L’entraide est une seconde nature. Je n’ai pas vu ces richesses en Europe.
On ne peut pas sauver tout le monde en même temps. On doit commencer par construire des écoles, former des instituteurs. Quand suffisamment de jeunes auront découvert le monde moderne, quand les livres, la radio, Internet et la télévision auront pénétré dans tous les villages, l’Afrique vivra un grand bouleversement.