Citations sur Nos jeux clairs-obscurs, tome 2 : Obscurité (13)
Des amants maudits, voilà ce que nous sommes, et nous le savons pertinemment.
Sandro a attisé ma flamme jusqu'à la transformer en un véritable brasier. Avec violence, douleur et passion.
C'est à toi de lui apprendre pas à pas, de lui enseigner une meilleure façon d'aimer. Pour accomplir ça, tu connais la marche à suivre!
Seule, la douceur échouera: elle doit s'allier à sa jumelle, la douleur...
Combats le mal en t'y abandonnant. Exorcise ses démons en les invoquant. Affronte sa créature en la libérant. Ne lâche jamais rien, même au plus fort de la douleur. Montre-lui que tu n'es pas fragile. Redis-lui. Répète-lui mille fois s'il le faut les mots incrustés dans ton coeur en lettres de feu!
- Je t'aime, salopard! Craché-je contre sa bouche tachée de sang, que j'ai meurtrie avec mes dents.
Je dépasse mes réserves, repousse mes limites, détruis mes tabous, surmonte mes angoisses, écoute mes instincts de femme, émerge de mon coquillage géant.
Un brin de liberté. Je savoure le goût perdu de ce mot.
Un éclat de folie. Je découvre ce terme.
La clarté qui se dessine entre deux obscurités. J'en suis pleinement consciente
Je vais encaisser la douleur, dépasser ma terreur et vaincre sa noirceur. Je me battrai pour lui, pour nous, pour la vie. Voilà l’œuvre finale que j’ai dans la tête et dans le cœur, celle qui compte plus que tout pour moi : notre reconstruction.
— Ma belle Vénus claire-obscure, murmure-t-il en titillant les pointes colorées de mes seins avec la brosse. Tu as déjà en toi la clarté… (Avec lenteur, le pinceau balaye la ligne médiane de mon buste jusqu’à mon pubis, marquant une pause infime dans mon nombril.) Il ne te manque que l’obscurité pour atteindre notre équilibre.
Je vais l’honorer, la vénérer, me gorger de tout ce qu’elle va m’offrir… et la souiller, évidemment, puisque sa pureté est un appel à ma dépravation.
Elle est ma déesse Vénus.
Il frôle mes lèvres d’un baiser qui éveille tous mes sens, puis déclare avec un sourire carnassier :
— Que le jeu commence.
Au moment où il me possède d’un coup de reins sauvage, je comprends que ce ne sera ni doux, ni tendre.
Je suis coincée ici... À la merci de mes psychoses qui enflent... J’ai l’impression que je vais mourir seule dans cette pièce... Que l’oxygène dans mes poumons est corrosif... Que mon corps va me lâcher... Que mon cœur va rendre l’âme...
La porte s’ouvre et je relève la tête en rouvrant des yeux désabusés. Mon mari...
... n’est pas là.
Sandro, oui. »
Je viens de réaliser que je ne fuirai pas en dépit de ses spectres, ma terreur, sa folie, mes doutes, sa violence, ma rancœur, son anormalité, ma tristesse.
Je suis prête à affronter tous ces tourments juste pour lui.
Et ça ne peut vouloir dire qu’une chose.