« C'était un principe auquel il fallait obéir religieusement que, dans l'Angleterre, une terre passât du père au fils aîné, et, à défaut du fils, à l'héritier mâle le plus proche. L'Angleterre ne serait pas ruinée parce que Llanfeare serait transmis en dehors de l'ordre régulier, mais l'Angleterre serait ruinée si les Anglais n'accomplissaient pas les devoirs qui leur incombaient à chacun dans la situation à laquelle Dieu les avait appelés, et, dans ce cas, son devoir à lui était de maintenir le vieil ordre des choses. »
Indefer Jones a longuement hésité avant d'établir son testament. Il aimerait tant pouvoir laisser ses terres de Llanfeare à sa nièce Isabel. Celle-ci vit avec lui depuis des années et est appréciée de tous les fermiers et villageois. Mais Indefer Jones veut respecter la tradition et se décide en faveur de son neveu Henry. Il le connaît à peine et ne le porte pas dans son estime mais c'est un mâle. Indefer Jones a néanmoins une idée pour régler son cas de conscience : et si Isabel épousait son cousin Henry ?
Anthony Trollope utilise une thématique très anglaise dans ce court roman, la propriété ne peut revenir qu'à un homme. C'était déjà la problématique de « Raison et sentiment » de
Jane Austen. Les femmes sont les laissées pour compte de la succession anglaise ! Alors même qu'il n'a jamais rencontré son neveu auparavant Indefer Jones préfère lui laisser ses biens plutôt qu'à Isabel qui lui tient compagnie chaque jour. L'oncle sera rongé par des doutes et des regrets jusqu'à son dernier souffle.
Comme dans «
Miss Mackenzie », il ne se passe pas grand chose dans «
le cousin Henry ».
Anthony Trollope est plus intéressé par la psychologie de ses personnages que par une intrigue à rebondissements. Les caractères de Henry et Isabel sont au coeur du roman.
le cousin Henry est la lâcheté incarnée et d'une mollesse de caractère incroyable. Il n'agit jamais par méchanceté mais il est totalement incapable de prendre la moindre décision. Néanmoins, il n'est pas totalement antipathique. A son arrivée au village gallois de son oncle, tout le monde le déteste alors que le pauvre n'a rien fait. Il n'inspire que mépris à son oncle et sa cousine. Rien n'est fait pour l'aider ! Quant à elle, Isabel est affectueuse avec son oncle, elle incarne l'abnégation et la droiture. Mais on se rend vite compte que tout cela n'est que fierté et orgueil. Elle n'est finalement pas très sympathique.
«
le cousin Henry » est finalement une nouvelle occasion pour
Anthony Trollope de déployer son immense talent pour les analyses psychologiques. Fin connaisseur de la nature humaine, il nous montre l'effet dévastateur de l'argent de l'héritage d'Indefer Jones. Cette deuxième lecture de Trollope confirme mon envie de découvrir toute son oeuvre.
Lien :
http://plaisirsacultiver.unb..