Il comprenait maintenant le calme soudain dans la cabine. C'était la mort qui leur avait apporté cette résignation, ce sentiment d'être soulagé du tumulte du monde, cette sérénité qu'on conquérait en s'affranchissant des désirs et des envies terrestres. Il était mort;
Yûzô avait ri en retraçant les circonstances de sa mort. Quelle manière ridicule de mourir, avait-il dit.
Mais, après tout, quelle manière de mourir n'était pas ridicule ? se disait Takeshi. Tout un chacun ne pensait-il pas la même chose de sa propre mort ? Les gens qui avaient accompli de grandes choses dans leur vie devaient se dire au moment de mourir que tout ce qu'ils avaient réalisé était dénué de sens.
Quand un riche mourait, il était ruiné. Même ceux qui profitaient d'une longue vieillesse en venaient à penser que vivre si longtemps ne rimait à rien.
- Quel chemin emprunteras-tu : le droit chemin ou le chemin de traverse ?
- Lequel est le plus long ?
- Les deux sont courts.
En Enfer, il suffisait de fixer les gens du regard pour capter des moments de leur vie. Ce n’était pas une bulle explicative qui apparaissait au-dessus de leur tête, comme dans un manga, ni de la télépathie. La vérité surgissait d’elle-même comme une vision en arrière-plan de son propre esprit.
La plupart des japonais n’ont pas de religion, ni aucun substitut divin ; ils ont même perdu le respect de leur aînés. Alors dès lors qu’ils obtiennent une once de pouvoir, ils se prennent eux-même pour des dieux. On pourrait dire que l’enfer sert à se défaire de cette illusion. En fin de compte, c’est la seule différence avec le monde des vivants…