“les soucis que nous portons avec nous
qui sont nos vêtements intérieurs
que nous mettons tous les matins
que la nuit défait avec des mains de rêve »
Je pense à la chaleur que tisse la parole
autour de son noyau de rêve qu'on appelle nous.
Je parle de qui parle qui parle je suis seul
Je ne suis qu’un petit bruit j’ai plusieurs bruits en moi
Un bruit glacé froissé au carrefour jeté sur le trottoir humide
Aux pieds des hommes pressés courant avec leurs morts
Autour de la mort qui étend ses bras
Sur le cadran de l’heure seule vivante au soleil
Je pense à la chaleur que tisse la parole
Autour de son noyau le rêve qu’on appelle nous.
le loup embourbé dans la barbe forestière
a trouvé son berger l'immobile berger
celui qui mène tous les yeux plantés au faîte des acropoles mouvantes de la foi
le berger des incommensurables clartés d'où naissent la vie et la dérive
il se lève
émigre vers les célestes pâturages des mots.
de tes yeux aux miens le soleil s’effeuille
sur le seuil du rêve sous chaque feuille il y a un pendu
de tes rêves aux miens la parole est brève
le long de tes plis printemps l’arbre pleure sa résine
et dans la paume de la feuille je lis les lignes de sa vie
Dimanche lourd
Couvercle sur le bouillonnement du sang
Hebdomadaire poids accroupi sur ses muscles tombés à l’intérieur de soi-même retrouvé
Les cloches sonnent sans raison et nous aussi.
matin matin
matin scellé de cristal et de larves
matin de pain cuit
matin de ventaux en folie
matin gardien d’écurie
matin d’écureuils et de polisseurs de vitres fraîches à la rivière
matin qui sent bon
haleine attachée aux stries de l’iris
homme approximatif te mouvant dans les à-peu-près du destin
avec un cœur comme valise et une valse en guise de tête
buée sur la froide glace tu t’empêches toi-même de te voir
grand et insignifiant parmi les bijoux de verglas du paysage
les lourds battants de ta jeunesse s'ouvrent
un vent à perte de jours circule en toi
et dans les ports la terre finit les bras élancés