Pfffff, …. Quelle chaleur écrasante à Los Angeles aujourd'hui.
D'un petit coup de pied dans l'eau, j'éloigne du bord de la piscine le matelas en plastique.
Je plonge la main dans l'eau bien fraiche, le ciel est d'un bleu azur sans tache, les murs de la maison d'un blanc immaculé, les grandes baies vitrées reflètent la lumière du soleil.
David Hockney, ça vous dit quelque chose ?
Dans ma maison parfaite, avec mes filles parfaites, ma cuisine parfaite, mon mari parfait, le tableau ne pourrait pas être complet sans moi, bien sûr. Vous m'avez reconnue, la femme, l'amante, la mère, l'épouse et la ménagère parfaite. Oui, la ménagère parfaite, vous avez bien lu, car nous sommes en 1958 mes amis, et je ne suis pas une business woman accomplie, non, moi, je veille toute la journée sur ma maison, mes enfants et je donne des ordres à la bonne, car tout se doit d'être imp-pe-ccable, comme la pelouse d'un vert tendre dont pas un brin ne dépasse, quand mon mari rentrera enfin de son dur labeur.
Je ne m'autorise pas d'autre rêve que celui d'aller au centre commercial, sauf que ce centre commercial, je pourrais y aller pour une fois oser m'y acheter un peu de liberté, car la seule passion que je m'autorise, c'est la peinture, ma voisine Genevieve pense même que je pourrais avoir un certain talent. Mais qui cela intéresse-t-il au fond ?
Alors, au cours d'un de ces interminables après-midis, j'ai décidé que cette journée au bord de la piscine serait la dernière, de tout envoyer valser par-dessus-bord et j'ai disparu sans crier gare, non sans avoir arrosé une dernière fois mes géraniums auxquels je tiens tant …
La britannique
Inga Vesper m'a emmenée à bord de sa belle Crestliner sous le soleil brulant de Californie et m'a présentée Joyce, la femme blanche parfaite et Ruby sa bonne noire qui trime chez elle pour quelques cents de l'heure. Mais Joyce et Ruby ont un point commun, un secret, qu'elles seules ont partagé. Quelle idée de discuter avec sa bonne, car des amies, Joyce ne semble pas en manquer, mais qui sont-elles vraiment ces Desperate Housewifes des années 50 ?
Inga Vesper brosse un portrait réussi de ces toutes ces femmes. En particulier, de Joyce et Ruby qui rêvent toutes les deux d'une autre vie, l'une pauvre petite fille riche dans sa belle maison, l'autre espérant gagner suffisamment d'argent pour pouvoir faire des études à l'université. Elles se retrouveront toutes deux soumises aux hommes, à leur violence, leurs préjugés. Si bien sûr tout cela est un peu manichéen et la fin un tantinet brouillonne, la critique sociale est bien présente, les personnages ont suffisamment d'épaisseur pour qu'on s'y attache, et, on ne peut être qu'atterré.e de constater que depuis 1958 finalement, malgré de nombreuses avancées, les préjugés ont la dent dure et beaucoup de choses n'ont pas tant évolué. Même si l'on sent le regard parfois un peu trop contemporain sur l'époque de l'auteure, c'est un roman agréable, avec des pointes d'humour bien senties, à lire au bord de l'eau sous le parasol, de quoi ne pas voir passer l'après-midi... Vous reprendrez bien un petit cocktail ?