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Critique de mh17


Ce livre (2003) est un régal ! Ludique, drôle et tendre. Il traite de mémoire, de solitude et de création littéraire.

Il s'ouvre par une scène improbable. le narrateur, alter ego de l'auteur, participe à un concours de sosies d'Hemingway à Key West, en dépit du fait qu'il ne ressemble pas du tout à Hemingway. Après s'être bien ridiculisé, il fait un voyage à Paris avec son épouse et se consacre à passer en revue sur le mode ironique les deux années qu'il a vécues dans cette ville, en 74-75, au cours desquelles il fut non pas « très pauvre et très heureux «  comme Hemingway mais « très pauvre et très malheureux ». Ces notes qu'il a jetées machinalement sur son siège dans l'avion du retour et qu'il feint d'avoir oubliées, seront à l'origine de « Paris ne finit jamais », la triple conférence de deux heures qu'il aura l'honneur de prononcer dans un symposium à Barcelone consacré à l'ironie.

Les 110 notes soit-disantes éphémères qui suivent sont écrites sur le ton de la conversation avec des digressions sur le présent du narrateur dont on sait depuis l'ouverture qu'il est un imposteur grotesque à la mémoire défaillante. Au récit auto-parodique de souvenirs personnels drôles et mélancoliques, se mêlent la littérature (française surtout) et sa parodie.

Et nous voilà à Paris, période post-soixante-huitarde. le jeune écrivain barcelonais plein d'ambition s'est exilé pour composer « La lecture assassine ». Il est entièrement vêtu de noir, porte une barbe noire, fume la pipe et promène un regard tourmenté comme un vrai poète maudit. Et il veut aussi car c'est la mode, se faire passer pour un jeune Situationniste. Il loge dans une chambre de bonne que lui loue Marguerite Duras et dans laquelle des célébrités sont passées avant lui. Il ne la comprend pas bien Marguerite Duras car elle parle constamment un « français supérieur » et lui donne des conseils d'écriture sibyllins. Il faut dire que l'écrivain en herbe à l'ambition de tuer le lecteur et Duras est sublimement stupéfaite. Au fil du texte, Marguerite Duras réapparaîtra de manière saugrenue dans des scènes formidables. le jeune apprenti se fraye un chemin à Saint-Germain-des Prés, se faufile au Flore haut lieu de tradition apatride et dans d'autres cafés emblématiques avec quelques exilés hispaniques et latino-américains. Il nous fait entrer dans des caves mystérieuses où des illustres tiennent des conférences, à moins qu'il ne s'agissent d'imposteurs ou de travestis. Il brosse le portrait de figures haut-en-couleurs, il décrit avec un humour tordant le petit monde gravitant autour de Marguerite qui vient de tourner Indiana Song. Il nourrit sa mémoire de tout ce petit monde en pique-assiette littéraire astucieux. En même temps seul dans sa mansarde à lui, face au portrait de Virginia Woolf le jeune écrivain est en proie aux doutes et erre au milieu de ses obsessions littéraires.
Au terme de son séjour parisien il ignore encore s'il est devenu l'écrivain qu'il voulait être. Il retourne cependant à Barcelone en sachant désormais taper à la machine convenablement et, nanti de l'ultime et précieux conseil de Marguerite qu'elle tient de Queneau, il pressent comment il doit pratiquer son métier.

J'ai lu ce livre plein d'originalité et de fantaisie d'une traite en riant souvent. J'en lirai d'autres car Paris ne finit jamais.
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