-Et vous, mon général, quel est votre choix ?
-Moi ? Je reste. Pour vous, partir, c’est vivre. Pour moi, partir, c’est mourir... à ce pour quoi j’ai vécu.
« Combattu souvent, battu parfois, abattu jamais » : la vie de François-Athanase Charette de la Contrie est à l’image de sa devise.
Ce sont surtout les femmes et les enfants que vise ce « plan d'extermination ». On doit traiter les enfants comme de « futurs brigands », car petit deviendra grand. Ils ont vu, de leurs yeux. Ils n'oublieront pas. Les femmes quant à elles, ne sont pas seulement des « brigandes » mais des « sillons reproducteurs » qui renouvellent l'engeance. Il faut écraser du pied tous ces petits serpents de buisson et les mère vipères qui les élèvent dans leur sein.
Combattu souvent, battu parfois, abattu jamais.
J'avais participé aux grands événements de mon temps : l'indépendance de l'Amérique, les soubresauts du monde balte, les prémices de l'émancipation des Grecs, la guerre russo-turque, les tentatives de déploiement de l'Empire russe en Méditerranée. J'avais approché des légendes vivantes - des soldats, des savants, des héros.
Il y avait de quoi remplir une vie. Une vie de souvenirs. A raconter entre deux chasses à la perdrix.
Combien aura-t-il donc fallu de maladresses des nouvelles autorités pour faire d'un bûcheron tranquille qui pousse la même cognée de père en fils, un tireur de l'ombre qui va mourir entre les arbres qu'il chérit ?
Alors, jaillit du sillon, sortie des entrailles de la terre, la sommation vitale d'un petit peuple. On a quitté le pignon de la ferme parce que les nouvelles autorités ont touché la maison en son cœur, là où repose en paix, sous la poutre maîtresse, cette petite demeure invisible, immémoriale, inviolable, qui noue la coutume, la parole et les visages oubliés. Là où se loge un trésor plus sacré encore que la vie. Cette demeure invisible abrite les croyances ancestrales, aujourd'hui bosculées, culbutées, souillées. "Plutôt la mort que la souillure" comme disent les Bretons. Alors, jeune ou vieux, on a tout quitté.
"Il faut employer le fer et le feu, mais surtout rendre les Vendéens coupables, aux yeux de la Nation, du mal que nous leur faisons."
Rien n'est perdu de la peau ou du corps des brigands : aux Ponts-Libres, on sélectionne les peaux d'hommes - "...d'une bonté supérieure à celle des chamois" -, à Clisson, on préfère la graisse des femmes. (...) c'était comme de la graisse de momie, elle servait pour les hôpitaux.