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Citations sur Abraham le Poivrot : (Loin de Tolède) (7)

Et dans le paradis des ânes, un âne gris au sang andalou tourne et tourne en rond, toujours sur place, mais la roue puise de l'eau et arrose les racines même de la vie. Et c'est ainsi que grossit une citrouille jaune, tout comme cet espoir qui jamais n'abandonna les miens au long de leur interminable et épuisant périple depuis Tolède jusqu'à Plovdid.
Et si ce voyage à l'autre bout du monde jusqu'ici possède un sens quelconque, c'est celui de l'amour d'une fille - Araxi Vartanian.
Seulement l'amour et rien d'autre !
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Il était aussi connu sous le nom de Manouche la Clarinette, ce qui ne lui rendait guère justice puisque, outre la clarinette, il jouait divinement de tous les instruments et que s'agissant de musique, il n'existait pour lui aucun domaine inaccessible. Cela restait vrai du classique, par exemple d'Amadeus Mozart et de sa petite musique de nuit que Manouche Aliev enrichissait généreusement d'acrobatiques variations tziganes jusqu'à la transformer en grande musique de minuit.
Manouche était un véritable tablent, plein de grandeur et de furie. Dans les moments de suprême inspiration passaient dans ses yeux les lueurs de feux de camp tziganes, les crinières de chevaux au galop et les démons qui incendiaient ses veines brûlaient comme raki de Karlovo trois fois bouilli pour inonder les âmes de l'éclat des étoiles.
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La majeure partie des conversations, des criailleries, des jurons et des chansons, parvenait encore aux oreilles du promeneur égaré en ces ruelles dans cet étrange espagnol (ladino) dont nous avons déjà dit un mot. Mais les familles turques et bulgares ne manquaient pas non plus, et chacun parlait plus ou moins la langue de ses voisins : les petits Bulgares s’insultaient mutuellement en turc, et chaque vendredi soir, le cordonnier du quartier, le Turc Izmet saluait respectueusement ma grand-mère d’un Schabbat chalom !, tandis que les Juifs, à l’occasion d’une naissance ou d’un décès dans une famille musulmane du voisinage, faisaient porter un plat de feuilletés au fromage qui signaient leur origine d’un nom turc auquel s’accrochait la traîne d’une terminaison espagnole : burekas.
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- Tu restes avec lui ?
- Oui. C'était déjà écrit quand le vieux Grec a lu dans ton marc de café. J'ignore ce qu'il a vu au fond de ta tasse, mais pour ce qui est de l'art de la divination, nous, les Arméniennes, nous sommes de véritables sorcières du café.
- Je m'en souviens, dis-je. Camera obscura. Et qu'est-ce qui était prédit dans cette camera obscura ?
- Je nous ai vus tous les deux, chacun à un bout d'une route éclairée. Nous marchons l'un vers l'autre, ais la route était coupée en deux endroits. Et impraticable.
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(p. 276)

« Les yeux des hommes ne sont pas bandés !
- Qui t’a raconté une bêtise pareille ? (…) Ils sont bandés, mon garçon, et comment ! Mais le bandeau est invisible, à la différence de celui de l’âne. Il est ingénieusement conçu, celui des hommes, on le remarque difficilement. Et il y a différents bandeaux, oh ! oh ! il en existe de tous les genres ! » (…)
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Il s’agissait bien entendu de café turc, mélange de café véritable et de pois chiches grillés ou de seigle brûlé. Les proportions en étaient depuis longtemps précisément définies à la manière d’un dogme irréfutable, le onzième commandement, qu’exprimait la formule espagnole "uno i uno", c’est à dire "une pour une". Mais rien ne serait plus erroné que de croire qu’il était question d’une dose de café pour une dose de pois chiches grillés. Pour les vieilles juives, cette proportion dogmatique signifiait en réalité du café pour un Lev et une quantité de succédané à hauteur de la même somme. Fort de ses connaissances en simple arithmétique, le lecteur instruit n’aura aucune difficulté à calculer le résultat de pareille alchimie, sachant que le café coûtait vingt fois plus cher que son substitut.
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- Pourquoi a-t-il fait ça ? demande sans raison Araxi. Pourquoi ?
- Parce qu'il avait perdu l'espoir...
- L'espoir en quoi ?
- L'espoir est un état de l'âme. Il n'a pas besoin de raison pour exister. Tout comme la foi, l'absolu, l'inconditionnel. Il n'a pas besoin d'argument ni de preuve. Soit on l'a, soit on ne l'a pas. Comme la nature. Comme les étoiles. Elles sont un état de la matière. Voilà pourquoi c'est affreux lorsque l'espoir te quitte. Comme si les étoiles s'éteignaient... ais-tu à quoi il ressemble ?
- L'espoir ? Non, je ne sais pas.
- A une citrouille.
- Une citrouille ?
- une grosse citrouille jaune.
Elle me jette un regard méfiant.
- Tu te sens bien ?
- Non, dis-je. Je ne me sens pas bien du tout. Je me suis souvenu du Poivrot. Lui aussi avait perdu tout espoir. Mais il m'a montré un âne qui, lui, ne le perdait jamais. Il avait l'espoir que la citrouille grossirait et grossirait encore. Ce n'était qu'un âne, mais il y croyait. Sinon quel sens y aurait-il à tourner en rond autour d'un axe ?
- Tu es sûr que tu vas bien ? demande-t-elle à nouveau en me jetant un regard plein d'inquiétude.
Je ne réponds pas, mes yeux sont pleins de larmes.
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