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Critique de Lamifranz


Dans l'histoire de l'humanité, la date de 1453 (prise de Constantinople par les Turcs), pour beaucoup d'historiens, est une date charnière. Beaucoup y voient la date où prend fin le Moyen-Age, et celle où commence l'Age moderne. D'autres pensent que c'est plutôt 1492, date de la découverte de l'Amérique. Moi je pencherais plutôt pour 1453 (mais je ne suis pas historien), parce que l'Amérique, il y a belle lurette qu'elle avait été découverte, et d'autre part, parce la chute de Constantinople ne signifie pas seulement la fin du Moyen-Age, mais aussi celle de l'Empire byzantin, autrement dit l'Empire romain d'Orient, héritier et continuateur (pendant quinze siècles) d'un système politique sans équivalent en puissance, zone d'influence et en longévité.
Le siège et la chute de Constantinople sont donc au coeur de ce roman historique de Mika Waltari. On y rencontre tous les grands personnages de l'époque, à commencer par les deux adversaires l'empereur Constantin XI et le sultan Mehmet II, ainsi que la foule des autres intervenants, militaires ou civils, avec toutes les incidences politiques des autres nations, notamment Gênes et Venise dont le rôle n'est pas toujours très clair, également toutes les divergences religieuses qui déchirent le monde de l'époque.
Un homme est témoin de ce drame qui se joue devant lui. Il tient un journal où il consigne ses observations, et aussi ses propres aventures, puisqu'il est aussi acteur dans cette tragédie. Il s'appelle Johannes Angelos, Jean l'Ange (il faut rappeler que Ange est un prénom très répandu dans le monde byzantin). Comme tous les héros de Mika Waltari (Sinouhé l'Egyptien, Turms l'Etrusque, Minutus le romain, c'est un être en constante quête d'identité. Personnage tourmenté, il a une vocation quasi christique. Et hautement symbolique : dans ce monde en ébullition, il est le reflet de tous les antagonismes, religieux, politiques, et sa quête, dans ces conditions ne peut être que pathétique. D'autant plus qu'il vit une intense histoire d'amour, qui aurait pu faire le contrepoids de sa destinée, mais qui en fait, en sera seulement une autre face. Comme cet autre Ange, l'ange noir qui lui apparaît aux plus mauvais moments de son existence. (On pense à Musset : cet inconnu vêtu de noir, qui me ressemblait comme un frère)
La destinée de Jean l'Ange est le fil conducteur du roman, mais il s'articule dans une vaste trame historique. Comme d'habitude, Mika Waltari dresse un tableau parfaitement crédible de l'époque et des évènements : s'appuyant sur une documentation rigoureuse, basée sur les historiens de l'époque (le seul accroc à cette honnêteté historique est le personnage d'Anna Notaras, qui avait à l'époque déjà quitté Constantinople pour Venise), il met son talent de conteur au service d'une histoire dense, palpitante, exaltante, alternant le sens du détail et les vues générales, les considérations politiques, religieuse et philosophiques avec la description réaliste du siège et de ses excès, il donne corps à des personnages exceptionnels auxquels il est impossible de ne pas s'attacher.
Un autre roman, intitulé « Jean le Pérégrin » et paru en 1982 (mais écrit antérieurement aux « Amants de Byzance ») raconte la vie de notre héros avant le siège. Mais c'est un roman totalement différent, beaucoup plus profond, beaucoup plus ciblé sur les querelles religieuses, moins dépendant également du cadre historique dans lequel il s'insère.
Avec ce roman, Mika Waltari affirme sa place dans le peloton de tête des grands auteurs de romans historiques. Mais quand on a déjà fait connaissance de « Sinouhé l'Egyptien », de « L'Etrusque » et du « Secret du royaume », on n'est guère étonnés, pas vrai, les amis ?
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