Elle ouvrit complètement son corps en poussant un énorme braiment et en vomissant une nouvelle quantité d’immondices. La bile qui coulait sur son visage et les larmes qui lui emplissaient les yeux étaient chargées de particules noires. Son nez dégageait une odeur de renfermé, un répugnant parfum terreux.
Elle commençait à avoir la rage au ventre. Elle lui remontait le long du gosier, et elle savait qu'elle était sur le point de dire des choses désagréables. Son manque d'assurance, sa peur, sa panique et sa souffrance, d'une manière générale, alimentaient ce qui s’annonçait comme une prodigieuse explosion, et elle savait qu'elle ne pourrait rien faire pour la réprimer. Ce qui allait sortir allait être enflammé, acide, et, pour une grande partie, simplement cruel.
La vie de ces gens malades qui mouraient de faim ne tenait plus qu'à un fil.Le restant de leurs jours, il leur faudrait constamment affronter la peur, la mort.Ils vivaient comme des bêtes.Ayaan avait connu des réfugiés, elle-même en avait fait partie, que ce soit avant ou après l'Epidémie. Elle savait ce que c'était, la famine, la guerre, la pestilence. On aurait dit que l'Amérique apprenait ses leçons dans un livre d'écolier africain.
La chair de son corps était si froide. La peau était molle, mais son contact était si froid. Elle hocha la tête contre sa main.