Ce tome fait suite à Witches ; il comprend les épisodes 94 à 100 de la série mensuelle.
Pour commencer, la Bête doit s'interposer entre la Fée Bleue et Geppetto, King Cole doit réfréner les initiatives d'Ozma, il doit également décider avec Bigby, Blanche Neige et Beast de comment diriger la Ferme, Maddy doit trouver le moyen d'envoyer ses rapports sur les agissements de Mister Dark sans se faire prendre, Frau Totenkinder doit convaincre Dunster Happ de lui dire comment vaincre Mister Dark. Et Rose Red assiste à une apparition de sa défunte mère. Cette dernière va lui révéler les véritables circonstances de la séparation entre elle et sa soeur Blanche Neige, ce qui est l'occasion pour le lecteur de redécouvrir son aventure avec les 7 nains sous un tout autre jour, d'une vraie noirceur cruelle. Pendant ce temps là, Geppetto, Ozma et Brock Blueheart se sont liés pour constituer une coalition s'opposant à celle de King Cole, afin de devenir les gérants officiels de la Ferme. le duel tant attendu entre Frau Totenkinder et Mister Dark a lieu, jusqu'à son terme.
Le tome précédant dégageait un charme certain, ainsi qu'un léger parfum de déjà vu avec Mister Dark prenant la place de l'Adversary. Ce parfum persiste en plus diffus, mais les péripéties et les révélations se succèdent à un rythme tellement soutenu avec une multitude de personnages que cet aspect devient très secondaire et que le plaisir du divertissement prend le dessus.
Bill Willingham a donc changé de braquet pour une accélération impressionnante, sans rien sacrifier des personnages et des ambiances. Cette histoire permet la convergence de plusieurs intrigues et donc l'apparition de nombreux personnages. Jugez un peu : Rose Red (évidemment puisqu'elle prête son nom pour le titre), Blanche Neige & Bigby et leurs sept enfants, Mister North, Geppetto, Ozma, Frau Totenkinder, Pinocchio, King Cole, Maddy, Stinky, Clara (le dragon à la forme sortant de l'ordinaire), Blue Fairy, le docteur Swineheart et l'infirmière Sprat, la Belle et la Bête, Bufkin, Thumbelina, Flycatcher, Reynard le renard,... , Prescot, Leland et Thaddeus (les 3 souris aveugles).
Willingham n'a pas d'autre objectif que celui de divertir. Il ne développe pas de point de vue particulier sur le sens de la vie, ou de thème philosophique. le summum en termes de message est atteint lors d'un discours passionné de Rose Red sur le fait que lorsqu'on est mal fait de sa personne il vaut mieux être aimable et souriant pour être accepté en société. Comme degré zéro de leçon de vie, on ne fait pas beaucoup plus à ras les pâquerettes. Par contre, comme divertissement, ce tome remplit sa mission sur tous les plans. La plus grande récompense pour le lecteur est de voir les personnages évoluer, sans stagner.
Willingham ne cherche jamais à revenir à statu quo antérieur. Parmi toutes les évolutions, je peux citer (sans dévoiler des secrets, ce qui gâcherait le plaisir de lecture) que Frau Totenkinder connaît une évolution irréversible et que le lecteur apprend enfin si la layette qu'elle avait tricoté pour le bébé à naître était de la bonne forme ou non. Les interactions entre les personnages ne révèlent pas une sensibilité psychologique pénétrante de l'auteur, mais elles font exister chacun au-delà d'un ou deux stéréotypes.
6 épisodes sur 7 sont dessinés par
Mark Buckingham qui est en grande forme. Il allie avec son savoir faire habituel les démonstrations de pouvoirs magiques en pleine action avec le coté iconique et plus grand que nature des personnages. C'est toujours un régal pour les yeux. L'encrage est partagé en
Steve Leialoha (toujours parfait pour embellir les dessins de Buckingham),
Andrew Pepoy (un peu moins sophistiqué) et une vingtaine de pages par
Dan Green (à la main un peu lourde et pataude). L'épisode 99 est consacré à la rencontre entre Mister Dark et Mister North et illustré par
Inaki Miranda dont le trait est plus fin et plus précis, pour un résultat différent et très agréable.
J'ai vraiment retrouvé dans ces 7 épisodes tout le souffle et le dynamisme des meilleures histoires de cette série.
L'épisode 100 s'accompagne de nombreux bonus. Il y a un épilogue consacré à l'infirmière madame Sprat, un consacré au nouveau né, un consacré à Thumbelina et un consacré aux 3 souris aveugles (3 pages illustrés par Joao Ruas, le nouveau responsable des couvertures). Les interventions de ces dernières sont de plus en plus drôles et savoureuses. On retrouve la rubrique de réponse aux questions des lecteurs. Qui réalise les comics Fables (illustré par
Dave Johnson) ? Quel est le numéro de téléphone personnel de Blanche Neige (1 page magnifique d'
Adam Hughes) ? Depuis la mort de Baba Yaga, que fait Bufkin pour passer le temps ? À quoi pensait Geppetto quand il a sculpté Pinocchio (2 pages illustrées par JH Williams III) ? Il y a également des figurines à découper pour faire un décor, un jeu de plateau et des pages de crayonnés de
Mark Buckingham. Enfin, il y a une nouvelle de 9 pages écrites par Buckingham avec quelques illustrations de
Bill Willingham (ils ont inversé leurs rôles pour un résultat très lisible).