Citations sur Ce que je suis en réalité demeure inconnu - Lettres (1901.. (7)
Je crois que l'on devrait aller vivre seul au fond de la mer avec ses mots.
J'arrive à un âge où on reste assis des heures, les yeux fixés sur le feu, à se dire "J'ai tellement de choses à faire ; je n'arrête pas ; je serais bien en peine de trouver un mot à jeter à un chien ", et c'est ainsi que je ne fais rien.
[...] que toutes les activités intellectuelles soient encouragées afin qu'il existe toujours un noyau de femmes capables de penser, d'inventer, d'imaginer, de créer aussi librement que les hommes, sans peur du ridicule ni de la condescendance. La mise en place de telles conditions- à mes yeux capitale - est entravée par les déclarations d'un "Faucon Aimable" ou d'un Mr Bennett - il se trouve qu'à l'heure actuelle, un homme a toujours plus de facilités qu'une femme pour faire connaître et respecter ses opinions. En tout état de cause, je ne doute pas que, si de telles idées continuent de prévaloir dans l'avenir, nous soyons condamnés à demeurer dans un état de barbarie à demi civilisée. C'est du moins ainsi que je définirais la domination d'un côté, la servilité de l'autre, qui sévissent depuis des temps immémoriaux. La dégradation de l'esclave n'a d'égal que celle de son maître.
Voici une carte qui nous annonce que vous êtes au Maroc, avec des chameaux qui avancent péniblement dans les dunes ; pendant ce temps, ma lettre commence à s'évaporer. Elle finira par se perdre sur la table de votre chambre, au milieu d'un monceau de feuilles de papier ministre, et jamais vous ne la trouverez. Peut-être épouserez vous, comme vous le dites, une dame voilée, et vivrez-vous au milieu des palmiers comme un sultan jusqu'à la fin de vos jours.
"Est-il jamais possible de connaître quelqu'un - autrement que par la version que nous en avons et qui n'est, vraisemblablement, qu'une émanation de nous-même ?"
"[...]or les masques - précisément parce que je suis écrivain - me pèsent. [...] je veux former des mots à la crête des vagues de mon esprit [...]."
"Je veux dire que la vie, il faut d'abord la perdre, la subir, la rejeter, pour pouvoir ensuite l'accepter avec transport sur de nouvelles bases, sans jamais s'arrêter jusqu'à 40 ans, car alors, le seul problème est bien de savoir comment la saisir et la retenir, tant elle semble vouloir finir, tant elle apparaît infiniment désirable."