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Critique de kielosa


L'auteure explique dans une préface que son ouvrage "Le retour des déportés" n'est pas une oeuvre historique, ce qui est assez surprenant venant d'une excellente historienne de qui j'ai lu, il y a bien longtemps, probablement la meilleure biographie de "Catherine II" (ou la Grande, 1729-1796), impératrice de toutes les Russies et, en plus, un livre dans lequel le thème central est la découverte de l'horreur nazie dans toute sa colossale ampleur, après la défaite de ce régime diabolique à la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Olga Wormser-Migot aborde ce thème comme un témoignage personnel, car au moment de la libération de Paris, en août 1944, elle a été recrutée par Henri Frenay, ministre des Prisonniers, Déportés et Réfugiés, dans son nouvellement créé département. Avec 2 collègues elle était chargée de dresser un fichier complet de ces catégories de personnes, à partir de virtuellement rien (sauf les listes incomplètes de la Croix-Rouge). Une tâche énorme qu'elle a qualifiée de "douloureuse et passionnante". Ainsi, cette jeune dame était supposée trouver les informations là où elles se trouvaient. Entre autres dans les camps nazis de la mort ! C'est sûrement au chaos qui régnait outre-Rhin en cette période qu'elle a cru qu'il n'y avait pas de chambres à gaz dans les camps à l'intérieur du Reich. Une erreur regrettable, qui ne devrait pourtant pas la mettre en question comme historienne, tant à titre d'écrivaine que conseillère. Ce qui fut le cas notamment avec le film "Nuit et Brouillard " d'Alain Resnais en 1956.
Elle est décédée à Fontenay-en-Parisis, dans le Val-d'Oise, en 2002, à l'âge de 90 ans.

Elle était née à Nancy en 1912 de parents russes et juifs (les Jongelson) et a eu une soeur romancière et journaliste, Hélène Parmelin (1915-1998), grande amie de Pablo Picasso et auteure d'une oeuvre réputée "Le massacre des innocents : L'art et la guerre", de 1954.

La période couverte par l'ouvrage d'Olga Wormser-Migot est de 9 mois : de septembre 1944 à mai 1945, qu'elle a tenté de recréer au jour le jour. Après une introduction et un chapitre sur le système concentrationnaire nazi relativement développé, elle subdivise son oeuvre en 4 parties, intitulées d'après les saisons, de cette période.

J'ai surtout trouvé la première partie "Été" intéressant. Tandis que des combats acharnés faisaient rage un peu partout en Europe, dans l'îlot de paix relative d'un Paris libéré, notre Olga passa, à partir du 12 septembre, un temps fou dans les anciens locaux du quartier général de la Gestapo, 84 Avenue Foch, à éplucher les dossiers des Boches et à rédiger des fiches de disparus en France. Encore le 1er septembre, les Chleuhs avaient vidé la prison de Loos-lès-Lille et envoyé 1250 détenus vers l'est, d'où seulement 130 reviendront....plus tard et cela n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.

Une petite anecdote littéraire si on veut. En août 1944, les Alliés bombardèrent le camp de Buchenwald, construit autour du chêne "qui avait abrité les songeries de Goethe" : pour les SS un très mauvais signe, annonciateur de désastre ; pour certains prisonniers survivants, comme le Français Pierre P. , une occasion de sculpter de petites statuettes, comme souvenirs, dans le bois du chêne sacro-saint de Goethe.

Ils furent près de 200.000, hommes, femmes et enfants, arrachés de France qui souffrirent dans les camps teutoniques. Seulement 36.000 ont été sauvés et sont rentrés chez eux.

En fait, l'ouvrage se lit comme le script d'un film : parsemé de très mauvaises nouvelles, toujours les horreurs nazies à la libération des camps de concentration et la découverte des fosses communes et des champs de cendres ; et de temps en temps de quelques bonnes, comme le visiteur qui vient raconter à Olga, le 21 septembre, que sa soeur déportée vient d'être retrouvée vivante à Aix-la-Chapelle. Et puis, il y a toutes sortes de rumeurs et de spéculations qui lui parviennent dans son bureau concernant le sort de célébrités tels Jean Giraudoux, Montherlant, Brasillach, Malraux, Antoine de Saint-Exupéry....

À mon avis, tout l'intérêt de cet ouvrage d'Olga Wormser-Migot est là : on a l'impression comme lecteur de "vivre" l'histoire !


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