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Critique de CaroGalmard


Je confesse que le confinement m'a laissé des séquelles. La plus importante, c'est cette envie de liberté, de ne plus avoir de périmètre ni d'horaire de sortie. Alors je marche, je vis dehors, je fais du vélo. Je recherche l'immensité au bout de la rue, la vue dégagée sur la mer, les sommets ou du vert. Et bien entendu, je lis des livres de marcheurs, d'ermites, de road trips. Des livres sur le choix d'être où on veut. Alors quand j'ai vu sur Facebook (parce que parfois un réseau social ça a du bon), la photo d'une lectrice tant absorbée par sa lecture de ce roman lors d'un voyage en train, tentée de louper son arrêt, voire de tirer sur le signal d'alarme pour prolonger le moment, je n'ai pas hésité.
Je viens de le refermer et comme son auteur, je suis un peu triste que le voyage soit déjà fini. J'ai vraiment passé un moment délicieux. Les pages ont fait résonné en moi une multitude de cordes sensibles. J'aurais bien aimé que l'auteur puisse rencontrer ma grand-mère. Elle était de ces croyants qui vivent leur foi au quotidien, par une multitude de petits gestes vers l'autre, sans en faire de publicité. Au contraire de certains donneurs de leçon qui vivent sans générosité, mais font un pèlerinage annuel qui devrait racheter leurs fautes des 12 derniers mois. Elle était joyeuse, blagueuse, marcheuse. Parfois elle partait en retraite. Elle m'a légué j'espère son naturel joyeux, un peu de sa gentillesse et surtout son goût pour la marche. Enfant, elle m'emmenait à l'église et je chantais à tue-tête. Elle ne me l'a jamais interdit ; on s'asseyait juste vers fond pour ne pas déranger les autres. En revanche, la foi n'étant pas génétique, je suis passée à côté. Peut-être pas toujours convaincue par les discours parfois un peu poussiéreux et austères de certains catholiques. Il reste que j'aime les églises et l'épaisseur de leurs silences. Cette odeur particulière de cire, d'encens, de poussière et de pierre froide. J'aime aussi entrer dans un lieu de culte d'une autre religion. Où la densité de silence s'intensifie de mystère, d'inconnu. J'aime le recueillement. Je regrette le manque de spiritualité de notre vie actuelle. Alors je lis. Alors je marche.
J'aime aussi l'idée que l'autre est bon. Qu'on n'est pas tous méchant. Je me dis que si l'on met de la bonté dans sa vie, elle va finir par déteindre sur les autres et se multiplier. Alors cette marche , au rythme de la générosité des bonnes âmes, a été une bouffée de fraicheur, d'espérance. La connaissance de pas mal de coins auvergnats a ajouté à mon enchantement. Je salue le courage des deux compagnons. Je l'avoue, je n'oserais pas. Trop habituée à prévoir, j'ai besoin d'avoir un chemin et un planning, même flou. Mais j'aspire à me défaire de ces marottes qui peuvent devenir des tares. Et ce récit donne des bouffées d'allègement. Des envies de se débarrasser du trop. Trop de choses, trop de mails, trop de bruit, trop de réseaux sociaux. Bon, on garde babelio quand même.
Ce qui est appréciable, dans ce récit, c'est la candeur et la franchise de l'auteur à dire que non, ce n'est pas évident. Avec son compagnon de route ils ont mal aux pieds, ils tâtonnent à trouver la façon de demander à manger ou un toit pour la nuit, ils s'agacent, ils cherchent des toilettes, ils avouent leur foi chancelante, ils s'émerveillent des paysages et de la générosité qui se cache derrière des portes ou des visages inattendus.
Et on se pose fatalement la question : et moi, est-ce que j'ouvrirais ma porte à des vagabonds ?
C'est également en filigrane, une étonnante double biographie de Arthur Rimbaud et Charles de Foucauld . Comme je connaissais un peu le premier (peu versée dans la poésie) et très peu le second (encore moins versée dans la vie des saints), ce fut aussi l'occasion d'enrichir ma culture générale.
Je suis juste navrée pour Charles Wright qu'il ait du traverser cette zone en n'aimant pas le fromage. C'est un…sacrilège.

Alors, faut-il le lire ? Oui. Ce livre est une lumière, un sourire. Pas de panique si vous n'êtes pas de la partie (catholique) : ce n'est pas non plus un récit qui tente de convaincre les incroyants. Même si ce roman a du forcément et à juste titre passer en bonne place dans les conseils de lecture de Pèlerin magazine, il est tout public. Humain.

Message pour l'auteur : moi non plus je n'ai pas encore réussi à voir celui qui peint les petits traits rouges et blancs sur les GR.
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