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Critique de HundredDreams


Après l'inoubliable lecture de « Les jours, les mois, les années » de Lianke Yan, j'ai eu envie de prolonger mon séjour dans la littérature chinoise et j'ai choisi de lire ce petit roman présent dans ma bibliothèque depuis quelques temps déjà. Cette histoire, racontée simplement par Xinran, est un mélange de genres, entre le carnet de voyage, le journal intime, le roman d'aventure et le récit de survie.

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Le titre « Les funérailles célestes » fait référence à une tradition tibétaine selon laquelle le cadavre du défunt, qui n'est qu'une enveloppe, est offert aux vautours au cours d'un rite funéraire très précis.
Le corps retourne à la nature et l'esprit se réincarne dans une nouvelle existence.
J'avais déjà entendu parlé de cet enterrement dans le ciel qui peut paraître choquant pour nous occidentaux mais qui pour les Tibétains, marque le respect dû au corps du défunt.

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En 1994, Xinran, alors journaliste, reçoit un appel téléphonique lui demandant de rencontrer Shu Wen, une chinoise qui a vécu pendant près de trente ans au Tibet.
Ce roman raconte l'incroyable destin d'une femme audacieuse et courageuse, mais c'est aussi le très beau portrait d'un pays, le Tibet.

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« AVIS DE DÉCÈS
Cet avis certifie que le camarade Wang Kejun est mort dans un incident survenu à l'est du Tibet le 24 mars 1958, à l'âge de 29 ans.
Bureau militaire de Suzhou, Province de Jiangsu, 2 juin 1958. »

Refusant d'accepter le décès de son mari alors médecin dans l'un des régiments envoyés pour l'unification du Tibet avec la Chine, Wen également médecin, plus précisément dermatologue, décide de s'engager dans l'armée pour traverser la frontière, dans l'espoir de retrouver l'homme qu'elle aime.

« Les larmes aux yeux, Wen a tendu à sa mère son certificat de mariage. Seule une mère pouvait garder quelque chose d'aussi important. Elle a donné à son père la tasse à thé et la serviette de toilette de Kejun, sachant à quel point il aimait son gendre. Puis elle a remis à sa soeur, qui était au courant de tous ses secrets, un paquet contenant la correspondance, les papiers d'identité de Kejun et leurs lettres d'amour. »

Sa quête va l'amener à parcourir les étendues sauvages du Tibet, à vivre au contact des nomades dans les régions les plus reculées du Tibet.
Xinran parle succinctement de politique et du conflit qui a opposé les deux pays. Elle s'attache davantage à l'histoire de Wen qui va lentement s'adapter à un nouveau mode de vie jusqu'à adopter la façon de vivre et les croyances religieuses des Tibétains.

« Tout comme on lit les livres mot à mot, les chemins sont parcourus pas à pas. »

L'auteure a construit de très beaux personnages féminins. A chaque rencontre, nous recueillons de petites histoires individuelles, l'occasion d'avoir un aperçu sur leur mode de vie nomade lié aux cycles de la nature et fortement imprégné de spiritualité.

« Je sens de plus en plus que la foi imprègne tout au Tibet, a-t-elle dit. Ici, les gens se remettent entièrement entre les mains du ciel et de la nature. Même les montagnes, les fleuves et les plantes parlent de la foi. »

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Mon intérêt pour ce roman s'est essentiellement porté sur la découverte du Tibet et de sa culture.
La simplicité de l'écriture ne fait que renforcer la beauté intemporelle de la plaine désertique du Qinghai. Les paysages sont grandioses, majestueux, désolés. J'ai ressenti le silence environnant, le soleil brûlant des hauts plateaux, le souffle du vent, la froidure intense de l'hiver, l'immensité vide des espaces, le mal des montagnes.

« Un instant, c'était comme une chaude journée de printemps avec des fleurs, et l'instant d'après des flocons de neige virevoltaient autour d'eux. Elle avait l'impression de se trouver dans un pays féerique où en un seul jour se succédaient des milliers d'années. »

J'ai été fascinée par leurs traditions, leurs coutumes obéissant à la sagesse des anciens, leurs légendes, leur religion, leurs rituels et leur langue plus corporelle que verbale.
J'ai aimé leur vie simple, libre, silencieuse et digne, et j'ai eu envie de voyager dans ces vastes étendues désertiques et sauvages, de mener une vie moins stressante, de vivre plus simplement.

« Elle en venait petit à petit à comprendre que le Tibet tout entier était un grand monastère. Tous ses habitants étaient inspirés par le même esprit religieux, qu'ils portent ou non des robes de moines. »

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Xinran signe un roman fascinant, mêlant adroitement la petite et la grande histoire.
« Les funérailles célestes » est une belle histoire humaine et une ode à l'amour, à la vie. Mais c'est aussi une histoire de survie, d'hospitalité, de détermination et de perte.
A découvrir.
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