Vous ne connaissez pas encore la littérature asiatique ? Pas de soucis... Notre libraire Gérard Collard vous propose une sélection de livres pour tous les goûts...
La papeterie Tsubaki de Ito Ogawa et Myriam Dartois-Ako aux éditions Picqier Poche
https://www.lagriffenoire.com/1084067-poche-la-papeterie-tsubaki.html
le restaurant de l'amour retrouvé de Ito Ogawa et Myriam Dartois-Ako aux éditions Picquier Poche
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L'Ecole des Chats : Tome 1, le Secret de la Grotte de Cristal ; Tome 2, le Cadeau magique ; Tome 3, La prophétie se réalise de Jin-kyeong Kim aux éditions Picquier Jeunesse
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Les Délices de Tokyo - Prix des Lecteurs 2017 de Durian Sukegawa aux éditions Livre de Poche
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le crépuscule de Shigezo de Sawako Ariyoshi et Jean-Christian Bouvier aux éditions Folio
https://www.lagriffenoire.com/1056579-litterature-asiatique-le-crepuscule-de-shigezo.html
le miroir des courtisanes de Sawako Ariyoshi aux éditions Picquier Poche
https://www.lagriffenoire.com/1071028-litterature-asiatique-le-miroir-des-courtisanes.html
Un moment à Pékin, Tome 1 : Enfances chinoises de Yutang Lin et François Fosca aux éditions Picquier Poche
https://www.lagriffenoire.com/1078926-litterature-asiatique-un-moment-a-pekin---enfances-chinoises.html
Un moment à Pékin (T02) : le triomphe de la vie de Yutang Lin, François Fosca aux éditions Picquier Poche
https://www.lagriffenoire.com/1078925-litterature-asiatique-un-moment-a-pekin-2---le-triomphe-de-la-vie.html
le Rêve du Village des Ding de Lianke Yan et Claude Payen aux éditions Picquier Poche
https://www.lagriffenoire.com/?fond=produit&id_produit=20581&id_rubrique=21
La Concession française de Xiao Bai et Emmanuelle Pechenart aux éditions Picquier Poche
https://www.lagriffenoire.com/?fond=produit&id_produit=143608&id_rubrique=25
Pénis d'orteil de Rieko Matsuura et Jean-Armand Campignon aux éditions Picquier Poche
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Souvent, c’est sous forme de roman qu’il faut exprimer la réalité car, parfois, ce n’est qu’en empruntant la passerelle de la fiction que la réalité peut pénétrer dans le monde tangible.
Souvent, les détails n'ajoutent à l'histoire ni force ni grandeur. Peut-être même, parfois, en les omettant, lui donne-t-on plus de force et d'authenticité tout en lui permettant de mieux se développer et se transformer.

L’aïeul allait uriner.
A la suite de l’homme, le chien se soulagea lui aussi.
Depuis quinze jours, c’était la première chose qu’ils faisaient après s’être réveillés, ils allaient uriner sur ce champ en pente, à quelque quatre kilomètres du village. Sur ce versant ensoleillé, il y avait un pied de maïs que l’aïeul avait planté. Uniquement ce pied, pâlissant au fur et à mesure des jours de sécheresse, uniquement ce pied qui dispensait un peu d’humidité alentour, dans l’air en combustion. L’urine, c’était de l’engrais. Il y a de l’eau dans l’urine. L’eau dont le maïs manquait se trouvait là, dans l’urine qu’ils avaient accumulée, lui et son chien, au cours de la nuit. L’aïeul pensait que probablement, durant la nuit, dans un bruissement, la plante avait encore poussé d’un index, qu’une cinquième feuille était apparue. Une timide sensation veloutée gagna son cœur, puis prit de l’ampleur pour envahir toute sa poitrine ; son visage rosissait. Les feuilles de maïs ne poussent qu’une par une, pensait-il, alors que celles des ormes, des sophoras, des cèdres, poussent deux par deux, pourquoi ?
Qu’en dis-tu, l’aveugle ? Il se tourna vers le chien pour lui poser la question. Pourquoi les arbres et les cultures sur pied ne poussent-ils pas de la même façon ?

L’aïeul interrogea le chien. Il dit, l’aveugle, quand tu étais jeune, combien de chiennes as-tu connues ?
Le chien le regardait sans comprendre.
Il dit, dis la vérité, l’aveugle, il n’y a personne d’autre que toi et moi ici, tout est tranquille.
Le chien continuait à le regarder sans comprendre.
Tu ne veux pas parler, tant pis. L’homme poussa un soupir. Un peu déprimé, il alluma sa pipe. Face à l’obscurité, il dit, comme c’est bon d’être jeune, d’avoir un corps fort et une femme la nuit. Si la femme est intelligente, au retour du champ, elle t’apporte de l’eau, et si ton visage est en sueur, elle te passe un éventail. Les jours de neige, elle te chauffe le lit. Si durant la nuit vous vous êtes retrouvés, et que tu te lèves tôt le matin pour aller au champ, elle te dit de te reposer encore un moment. Vivre de cette façon, il inspira énergiquement une bouffée de sa pipe, puis expira longuement, caressa le chien et poursuivit, vivre de cette façon, c’est vivre comme les immortels.
Il demanda, tu as eu ce genre de vie toi, l’aveugle ?
Le chien demeura silencieux.
Il dit, qu’en dis-tu, l’aveugle, est-ce que ce n’est pas pour ce genre de vie que les hommes viennent au monde ?

Il avait toujours tout cultivé avec succès, blé, haricots, sorgho, sa production avait toujours été la meilleure du village. Sur la chaîne montagneuse, aucun paysan ne pouvait rivaliser d’adresse avec lui. Debout devant la culture, ses lèvres étaient devenues aussi arides que la terre environnante, il ne but pourtant pas, ne puisa pas non plus de quoi remplir un demi-bol pour le chien. Il ne savait pas où il pourrait trouver des excréments humains. Les latrines du village étaient toutes sèches et pulvérulentes, ce qu’il restait d’excrément avait déjà brûlé comme du bon bois. Cela faisait plusieurs jours que le chien et lui-même n’éprouvaient plus le besoin d’aller à la selle, leurs corps avaient absorbé tout ce qu’ils avaient pu ingurgiter sans rien vouloir rejeter. L’aïeul songea aux lambeaux de peau du dernier rat dont ils s’étaient nourris, il descendit dans le ravin pour en chercher, mais en vain. Il devina que l’aveugle avait tout mangé durant son déplacement à la source. Il gravit la pente, suffoquant, voulut interroger le chien, mais ne fit que se tenir face à lui un moment, silencieusement, avant d’aller puiser dans la marmite un bol de l’eau dans laquelle avait cuit le rat, de l’eau avec quelques gouttes d’huile. Ensuite, il ne referma pas le couvercle, il se tourna pour dire au chien, bois si tu as faim ou soif. Enfin, prenant le sac à provisions, il prit la direction du village. Il allait chercher de l’engrais.
Il ne comprenait pas comment il pouvait s’ennuyer lorsqu’il était couché avec sa femme. Avec elle, il avait l’impression d’être un éléphant coincé dans un puits, privé de sa liberté de mouvement. Faire l’amour revenait à semer des melons pour récolter des haricots, des haricots desséchés de surcroît, ou à semer des haricots pour récolter des graines de sésame qui ne contenaient pas d’huile.
La belle peau blanche de Liu Lian l'attirait comme un plat de pâtes attire le mendiant affamé et l'ovale de son beau visage rose, tel un melon mûr à point, appelait sa gorge brûlante et ses mains desséchées.
Cette année-là, la sécheresse semblait ne jamais devoir finir, le temps lui-même paraissait avoir été réduit en cendres et le charbon des jours se consumait dans nos mains. Le soleil brillait en grappes infinies au-dessus de nos têtes. Dès le matin, et jusqu'au soir, l'aieul respirait l'odeur de ses cheveux roussis. Quelquefois, il tendait la main dans le vide. Il pouvait alors sentir l'odeur de ses ongles cramoisis. Journée de merde! Il jurait ainsi tout le temps, quittant le village dépeuplé, foulant un abîme de silence, les yeux mi-clos, un regard jeté de biais vers le soleil, il disait, viens l'aveugle, partons. Le chien suivait, guidé par le bruit du pas alourdi par les ans, et deux ombres quittaient le village.
(Incipit)
Wu Dawang était considéré par tout le régiment comme l’étudiant modèle. Il avait donc parfaitement assimilé la pensée politique qu’on lui avait enseignée et comprenait mieux que quiconque le sens profond de la pancarte. Les cinq étoiles symbolisaient la révolution. Le fusil et la gourde représentaient le combat et l’histoire, le long et difficile processus révolutionnaire. Quant aux gerbes de blé, elles préfiguraient la prospérité et le bonheur futur, les années de félicité qui suivraient l’avènement du communisme.

L'aïeul allait uriner. À la suite de l'homme, le chien se soulagea lui aussi.
Depuis quinze jours, c'était la première chose qu'ils faisaient après s'être réveillés, ils allaient uriner sur ce champ en pente, à quelques kilomètres du village. Sur ce versant ensoleillé, il y avait un pied de maïs que l'aïeul avait planté. Uniquement ce pied, pâlissant au fur et à mesure des jours de sécheresse, uniquement ce pied qui dispensait un peu d'humidité alentour, dans l'air en combustion.L'urine, c'est de l'engrais. Il y a de l'eau dans l'urine. L'eau dont le maïs manquait se trouvait là, dans l'urine qu'ils avaient accumulée, lui et son chien, au cours de la nuit. L'aïeul pensait que probablement, durant la nuit, dans un bruissement, la plante avait encore poussé d'un index, qu'une cinquième feuille était apparue. Une timide sensation veloutée gagna son cœur, puis prit de l'ampleur pour envahir toute sa poitrine (...). Les feuilles de maïs ne poussent qu'une par une, pensait-il, alors que celles des ormes, des sophoras, des cèdres, poussent deux par deux, pourquoi ?
Qu'en dis-tu l'aveugle? Il se tourna vers le chien pour lui poser la question. Pourquoi les arbres et les cultures sur pied ne poussent-ils pas de la même façon?