Citations sur Mise à feu (44)
- Bonne nuit, Gaspard.
- Bonne nuit, Nine.
- Fais de beaux rêves, passe une bonne nuit.
- Toi aussi.
- Je t’aime.
- Moi aussi.
Toutes les nuits, les mêmes mots, dans le même ordre, avec les mêmes inflexions de voix, comme pour en faire une mélodie. Par pudeur, ou pour en retirer un peu le poids. Mon frère. Mon phare. Mon feu à moi.
Alors, le souvenir remonta en moi, comme une bulle longtemps maintenue dans les profondeurs de la mémoire, et qui un jour éclate à la surface, car aussi attentif soit-on à garder dans le noir des souvenirs que l’on voudrait voir disparaître, c’est le destin des bulles que de remonter vers le ciel.
Le veilleur qu’il était, ange discret qui anticipait chaque mouvement pour prévenir les accidents, ne pouvait supporter l’idée d’avoir failli à son poste de garde.
Ses yeux s’ensauvagèrent. Nos larmes naissaient parfois d’une source commune, boussole intérieure qui même à distance modifiait l’état de l’autre.
Ces lettres, je les restitue aujourd’hui. Elles portent les traces de ma mémoire, comme ces contes épiques appris par cœur, mot pour mot, puis transmis oralement dans les villages, et dont les légères transformations au fil des siècles sont un témoin de la façon dont l’inconscient collectif modifie ses propres mythes. C’est longtemps après que j’apprendrais que les orateurs, pour se souvenir intégralement des quelques milliers de pages de l’Iliade et l’Odyssée et pour les transmettre sur les places publiques, imaginaient entrer dans un lieu familier, leur maison d’enfance par exemple, et plaçaient une partie du texte dans chaque objet, inventant un parcours logique pour voyager dans la maison et récupérer les morceaux de leur histoire.
je me surpris à penser que la musique était l'un des langages de la magie. Un spell offert par les dieux pour faire l'expérience, dans nos chairs, que d'autres façons de vivre, de se mouvoir, d'écouter, d'être émus, de faire monde, sont possibles.
Il voudrait prendre les coups pour ceux qu'il aime mais la violence s'abat parfois sans qu'on la voie venir. Elle est là, comme ces rapaces à l'arrêt au-dessus de leur proies. Gaspard a beau avoir une intuition hors du commun, il arrive que la violence fonde sur nous avant qu'il ait pu la deviner. ça le ronge, cette sauvagerie du hasard, ou du destin, selon le nom qu'on donne aux oiseaux de proie.
Je laissais faire, et passais mes doigts sur le fil des pages arrachées, comme sur des cicatrices, en me répétant que les carnets étaient comme la mémoire, on en occultait certaines bribes, cela faisait partie de la vie, l'oubli.
Ses yeux s'embuèrent et les miens, immédiatement, répondirent à l'appel. Les larmes tombaient de ses paupières et dévalaient mon visage en écho.
Avant les six ans, c’est le soleil.
Quelque chose de pur, de frais, de vivant.
Gaspard, l’Amazone, Nouchka et moi. Unis.
Jusqu’à l’incendie.
Avant mes six ans, c'était le soleil.
Quelque chose de pur, de frais de vivant.
Gaspard, l'Amazone, Nouchka et moi. Unis.
Jusqu'à l'incendie. (Incipit)