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Citations sur Le vrai classique du vide parfait (28)

Un homme perdit sa hache. Il soupçonna le fils du voisin et se mit à l'observer. Son allure était celle d'un voleur de hache; l'expression de son visage était celle d'un voleur de hache; sa façon de parler était tout à fait celle d'un voleur de hache. Tous ses mouvements, tout son être exprimaient distinctement le voleur de hache. Or, il arriva que l'homme qui avait perdu la hache, en creusant par hasard la terre dans la vallée, mit la main sur cet outil. Le lendemain, il regarda derechef le fils du voisin. Tous ses mouvements, tout son être n'avaient plus rien d'un voleur de hache.
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L'homme parfait est comme mort. Il ignore pourquoi il se meut et pourquoi il ne bougerait pas. Sous le regard des hommes, il ne change pas son comportement extérieur. Il ne change pas davantage ce comportement quand il est à l'abri du regard d'autrui. Solitaire, il s'en va et il vient ; solitaire, il sort et il rentre. Qui peut s'opposer à ses démarches ?
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le coq de combat
Ki Siao-tseu dressait un coq de combat pour le roi Siuan de Tcheou. Dix jours (après le début du dressage), le roi s'enquit : "le coq est-il déjà bon pour le combat ?" L'autre répondit : "Pas encore, il est vaniteux et suffisant."
Dix jours se passèrent, le roi réitéra sa demande. L'autre dit encore : "Pas encore, il réagit à chaque ombre, à chaque bruit." Dix jours plus tard, le roi s'enquit de nouveau. "Toujours rien", lui fut-il répondu. "Il a encore le regard trop irrité et un air triomphateur." Enfin, après dix autres jours, comme la demande se renouvelait (Ki Siao-tseu) déclara : "Il y est presque ! Quand d'autres coqs chantent, cela ne fait aucune impression sur lui. En le regardant, on croirait voir un coq en bois. Sa force intérieure (Te) est parfaite."
Les autres coqs n'osaient s'approcher de lui ; (au contraire), ils se détournaient et s'en allaient.
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Quatre espèces d'hommes se mêlent dans le monde : les rusés et les simples, les circonspects et les agités. Tous suivent leur manière d'être jusqu'à la fin de leur vie sans se comprendre. Et chacun estime qu'il atteint la plus profonde sagesse.
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La Voie de l'univers est tantôt Yin tantôt Yang. Le système des avisés est tantôt justice tantôt humanité. La nature d'un être est tantôt dureté tantôt mollesse. C'est ainsi que chacun suit sa nature, sans échappatoire.

(...) Liezi (Lie Tseu) mangeait au bord d'une route au cours d'un voyage au Wei lorsqu'il vit un crâne de cent ans. Il arracha une vergerette qu'il pointa vers le crâne, se tourna vers son disciple Bofeng et dit : " Qui, à part lui et moi, sait qu'il n'est pas mort et n'est jamais né ? Ce savoir est-il par-delà le bonheur et le malheur ?
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Celui qui désire voir les choses extraordinaires doit observer les choses que les autres ne daignent même pas regarder. Celui qui désire atteindre l'inaccessible doit pratiquer ce que les autres négligent. Que celui qui s'exerce dans la contemplation regarde d'abord un char à foin. Que celui qui s'exerce à écouter soit attentif d'abord aux sons des cloches. Ce qui est facile à réaliser intérieurement n'est pas difficile à réaliser au-dehors.
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Il existe un engendreur inengendré, un transformeur intransformé. L'inengendré peut engendrer, l'intransformé peut transformer. L'engendré ne peut pas ne pas engendrer, le transformé ne peut pas ne pas transformer. D'où générations et transformations perpétuelles et omniprésentes, le Yin et le Yang, les saisons. Il semble que l'inengendré soit unique, que sa Voie soit inobstruable, que l'intransformé aille et vienne, sans limites.
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Ki Siao-tseu dressait un coq de combat pour le roi Siuan de Tcheou. Dix jours (après le début du dressage), le roi s'enquit : "le coq est-il déjà bon pour le combat ?" L'autre répondit : "Pas encore, il est vaniteux et suffisant."

Dix jours se passèrent, le roi réitéra sa demande. L'autre dit encore : "Pas encore, il réagit à chaque ombre, à chaque bruit." Dix jours plus tard, le roi s'enquit de nouveau. "Toujours rien", lui fut-il répondu. "Il a encore le regard trop irrité et un air triomphateur." Enfin, après dix autres jours, comme la demande se renouvelait (Ki Siao-tseu) déclara : "Il y est presque ! Quand d'autres coqs chantent, cela ne fait aucune impression sur lui. En le regardant, on croirait voir un coq en bois. Sa force intérieure (Te) est parfaite."

Les autres coqs n'osaient s'approcher de lui ; (au contraire), ils se détournaient et s'en allaient.
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L. Le prince Meou de Tchoung-chan était la forte tête de Wei. Il aimait à s’entretenir avec les habiles gens, s’occupait peu d’administration, et avait une affection déclarée pour Koungsounn-loung le sophiste de Tchao. Ce faible fit rire le maître de musique Tzeu-u. Meou lui demanda : Pourquoi riez-vous de mon affection pour Koungsounn-loung ? ... Tzeu-u dit : Cet homme-là ne reconnaît pas de maître, n’est l’ami de personne, rejette tous les principes reçus, combat toutes les écoles existantes, n’aime que les idées singulières, et ne tient que des discours étranges. Tout ce qu’il se propose, c’est d’embrouiller les gens et de les mettre à quia. A peu près comme jadis Han-Van (sophiste inconnu) et consorts. — Mécontent, le prince Heou dit : N’exagérez-vous pas ? tenez-vous dans les bornes de la vérité. — Tzeu-u reprit : Jugez vous-même. Voici ce que Koungsounn-loung dit à K’oungtch’oan : Un bon archer, lui dit-il, doit pouvoir tirer coup sur coup, si vite et si juste, que la pointe de chaque flèche suivante s’enfonçant dans la queue de la précédente, les flèches enfilées forment une ligne allant depuis la corde de l’arc jusqu’au but. ... Comme K’oung-tch’oan s’étonnait ; oh ! dit Koungsounn-loung, Houng-tch’ao, l’élève de P’eng-mong, a fait mieux que cela. Voulant faire peur à sa femme qui l’avait fâché, il banda son meilleur arc et décocha sa meilleure flèche si juste, qu’elle rasa ses pupilles sans la faire cligner des yeux, et tomba à terre sans soulever la poussière. Sont-ce là des propos d’un homme raisonnable ? — Le prince Meou dit : Parfois les propos des Sages, ne sont pas compris des sots. Tout ceux que vous venez de citer, peuvent s’expliquer raisonnablement. — Vous avez été l’élève de Koungsounn-loung, dit Tzeu-u, voilà pourquoi vous croyez devoir le blanchir. Moi qui n’ai pas vos raisons, je continuerai à le noircir. Voici quelques échantillons des paradoxes qu’il développa en présence du roi de Wei : On peut penser sans intention ; on peut toucher sans atteindre ; ce qui est, ne peut pas finir ; une ombre ne peut pas se mouvoir ; un cheveu peut supporter trente mille livres ; un cheval n’est pas un cheval ; un veau orphelin peut avoir une mère ; et autres balivernes. — Le prince Meou dit : C’est peut-être vous qui ne comprenez pas ces paroles profondes[6]. Penser sans intention, peut s’entendre de la concentration de l’esprit uni au Principe ; toucher sans atteindre, s’entend du contact universel préexistant ; que ce qui est ne peut finir, qu’une ombre ne peut se mouvoir, sont des titres pour introduire la discussion des notions de changement et de mouvement ; qu’un cheveu supporte trente mille livres, sert à introduire la question de ce que sont le continu et la pesanteur ; qu’un cheval blanc n’est pas un cheval, appelle la discussion de l’identité ou de la différence de la substance et des accidents ; un veau orphelin peut avoir une mère, s’il n’est pas orphelin ; etc. — Vous avez, dit Tzeu-u, appris à siffler la note unique de Koungsounn-loung. Il faudra que d’autres vous apprennent à vous servir des autres trous de votre flûte intellectuelle. Sous le coup de cette impertinence, le prince se tut d’abord. Quand il se fut ressaisi, il congédia Tzeu-u en lui disant : Attendez, pour reparaître devant moi, que je vous y invite.

M. Après cinquante ans de règne, Yao voulut savoir si son gouvernement avait eu d’heureux effets, et si le peuple en était content. Il interrogea donc ses conseillers ordinaires, ceux de la capitale et ceux du dehors ; mais aucun ne put lui donner de réponse positive. Alors Yao se déguisa, et alla flâner dans les carrefours. Là il entendit un garçon fredonner ce refrain : Dans la multitude du peuple, plus de méchants, tout est au mieux. Sans qu’on le leur dise, sans qu’ils s’en rendent compte, tous se conforment aux lois de l’empereur. — Plein de joie, Yao demanda au garçon, qui lui avait appris ce refrain ? ... Le maître, dit-il. — Yao demanda au maître, qui avait composé ce refrain ? ... Il vient des anciens, dit le maître. — (Heureux de ce que son règne avait conservé le statu quo antique, de ce que son gouvernement avait été si peu actif que les gouvernés ne s’en étaient même pas aperçu), Yao s’empressa d’abdiquer et de céder son trône à Chounn, (de peur de ternir sa gloire avant sa mort).

N. Koan-yinn-hi (Koan-yinn-tzeu) dit : A qui demeure dans son néant (de forme intérieur, état indéterminé), tous les êtres se manifestent. Il est sensible à leur impression comme une eau tranquille ; il les reflète comme un miroir ; il les répète comme un écho. Uni au Principe, il est en harmonie par lui, avec tous les êtres. Uni au Principe, il connaît tout par les raisons générales supérieures, et n’use plus, par suite, de ses divers sens, pour connaître en particulier et en détail. La vraie raison des choses est invisible, insaisissable, indéfinissable, indéterminable. Seul l’esprit rétabli dans l’état de simplicité naturelle parfaite, peut l’entrevoir confusément dans la contemplation profonde. Après cette révélation, ne plus rien vouloir et ne plus rien faire, voilà la vraie science et le vrai talent. Que voudrait encore, que ferait encore, celui à qui a été révélé le néant de tout vouloir et de tout agir. Se bornât-il à ramasser une motte de terre, à mettre en tas de la poussière, quoique ce ne soit pas là proprement faire quelque chose, il aurait cependant manqué aux principes, car il aurait agi.

Connaissance taoïste parfaite ; consonance de deux instruments accordés sur le même ton, le cosmos et l’in­dividu, perçue par le sens intime, le sens global.
Sourire d’approbation. Lui aussi étant devenu taoïste, il n’avait rien à dire, dit la glose.
Fiction, dit la glose. Confucius fait la leçon au ministre, en louant des Sages imaginaires, de faire tout le contraire de ce qu’il faisait. Il ne faut pas vouloir tirer de ce texte un renseignement géographique ou histori­que, qui n’y est pas contenu.
Loung-chou est un indifférent taoïste presque parfait. Il ne lui reste plus qu’à se défaire de l’illusion de prendre sa sagesse pour une maladie et de vouloir en guérir.
Certains membres de ce paragraphe insérés uniquement pour cause de parallélisme, sont ineptes. Le sens général est qu’il y a deux états, celui de vie et celui de mort ; que l’inaction fait durer la vie, que l’action est un suicide. Nous savons cela.
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F. Un membre au clan Fan, nommé Tzeu-hoa, très avide de popularité, s’était attaché tout le peuple de la principauté Tsinn. Le prince de Tsinn en avait fait son favori, et l’écoutait plus volontiers que ses ministres, distribuant à son instigation les honneurs et les blâmes. Aussi les quémandeurs faisaient-ils queue à la porte de Tzeu-hoa, lequel s’amusait à leur faire faire devant lui assaut d’esprit, à les faire même se battre, sans s’émouvoir aucunement des accidents qui arrivaient dans ces joutes. Les mœurs publiques de la principauté Tsinn pâtirent de ces excès. Un jour Ho-cheng et Tzeu-pai, qui revenaient de visiter la famille Fan, passèrent la nuit, à une étape de la ville, dans une auberge tenue par un certain Chang-K’iou-k’ai (taoïste). Ils s’entretinrent de ce qu’ils venaient de voir. Ce Tzeu-hoa, dirent-ils, est tout-puissant ; il sauve et perd qui il veut ; il enrichit ou ruine à son gré. Chang-K’iou-k’ai que la faim et le froid empêchaient de dormir, entendit cette conversation par l’imposte. Le lendemain, emportant quelques provisions, il alla en ville, et se présenta à la porte de Tzeu-hoa. Or ceux qui assiégeaient cette porte, étaient tous personnes de condition, richement habillés et venus en équipages, prétentieux et arrogants. Quand ils virent ce vieillard caduc, au visage halé, mal vêtu et mal coiffé, tous le regardèrent de haut, puis le méprisèrent, enfin se jouèrent de lui de toute manière. Quoi qu’ils dissent, Chang-K’iou-k’ai resta impassible, se prêtant à leur jeu en souriant. — Sur ces entrefaites, Tzeu-hoa ayant conduit toute la bande sur une haute terrasse, dit : Cent onces d’or sont promises à qui sautera en bas ! Les rieurs de tout à l’heure eurent peur. Chang-K’iou-k’ai sauta aussitôt, descendit doucement comme un oiseau qui plane, et se posa à terre sans se casser aucun os. C’est là un effet du hasard, dit la bande. — Ensuite Tzeu-hoa les conduisit tous au bord du Fleuve, à un coude qui produisait un profond tourbillon. A cet endroit, dit-il, tout au fond, est une perle rare ; qui l’aura retirée, pourra la garder ! Chang-K’iou-k’ai plongea aussitôt, et rapporta la perle rare du fond du gouffre. Alors la bande commença à se douter qu’elle avait affaire à un être extraordinaire. — Tzeu-hoa le fit habiller, et l’on s’attabla. Soudain un incendie éclata dans un magasin de la famille Fan. Je donne, dit Tzeu-hoa, à celui qui entrera dans ce brasier, tout ce qu’il en aura retiré ! Sans changer de visage, Chang-K’iou-k’ai entra aussitôt dans le feu, et en ressortit, sans être ni brûlé ni même roussi. — Convaincue enfin que cet homme possédait des dons transcendants, la bande, lui fit des excuses. Nous ne savions pas, dirent-ils ; voilà pourquoi nous vous avons manqué. Vous n’y avez pas fait attention, pas plus qu’un sourd ou qu’un aveugle, confirmant par ce stoïcisme votre transcendance. Veuillez nous faire part de votre formule ! — Je n’ai pas de formule, dit Chang-K’iou-k’ai. Je vais comme mon instinct naturel me pousse, sans savoir ni pourquoi ni comment. Je suis venu ici pour voir, parce que deux de mes hôtes ont parlé de vous, la distance n’étant pas grande. J’ai cru parfaitement tout ce que vous m’avez dit, et ai voulu le faire, sans arrière-pensée relative à ma personne. J’ai donc agi sous l’impulsion de mon instinct naturel complet et indivis. A qui agit ainsi, aucun être ne s’oppose, (cette action étant dans le sens du mouvement cosmique). Si vous ne veniez de me le dire, je ne me serais jamais douté que vous vous êtes moqués de moi. Maintenant que je le sais, je suis quelque peu ému. Dans cet état, je n’oserais plus, comme auparavant, affronter l’eau et le feu, car je ne le ferais pas impunément. — Depuis cette leçon, les clients de la famille Fan n’insultèrent plus personne. Ils descendaient de leurs chars, pour saluer sur la route, même les mendiants et les vétérinaires. — Tsai-no rapporta toute cette histoire à Confucius. Sans doute, dit celui-ci. Ignorais-tu que l’homme absolument simple, fléchit par cette simplicité tous les êtres, touche le ciel et la terre, propitie les mânes, si bien que rien absolument ne s’oppose à lui dans les six régions de l’espace, que rien ne lui est hostile, que le feu et l’eau ne le blessent pas ? Que si sa simplicité mal éclairée a protégé Chang-K’iou-k’ai, combien plus ma droiture avisée me protègera-t-elle moi. Retiens cela ! (Bout de l’oreille du chef d’école.)

G. L’intendant des pacages de l’empereur Suan-wang de la dynastie Tcheou, avait à son service un employé Leang-ying, lequel était doué d’un pouvoir extraordinaire sur les animaux sauvages. Quand il entrait dans leur enclos pour les nourrir, les plus réfractaires, tigres, loups, aigles pêcheurs, se soumettaient docilement à sa voix. Il pouvait les affronter impunément, dans les conjonctures les plus critiques, temps du rut ou de la lactation, ou quand des espèces ennemies se trouvaient en présence. L’empereur ayant su la chose, crut à l’usage de quelque charme, et donna ordre à l’officier Mao-K’iouyuan de s’en informer. Leang-ying dit : Moi petit employé, comment posséderais-je un charme ? Si j’en possédais quelqu’un, comment oserais-je le cacher à l’empereur ? En peu de mots, voici tout mon secret : Tous les êtres qui ont du sang dans les veines, éprouvent des attraits et des répulsions. Ces passions ne s’allument pas spontanément, mais par la présence de leur objet. C’est sur ce principe que je m’appuie, dans mes rapports avec les bêtes féroces. Je ne donne jamais à mes tigres une proie vivante, pour ne pas allumer leur passion de tuer ; ni une proie entière, pour ne pas exciter leur appétit de déchirer. Je juge de ce que doivent être leurs dispositions, d’après le degré auquel ils sont affamés ou rassasiés. Le tigre a ceci de commun avec l’homme, qu’il affectionne ceux qui le nourrissent et le caressent, et ne tue que ceux qui le provoquent. Je me garde donc de jamais irriter mes tigres, et m’efforce au contraire de leur plaire. Cela est difficile aux hommes d’humeur instable. Mon humeur est toujours la même. Contents de moi, mes animaux me regardent comme étant des leurs. Ils oublient, dans ma ménagerie, leurs forêts profondes, leurs vastes marais, leurs monts et leurs vallées. Simple effet d’un traitement rationnel.

H. Yen-Hoei dit à Confucius : Un jour que je franchissais le rapide de Chang, j’admirai la dextérité extraordinaire du passeur, et lui demandai : cet art s’apprend-il ? « Oui, dit-il. Quiconque sait nager, peut l’apprendre. Un bon nageur l’a vite appris. Un bon plongeur le sait sans l’avoir appris. » Je n’osai pas dire au passeur, que je ne comprenais pas sa réponse. Veuillez me l’expliquer, s’il vous plaît. — Ah ! dit Confucius, je t’ai dit cela souvent en d’autres termes, et tu ne comprends pas encore ! Écoute et retiens cette fois !.. Quiconque sait nager, peut l’apprendre, parce qu’il n’a pas peur de l’eau. Un bon nageur l’a vite appris, parce qu’il ne pense même plus à l’eau. Un bon plongeur le sait sans l’avoir appris, parce que l’eau étant devenue comme son élément, ne lui cause pas la moindre émotion. Rien ne gêne l’exercice des facultés de celui dont aucun trouble ne pénètre l’intérieur... Quand l’enjeu est un tesson de poterie, les joueurs sont posés.. Quand c’est de la monnaie, ils deviennent nerveux. Quand c’est de l’or, ils perdent la tête. Leur habileté acquise restant la même, Ils sont plus ou moins incapables de la déployer, l’affection d’un objet extérieur les distrayant plus ou moins. Toute attention prêtée à une chose extérieure, trouble ou altère l’intérieur.

I. Un jour que Confucius admirait la cascade de Lu-leang, saut de deux cent quarante pieds, produisant un torrent qui bouillonne sur une longueur de trente stades, si rapide que ni caïman ni tortue ni poisson ne peut le remonter, il aperçut un homme qui nageait parmi les remous. Croyant avoir affaire à un désespéré qui cherchait la mort, il dit à ses disciples de suivre la rive, afin de le retirer, s’il passait à portée. Or, à quelques centaines de pas en aval, cet homme sortit lui-même de l’eau, défit sa chevelure pour la sécher, et se mit à suivre le bord, au pied de la digue, en fredonnant. Confucius l’ayant rejoint, lui dit : Quand je vous ai aperçu nageant dans ce courant, j’ai pensé que vous vouliez en finir avec la vie. Puis, en voyant l’aisance avec laquelle vous sortiez de l’eau, je vous ai pris pour un être transcendant. Mais non, vous êtes un homme, en chair et en os. Dites-moi, je vous prie, le moyen de se jouer ainsi dans l’eau. — Je ne connais pas ce moyen, fit l’homme. Quand je commençai, je m’appliquai ; avec le temps, la chose me devint facile ; enfin je la fis naturellement, inconsciemment. Je me laisse aspirer par l’entonnoir central du tourbillon, puis rejeter par le remous périphérique. Je suis le mouvement de l’eau, sans faire moi-même aucun mouvement. Voilà tout ce que je puis vous en dire.
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