Il arrive quelquefois que la nature, comme prise de remords, jette en aumône un os à ronger à ceux qu’elle mutile, les laissés-pour-compte. Souvent sous forme d’un talent, en général inutile, ou de cette malédiction : l’intelligence.
("Les Furies")
La vengeance du temps, c’est la mémoire. Vos yeux ont beau, pendant une éternité, être aveugles et sourdes vos oreilles, quand vous vous réveillez, le passé est toujours là.
("En cet instant de le tempête")
- Une montagne de soixante mille mètres n'est pas une montagne, finis-je par dire. C'est un monde qu'une divinité atteinte de débilité mentale a oublié de mettre sur orbite.
(Cette montagne mortelle)
Seuls quelques êtres sont touchés quand vous fermez votre porte pour ne plus la rouvrir.
(L'île des morts)
Cela n’avait duré qu’un instant mais cet instant m’avait suffi. J’avais trouvé la réponse à la question que je m’étais posée : quel artiste fût parvenu à fixer cette scène ? Ni le Greco ni Blake. Non : Bosch. Cela ne prêtait pas à discussion. Bosch, peintre des rues de l’enfer, Bosch, hanté de visions de cauchemar, était le seul qui eût pu rendre justice à cet instant de la tempête.
("En cet instant de la tempête")
La population ne prête jamais attention aux bulletins météorologiques. Je crois que c’est là un facteur permanent de la psychologie humaine, ayant pour origine lointaine une méfiance tribale à l’égard du chamane. On veut qu’il se trompe. S’il a raison, c’est la preuve qu’il est d’une essence supérieure, ce qui est inconfortable. Encore plus que de se faire mouiller.
("En cet instant de la tempête")
- Le temps fuit, dit Jarry.
- J'ai peur.
- De quoi?
- Je ne sais pas. J'ai peur, c'est tout.
- Pourquoi?
- Je suppose que c'est d'avoir vécu comme nous l'avons fait. A laisser de petites parcelles de nous-mêmes en différents siècles.
(Clefs pour décembre)
Et, à propos de musique, je ne peux évidemment faire l'impasse sur le poème symphonique de Sergeï Rachmaninov (1909), dans lequel, écrit Zelazny, Sandow a puisé une partie de son inspiration. La mesure en 5/8 rendant à la fois le balancement des vagues et le geste du rameur, le leitmotiv citant le Dies Irae médiéval, le jeu solennel des cors, les passages plus clairs au hautbois, à la flûte, au violoncelle, sonnant comme un déchirant adieu à la vie, tout contribue à rendre cette pièce mémorable. (Préface)
Sur la plupart des mondes habités, il existe certains endroits assez agréables. Il y a des îlots protégés des rudes hivers, étés suffocants, des ouragans, de la grêle, des raz de marée, de terrifiants orages électriques, des moustiques, de la boue, de la glace, et de toutes ces autres petites choses qui ont amené les philosophes à concéder que la vie n’est pas exempte d’une certaine mesure de souffrances.
Tel n’était pas Lugubre.
Vous n’y auriez pratiquement jamais vu Beltégeuse, à cause de la couche de nuages ; et si vous l’aviez vue, vous auriez souhaité ne pas la voir, à cause de la chaleur. Déserts, champs de glace et de jungles, orages perpétuels, températures extrêmes et vents mauvais – vous rencontriez diverses combinaisons de tout cela, où que vous alliez sur Lugubre, et c’est la raison de son nom. Il n’y avait pas un havre de repos, pas un endroit qui fût agréable.
("Lugubre Lumière")
L’Homme est la somme de tout ce qu’il a fait, de tout ce qu’il a souhaité faire ou ne pas faire, de tout ce qu’il regrette d’avoir fait ou de ne pas avoir fait.
("En cet instant de la tempête")