Un ennui au Musée
Devant les entrées du Louvre se déroule une étrange procédure d'admission : les hommes sont priés de se dénuder avant d'accéder au Musée. Mais comment en est-on arrivé là ?
Tout a débuté 6 mois auparavant. Entre de jeunes garçons profitent de leur visite scolaire pour se photographier devant les statues de femmes dénudées et les toucher, et les statues « mâles » faisant assaut de grivoiserie et de misogynie… Trop, c'est trop ! Les femmes des oeuvres exposées décident donc de disparaître.
C'est la crise au Louvre, «
le grand incident ».
Histoire originale, cette réflexion sur la représentation de la femme dans l'Art et accessoirement sur la faiblesse de la présence d'oeuvres réalisées par des femmes, me laissait espérer beaucoup, mais m'a finalement déçu.
L'explication du ras-le-bol qui est donné par une historienne d'art est intéressante (contrairement au nu masculin qui est censé représenter la force virile et le courage, le nu féminin marque la soumission et l'humiliation), mais enfonce un peu des portes ouvertes sur l' »invisibilisation » des femmes dans l'histoire ou sur la sexualisation de leur représentation. Que l'Art reflète lui aussi, la pensée dominante est une évidence.
Mais je ne suis pas sûr que cette démonstration soit servie au mieux par des exemples pas forcément pertinents (qui est réellement mis en valeur dans Suzanne et les vieillards ?) ou par une intrigue lourdingue sur fond d'échange de rôles de président-directeur et de secrétaire, entre un frère et sa soeur…
Et que dire de la solution trouvée pour résoudre la crise, consistant à n'autoriser l'entrée des hommes au Louvre, que s'ils sont nus, puis à faire du Musée, un espace naturiste ? Comme si la nudité était le sujet central, alors qu'elle n'est qu'un signe de domination parmi d'autres.
Vous me direz qu'il ne faut sans doute pas sur-analyser et que le but de Zelba était de faire réfléchir, tout en restant drôle. Cet objectif est atteint.
Mais je ne peux pas m'empêcher de regretter qu'en se réfugiant derrière le burlesque, cette BD ne soit pas allée plus loin et reste finalement, assez convenue. de ce point de vue, la post-face de Zelba s'excusant en écriture inclusive auprès des personnes non binaires qu'elle n'a pas pu représenter est le dernier clou du cercueil.
Le dessin est léger et inventif, jouant sur les rares couleurs. Dommage que les nez démesurés des frère-soeur Darlin soient plus agaçants qu'autre chose.