AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Destin français (49)

Dès l’enfance, j’avais compris que la France était ce pays singulier fait de héros et d’écrivains, de héros qui se prétendaient écrivains, et d’écrivains qui se rêvaient en héros. Plus tard, avec Braudel, j’ai appris qu’il y avait aussi des Français qui travaillaient, produisaient, créaient, vendaient, achetaient, participaient à l’« économie-monde ». Le Roy Ladurie et tant d’autres m’ont enseigné qu’il y avait aussi, et surtout, des paysans qui labouraient, nourrissaient, souffraient. Avec Philippe Ariès, j’ai appris qu’il y avait aussi des enfants, choyés ou délaissés. Mais la France était ce pays unique où « l’intendance suivait », du moins dans son imaginaire. La France était ce pays fait à coups d’épée mais aussi de mots, par des cardinaux qui avaient l’épée au côté, et des littérateurs qui avaient la langue effilée comme une rapière.
Commenter  J’apprécie          191
Etre français, quand on n'est pas un fils des pères selon la chair, mais un fils des pères selon l'esprit, c'est prendre parti pour ses pères d'adoption jusques et y compris contre ses pères d'origine.
Commenter  J’apprécie          130
Un jour, mon grand-père paternel me montra un des timbres qu'il collectionnait. Un combattant à la mine farouche, la tête surmontée d'un turban, brandissait un fusil. Un seul nom barrait l'image : Zemmour. C'était une tribu berbère célèbre, m'expliqua le vieil homme. Une des dernières à se soumettre à la France, bien après la prise de la smala d'Abd el-Kader, que j'avais étudiée à l'école. Mon sort se compliquait : j'avais été colonisé par la France, et j'avais même farouchement résisté à l'envahisseur. Comme Astérix face à Rome. Les Gaulois étaient devenus des Gallo-Romains, après avoir pris goût à la paix et à la civilisation romaine. Mes ancêtres à moi étaient devenus des Berbéro-Français, après avoir pris goût à la paix et à la civilisation française. Les Gallo-Romains avaient adopté les prénoms latins et endossé les toges romaines, appris à parler et à lire le latin ; ils disaient : « À Rome, on fait comme les Romains. » Mes aïeux avaient donné des prénoms français à leurs enfants, lu Victor Hugo et endossé les costumes et les robes de Paris, jusqu'à cette minijupe si « indécente » que ma mère arborait dans les rues de la capitale, à la place des djellabas et burnous arabes que leurs grands-mères avaient pourtant portés. L'histoire se répétait. Je la croyais immuable alors que j'étais là encore la dernière génération à la répéter. Dès la fin des années 1980, je compris que quelque chose ne tournait plus rond en ce beau pays de France : ceux qui nous avaient succédé dans les HLM de Montreuil ou de Drancy s'appelaient Mohamed ou Aïcha et non Marc et Françoise ; des voiles islamiques couvraient la tête de quelques jeunes filles ; leur langue était un sabir qui dédaignait la syntaxe française ; et il commençait à se murmurer que, dans nombre de lycées de banlieue, des adolescents refusaient d'étudier « votre » holocoste, « votre » croisade, mais aussi « votre » Voltaire, « votre » Flaubert, « votre » Révolution française...
Commenter  J’apprécie          110
La France est un des rares pays à avoir deux mythes d'origine: les Gaulois et les Francs. Les Francs pour l'histoire aristocratique, catholique, monarchique, qui part du baptême de Clovis. Les Gaulois, pour l'histoire anticléricale, républicaine, laïque.
Commenter  J’apprécie          70
L'homme a des millions de spermatozoïdes, qu'il produit aisément; la femme dispose d'un ovule par mois et d'un nombre réduit d'ovocytes; cette différence induit une inégalité fondatrice, des comportements dissemblables, 'genrés' comme on dit aujourd'hui - un surinvestissement sentimental pour les femmes, contraintes de choisir le bon géniteur, un comportement de chasseur pour les hommes, qui sont poussés à conquérir le plus de proies possibles - qui relèvent de la biologie et non de la sociologie.
Commenter  J’apprécie          60
L'histoire de France coulait dans mes veines, emplissait l'air que je respirais, forgeait mes rêves d'enfant: je n'imaginais pas être la dernière génération à grandir ainsi.
Commenter  J’apprécie          60
Les révolutionnaires français ne tolèrent pas qu'on résiste parce qu'on ne doit pas résister au progrès. L'émergence d'un individu "libéré" de ses chaînes religieuses et claniques, les chaînes de cette société traditionnelle dite "holiste", n'attend pas. La raison doit écraser l'aliénation de la superstition qui, comme disait Barère, parle "bas-breton". Le projet révolutionnaire français est un projet d'universalisation du monde, dans une logique dialectique, par la raison. "L'esprit du monde" s'exprimera par le Code civil et la rationalisation par le droit. Napoléon ne comprendra pas davantage la révolte des guérilleros espagnols, à qui il "apportait le Code civil", que les membres du Comité de salut public n'avaient compris l'"inexplicable Vendée". Pourtant, Napoléon avait admiré et glorifié l'héroïsme des valeureux Vendéens ; mais la leçon ne lui servira pas lorsqu'il se retrouvera confronté à sa "Vendée espagnole".
Commenter  J’apprécie          50
Charles Péguy dit: « l’ordre, et l’ordre seul fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. »
Commenter  J’apprécie          50
Il n’y avait pas de rupture entre l’école, la télévision et la ville. Chaque rue, chaque place, chaque statue de Paris que je découvrais, installé dans la DS que mon père conduisait d’une main nerveuse, voire brutale, évoquait pour moi un moment d’histoire : place de la Concorde, je m’évertuais à deviner l’endroit où Louis XVI avait été guillotiné, et celui où les cosaques avaient célébré une messe orthodoxe en 1814 ; place de la Bastille, je tentais de reconstruire mentalement l’antique prison ; devant l’église Notre-Dame, je cherchais des yeux l’ombre d’Esmeralda et de Quasimodo.
Commenter  J’apprécie          50
Je crois plus que jamais que la France n’est pas en Europe, mais est l’Europe. Elle est espagnole par les Pyrénées, italienne par Nice et la Provence, allemande par Strasbourg et le Rhin, anglaise par la Bretagne : « L’originalité de la civilisation française fut de fondre et d’amalgamer des éléments méditerranéens et des éléments barbares… La France fut, par sa côte méditerranéenne, en contact intime avec les mondes grec, romain, byzantin ; par sa côte atlantique, avec les Vikings scandinaves ; par sa frontière pyrénéenne, avec l’islam ; par le Rhin, avec les Barbares. Ce mélange la sauva de l’éternel provincialisme de l’Europe centrale. »

En 1810, la France incorporait en son sein les provinces belges, rhénanes, italiennes. J’amuse beaucoup mes amis, surtout ceux venant de ces contrées-là, en leur disant qu’à mes yeux, ils sont toujours français. Ils ne se doutent pas à quel point je suis sérieux. Il n’y a aucune différence, selon moi, entre Nice et Turin, Strasbourg et Cologne, Lille et Bruxelles ou Anvers. La France n’est pas une race ; elle est l’héritière de l’Empire romain ; le destin historique de cette nation, comme le disaient Jacques Bainville ou Maurice Barrès, est de poursuivre la tâche de « civilisation » commencée sous les auspices du légionnaire romain au-delà du Rhin.

Écrire l’Histoire de la France, c’est pour moi monter et descendre inlassablement le même escalier : comment l’Église a fait un roi ; comment le roi a fait la nation ; comment la nation a fait la République ; comment la République a fait la grande nation ; comment la grande nation est devenue puissance moyenne ; comment la puissance moyenne est en danger de mort. L’historien Pierre Nora résume cet escalier par une formule cruelle et magnifique : « Je pense que le passé de la France est plus intéressant que son avenir. La France sait qu’elle a un futur, mais elle ne se voit pas d’avenir. »
Commenter  J’apprécie          50






    Lecteurs (208) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Quelle guerre ?

    Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

    la guerre hispano américaine
    la guerre d'indépendance américaine
    la guerre de sécession
    la guerre des pâtissiers

    12 questions
    3192 lecteurs ont répondu
    Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

    {* *}