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Critique de les_aventures_livresques


Zola est un auteur avec lequel j'ai un différend depuis de nombreuses années. Je me souviens avoir lu, pendant l'été entre ma troisième et mon entrée au lycée, Nana et Au Bonheur Des Dames afin d'étoffer ma culture littéraire classique pour préparer le bac de français. de ces textes immensément connus, je n'ai retenu qu'un ennui profond. Je ne sais même plus tellement de quoi ils traitent, mais à cause d'eux, j'ai tenu Zola en horreur pendant de très nombreuses années. Durant mes études, j'ai évidemment entendu beaucoup parler de Zola, de la part des enseignants tout autant que des élèves. J'ai voulu retenter l'expérience avec Thérèse Raquin qui fut, entre nous soit dit, l'une des plus belles surprises littéraires dont j'aurais pu avoir connaissance. Avec l'idée d'avoir apprécié ce livre, j'ai décidé de me lancer dans le corpus de Zola, l'une des plus grandes structures littéraires qui aient existé en France : les Rougon-Macquart. La Fortune Des Rougon étant le premier paru, j'ai décidé de m'atteler à la tâche avec ce premier tome.

Ce texte nous plonge au sein du commencement d'une très grande famille, totalement fracturée. L'aïeule à l'origine de tout, Adélaïde Fouque, aura trois enfants. Mariée avec Marius Rougon, elle aura Pierre ; en liaison avec Eustache Macquart, elle aura Ursule et Antoine. La supériorité se faisant sentir chez Pierre, il mettra en péril l'ordre familial – déjà fragilisé par la folie d'Adélaïde. Nous suivons aussi le jeune Silvère Mouret et son amour avec Miette, enfants de la liberté, leur vie ne sera pas rose.

En réalité, ce premier tome ne cible pas grand-chose en particulier puisqu'il sert vraisemblablement d'introduction globale à la généalogie des Rougon-Macquart, ainsi que les différents liens que tiennent les personnages entre eux. Ce livre nous présente une généalogie totalement décadente ! Tous les personnages principaux sont là, plusieurs années sont couvertes dans ce livre, et chaque chapitre se concentre sur une facette de la vie de cette généalogie. Adélaïde et ses deux amours ; Pierre Rougon et Félicie, véreux, ainsi que leurs cinq enfants tous aussi spéciaux les uns que les autres ; Ursule et Antoine ainsi que les enfants respectifs… Ce livre est une base fondamentale pour comprendre les dix-neuf autres ouvrages composants cette série.

Ce premier tome est un livre très politique, probablement le plus politique d'entre tous, si j'ai bien compris les différents thèmes de chaque oeuvre. C'est assez compliqué à lire d'un point de vue où nous sommes plongés dans le grand contexte historico-politico-social de l'époque. Mais malgré cette plongée dans des actions politiques féroces, toutes très justement décrites, l'auteur veille à nous introduire les personnages de la famille des Rougon-Macquart ainsi que leurs différentes aspirations politiques, et leurs propres actions au sein du contexte de l'époque ! Ce livre se passe en très grande partie lors du coup d'État du 2 décembre 1851, débutant le Second Empire sous le règne de Napoléon III ; nous verrons donc, au fil des pages, comment les personnages s'ancrent sous cette instance, avec des fragmentations de concurrence.

Lors de ma découverte, je n'avais pas particulièrement de personnages qu'il me tardait de rencontrer, j'ai démarré ma lecture sans aucune connaissance extérieure – exceptée la connaissance globale de l'Oeuvre que j'ai eu grâce à mes cours. Mais, au cours du texte, je me suis surpris à me prendre d'attachement pour deux personnages particuliers : Silvère et Adélaïde Fouque (ou la grand-mère et son petit-fils). Je me suis attaché, grâce aux chapitres qui leur furent consacrés, à cet enfant recueilli par sa grand-mère suite à son délaissement et son statut d'orphelin, j'ai apprécié ce jeune homme fougueux et amoureux, et j'ai apprécié cette Adélaïde et sa fragile mentalité, ou plutôt sa douce particularité. J'ai été charmé par ces deux personnages qui m'ont semblé être, étonnement, les moins perturbés. Et puis, la relation entre Miette et Silvère est des plus adorables que j'ai pu lire, poignante, touchante, et triste ; elle est criante de symbolisme.

J'ai, en ce livre, beaucoup apprécié découvrir le côté Rougon de la famille. Pierre et son avidité, son contrôle suprême l'ayant amené à « gouverner » les destins des personnages de la généalogie. Ainsi que sa femme, Félicité, femme totalement fatale, parfaitement vénale, manipulatrice et même cruelle. J'ai évidemment adoré cette dernière, et j'ai été surpris également de la découvrir noire de peau, chose à laquelle je ne m'attendais pas au vu de l'âge du texte. Les enfants, aussi, surtout masculins, m'ont été agréables à découvrir ; mais ceux-ci restaient très secondaires en ce volume, j'ai donc très hâte d'en découvrir plus sur ceux-ci lors de mes prochaines lectures. Nous pouvons savourer, de plus, la double compréhension du titre du roman, car nous sommes introduits face à leur fortune se créant, mais également grâce à la face même de possession et de conquête de la fortune.

En revanche, les chapitres concernant le côté Macquart de la famille m'ont laissé presque pantois ; même si je les ai beaucoup appréciés, ils m'ont moins atteint. le personnage d'Antoine Macquart m'est apparu d'un risible et d'un pathétique monstrueux, l'ayant apporté à mes yeux au rang d'ordure supérieure. Même si sa vie était remplie de problèmes, dont un grand nombre en rapport avec son demi-frère et sa femme, il a tout de même fait de très nombreuses choses condamnables au sein de ce livre, ce qui m'a permis d'égarer toute forme de compassion à son égard. J'ai été aussi triste de ne pas avoir eu le droit à plus de renseignements sur Ursule Macquart dont j'aurais aimé apprendre les nuances…

Cette édition de la Fortune Des Rougon est fondamentale pour toute personne souhaitant se lancer profondément dans la découverte - ou l'acquisition totale des oeuvres - de la série. le travail de recherches et d'approfondissements effectué par Henri Mitterand et Maurice Agulhon est très impressionnant. Avec des précisions sur les méthodes de travail de Zola, les différents arbres généalogiques en fonction des années de prépublication des tomes, etc. Cette édition est un travail d'orfèvre. Et par ailleurs, cette couverture représentant un arbre, un lien - vraie sculpture d'un artiste -, m'évoque tout particulièrement le texte lu et dont je viens de vous parler aujourd'hui. La cohésion est totale.

Enfin, je vais m'arrêter là pour cette critique massive. Après avoir rebuté Zola pendant de nombreuses années, et après l'avoir redécouvert sous un nouveau jour avec Thérèse Raquin il y a quelques mois, commencer ma découverte intégrale des R-M avec ce livre m'a été un plaisir étonnant. Une généalogie décadente au fil des pages scientifiques de précision, j'ai été pris d'un bonheur effrayant à découvrir ce classique fondamental. Hâte du prochain ! {17}
Lien : https://clemslibrary.wordpre..
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