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Critiques de Kiyémis (70)
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À nos humanités révoltées

Depuis 1976, le mois de février est aussi le #BlackHistoryMonth. Cet événement a pour but de commémorer et de mettre en avant les accomplissements des diaspora africaines à travers le monde.



C’est en lien avec cet événement que je me suis lancé dans la lecture d’un petit livre qui attendait dans ma pile à lire depuis quelques temps : Le recueil de poème À nos humanités révoltées de Kiyemis.  Kiyémis est une autrice et militante afroféministe et elle publie son premier recueil de poésie aux éditions premiersmatinsdenovembre.



Je me suis plongée dans ce petit recueil abordant les thèmes de l’identité, de l’immigration, de culture, d’oppression …  Une poétesse en lutte et en révolte !



J'ai aimé le rythme et la puissance dégagé par ces poèmes. Ce rythme nous entraîne et l’on s'imagine dans une salle ou les poèmes serait déclamés... Je lirai sans aucun doute d'autres œuvres de cette autrice si elle en publie d’autres !
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Et, refleurir

Kiyemis s’est inspirée de sa grand-mère maternelle et camerounaise pour dresser ce portrait.

Une femme déterminée sur un parcours souvent raconté : le désir d’école, la grossesse non désirée, le mariage forcé, les espoirs, les rêves, les désillusions, la résilience.



Ce que j’ai aimé dans ce récit, c’est l’absence totale de mélo et la volonté de rebondir après chaque échec.

Ce que j’ai aimé aussi, et qui nous la rend très proche, ce sont ses illusions souvent déraisonnables par rapport à la réalité. Souvent tiraillée entre le besoin et l’envie d’une vie amoureuse et les hommes qu’elle rencontre.

Sa mère, qui est pourtant restée au pays, le lui explique, en toute franchise :

« Ne crois pas que les hommes de la ville sont si différents de ceux du village ma fille. Ils sont les mêmes, partout à Douala, à Nyokon, et je suis sûre que dans ton pays de Blancs, c’est la même chose.(…)

Audoun, croie-le ou non, j’ai vécu ça. Ton père avait d’autres familles, tu le sais autant que moi. J’ai passé mon temps à être jalouse et à être jalousée. »



Ce que j’ai moins aimé, c’est cette impression de « déjà lu ». Les extraits poétiques insérés dans le récit auraient pu constituer la touche originale mais, en fait, je les ai trouvés un peu laborieux et surtout beaucoup trop systématiques.



En conclusion, un roman bien maîtrisé, mais qui ne m’a pas touchée.



Lu dans le cadre du prix Orange 2024.

Merci à Lecteurs.com et aux Editions Philippe Rey.


Lien : https://commelaplume.blogspo..
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Et, refleurir

« Andoun, tu n’es pas comme les autres ». Dans ce village, reculé du Cameroun, dans les années 50, cette phrase répétée par son père n’est pas forcément un compliment. Pourtant, cette sentence, qui signe sa singularité, elle y puisera une force qui lui permettra de s’extraire de la destinée toute tracée de ces femmes villageoises pauvres. Elle y trouvera aussi la force de dire « non ». Non aux travaux des champs, pour partir à Douala chez sa sœur et son beau-frère. Non à la fatalité, quand elle se retrouvera fille-mère. Non à un mariage sordide imposé pour sauver la réputation de sa famille. Non à la résignation, quand la vie qu’elle avait rêvé en France, s’avèrera grise et terne.

Portrait lumineux et plein de tendresse d’une femme déterminée à faire refleurir sa vie et à faire vivre ses rêves.

.

Inspirée à l’autrice par la vie de sa grand-mère, ce texte est un très bel hommage aux femmes qui se battent. Contre le déterminisme social, contre le machisme ordinaire, contre la misère ou contre le carcan des traditions, contre le patriarcat et le racisme aussi. Il serait réducteur de le résumer au combat de la femme africaine. Andoun/Anne Marie, incarne avec majesté, toutes les femmes seules et sa couleur de peau qui renforce ses difficultés, n’atténue en rien l’universalité de son message. Avec un tel sujet, on pourrait craindre un texte plombant, il n’en est rien. C’est au contraire, lumineux, en grande partie, grâce aux pages en vers qui croisent le récit. Une poésie qui avec délicatesse vient apporter de la douceur aux épisodes les plus sombres ou de la profondeur à des émotions que le récit suggère. Et cette originalité donne toute la beauté du texte.

Je suis tombée sous le charme de cette belle lecture. Un très beau texte aux multiples sujets, la résilience, la maternité, la transmission et l’exil. Un roman au message féministe fort et un hommage vibrant à sa famille. Les jurés des prix ne s’y sont pas trompés. @kiyemis est en lice pour le prix Orange et elle a obtenu cette semaine le prix Régine Desforges. Bravo à elle et aux @editions_philippe_rey pour leur flair à nous offrir toujours de beaux textes. Longue vie à ce beau roman
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Et, refleurir

Un très joli récit qui nous fait plonger dans la vie d'une femme africaine, de son enfance et son adolescence au Cameroun à son arrivée en France. Nous découvrons au travers de ses yeux la réalité de la colonisation, l'impact de la domination de l'homme blanc sur l'ensemble de la société camerounaise. J'ai été particulièrement touchée par le courage et la combativité de l'héroïne.
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Et, refleurir

MEGA COUP DE COEUR INTERGALLACTIQUE



Andoun grandit dans un petit village de campagne au Cameroun. Depuis qu'elle est toute petite, son père lui répète qu'elle n'est pas comme les autres. Et pour cause, la jeune fille a des rêves qui vont au-delà des champs et de la culture d'arachides. Et c'est la tête pleine de rêves et d'ambition, qu'elle partira vivre chez sa sœur qui a fait un "beau mariage" et qui habite en ville. Mais une fois sur place, Andoun déchante : entre sa volonté d'étudier contrariée, une grossesse imprévue et une indépendance arrachée, la jeune femme ne cessera de se battre pour faire affirmer son droit d'exister et de rêver toujours plus grand.

De Nyokon à Paris en passant par Douala, Andoun sera tiraillée entre ses désirs de flamboyance et ses racines familiales.



Voilà une histoire qui m'a touchée en plein cœur



D'abord parce qu'elle aborde des thèmes qui me sont chers : la résilience, l'intégration, la liberté, la maternité, les racines, la construction personnelle... J'ai lu que l'autrice s'était inspirée de l'histoire de sa grand-mère pour rédiger ce roman. Bien évidemment, je ne peux m'empêcher de faire le parallèle avec ma propre histoire familiale, étant moi-même fille d'immigrée.

J'ai pensé aux combats qu'il a fallu mener contre les préjugés, à l'abnégation dont il a fallu faire preuve pour permettre aux générations futures d'accéder à l'école et de leur donner une chance de réussir dans la vie, au courage et à la détermination qu'il a fallu montrer parce qu'on attendait d'eux "toujours plus".



L'écriture de Kiyémis est particulièrement brillante, d'autant plus que chaque chapitre est ponctué de poésies que je trouve particulièrement belles et touchantes. Elle nous raconte le destin d'une femme hors du commun. Tantôt Andoun, tantôt Anne-Marie, tantôt Coco, on ne peut qu'être ému par cette femme qui ne cherchait qu'à vivre à sa façon.



Cette histoire rend hommage à celles et ceux qui rêvent plus grand, à ces parents qui ont du lutter pour une vie meilleure, aux enfants qu'ils ont fait passer en premier, à la résilience infinie, à l'amour d'une petite fille pour sa grand-mère.

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Et, refleurir

Je termine à l'instant ma lecture du très beau livre de Kiyémis, ode à sa grand-mère, à la résilience et à la force féminine. Il est difficile de définir précisément cette histoire. C'est un roman-poème, un roman-fleuve, où nous suivons Andoun / Anne-Marie / Coco, une femme-monde venue du Cameroun emportant en son coeur de mystérieuses et oniriques fleurs jaunes. Parcours initiatique d'une jeune femme déterminée à tracer son chemin, toujours cahotée par la vie, par les hommes, par la famille et le poids des traditions, mais toujours debout, belle et fière. Le texte est émaillé de poèmes qui accompagnent le périple d'Andoun, entre Cameroun et France. C'est une femme lumineuse que nous suivons, que nous admirons et qu'il nous faut laisser à la dernière page. C'est le parcours d'une femme qui quitte les couleurs de son pays natal pour la grisaille atone de Paris et qui se heurte à la vie en France, au regard des autres, au racisme. Parcours difficile mais lumineux d'une femme, inspirée par la grand-mère de l'autrice, à qui, comme dans le roman, on aurait envie de céder notre siège dans le bus pour lui dire qu'elle peut, enfin, se reposer... Il faut également souligner le travail toujours impeccable des Editions Philippe Rey, dont les superbes couvertures sont un délicat prélude à la lecture... On reconnaît ici le talent de Stéphane Rébillon à qui l'on doit également la couverture du très beau "Ce que je sais de toi" d'Eric Chacour.
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Et, refleurir

A 32 ans, la poète, essayiste et animatrice de l’émission en ligne « Rends la joie » publie un roman, « Et, refleurir », sur le destin de sa grand-mère, du Cameroun vers la France.
Lien : https://www.lemonde.fr/livre..
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Et, refleurir

Je remercie les éditions Philippe Rey et Babelio pour m’avoir envoyé ce livre dans le cadre d’une opération masse critique de janvier 2024. Le livre, en tant qu’objet, est d’ailleurs très beau, avec une couverture à la fois sobre et originale, colorée, qui évoque parfaitement l’univers du roman.

Andoun, alias Anne-Marie, grandit dans un village du Cameroun dans les années 50. Très jeune, elle se montre déjà assez anticonformiste et déterminée à ne pas suivre la voie qu’on lui assigne : se marier et travailler la terre pour assurer sa subsistance, faire des enfants et servir sa famille. Soutenue par son père qui la considère « différente des autres », elle quitte le village pour rejoindre sa sœur mariée en ville à Douala : elle espère pouvoir y aller à l’école, étudier et s’extraire de sa condition. Mais, la vie en ville n’est pas aussi idyllique que ce qu’elle s’était imaginé : la domination masculine y règne, sa sœur vit sous l’emprise de son mari qui se montre violent à l’occasion, la pauvreté rend la vie plus difficile encore qu’au village… Andoun découvre aussi un mépris de la part des femmes issues de milieux plus favorisées, et un racisme systémique entretenu par les colons français. Elle se retrouve enceinte, et abandonnée du père de sa future fille. Elle rentre au village, sachant qu’elle apporte avec elle la honte pour toute sa famille, en devenant mère sans être mariée. Son père la recueille et la soutient malgré tout…Mais Andoun n’a pas renoncé à ses rêves de grandeur et de richesse…Sa fille lui donne encore plus l’envie de sortir de sa condition et elle va se démener pour lui offrir ce qu’elle n’a pas eu. Elle retourne en ville, travaille d’arrache-pied pour gagner sa vie et élever sa fille. Peu à peu, elle réalise que ça ne sera pas possible pour elle au Cameroun et elle décide de partir pour Paris où son frère aîné s’est installé. Pour elle, Paris, c’est la belle et grande vie à portée de mains…Elle va se confronter à une réalité tout autre…

Le récit de Kiyémis lui a été inspiré par la vie de sa grand-mère, et elle rend un bel hommage à sa détermination, à son courage à tout épreuve. C’est un témoignage du parcours de ces femmes, ou de ces familles qui ont refusé le fatalisme et ont tout risqué pour une vie meilleure…si ce n’est pour eux, au moins pour leurs enfants. Les poèmes qui font les transitions entre les différents chapitres sont très beaux, sensibles et émouvants, souvent percutants. Je les ai beaucoup aimés et ils sont vraiment une valeur ajoutée au récit.


Lien : https://deslivresetmoi72.wix..
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Et, refleurir

Années 50, Andoun est une jeune fille qui vit au Cameroun.

Elle quitte vite sa famille pour s'installer chez sa sœur à Douala, son père lui a dit que là elle pourra aller à l'école. Un rêve avorté par la décision du beau-frère, l'école ? Trop cher pour y mettre les filles. Elle doit aider sa sœur et s'occuper des enfants et de la maison



Mais elle s'est laissée séduire lors de sa première vraie sortie par un beau jeune homme portant l'habit militaire. Quel bonheur pour lui cette belle jeune fllle encore vierge. Tout est à découvrir, à lui faire découvrir.

Lorsque quelques semaines plus tard elle se rend compte qu'elle est enceinte et lui demande de prendre ses responsabilités, il n'a qu'une réaction, la fuite.

Comment annoncer à sa famille cette infamie. Car lorsque chacun saura qu'elle attend un enfant, il n'y aura plus de mariage possible. Dans sa communauté cela ne se fait pas.

Ne lui reste qu'à essayer de cacher sa grossesse et aller accoucher ailleurs. Retour à la case départ.

Hélas, ce nest pas si facile. Une fois son péché découvert, elle doit obéir à son père, qui lui a trouvé un mari... Elle doit se rendre dans cette nouvelle famille avec sa petite fille.

Comment imaginer que cette jeune femme qui rêve de liberté pourrait accepter de devenir l'épouse d'un homme qu'elle n'aime pas, et qui en plus sent si fort le poisson.

Après avoir essayé de se plier aux traditions, essayé de vivre avec cet homme qu'elle ne veut pas, dans une famille étrangère à ses aspirations, elle quitte tout pour tenter de vivre ses rêves.



Qu'il est compliqué pour ces jeunes femmes de vivre libres, sans blesser ou provoquer leurs familles.

Elle trouve un travail qui lui permet de faire vivre sa fille, mais rêve de faire des études à Paris pour monter son institut de beauté une fois qu'elle sera de retour au pays.

C'est sans compter sur la paresse et les mensonges du frère qui n'hésite pas à voler sa propre sœur, sur la belle-sœur qui rechigne à apporter son aide sans recevoir de contrepartie, sans compter sur l'argent qu'il faut envoyer chaque mois à la famille restée au pays, sans compter sur tous ceux qui veulent respecter les traditions et qui ne souhaitent pas que d'autres sortent du chemin tout tracé par les pères, les hommes de la famille, les contraintes pécuniaires.

En fait d'institut de beauté, et malgré ses diplômes, c'est dans les tours de bureaux qu'elle va passer sa vie à faire le ménage, rejetée par les employeurs potentiels en raison de sa couleur de peau. Ce qui démontre une fois de plus que l'on assigne parfois les femmes et les hommes à une condition dans laquelle nous les imaginons sans même savoir ce dont ils sont réellement capables.

J'ai trouvé intéressante cette façon de nous montrer les rêves de ceux que nous continuons à appeler des migrants sans toujours nous rendre compte des difficultés qu'ils ont à traverser.

Comment s'intégrer, s'adapter, si l'on reste prisonnier de ses habitudes, de ses traditions.

Ces traditions qui empêchent de vivre une vie normale tant elles sont contraignantes et imposées à toutes les femmes, y compris par celles qui en ont également souffert.

Pourtant, rien de vraiment nouveau dans ce roman. Seule une façon d'en parler, une écriture, qui donnent envie de continuer sa lecture en espérant qu'elle pourra voir enfin le bout du tunnel, sans se laisser enfermer par les règles dictées par les hommes.

https://domiclire.wordpress.com/2024/05/23/et-refleurir-kiyemis/


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Et, refleurir

Cette fresque épique et onirique se concentre sur la vraie vie de sa grand-mère Andoun, du village de Nyokon au Cameroun en 1954 jusqu’à Paris aujourd’hui, en passant par Douala. Grossesse involontaire, mariage forcé, parcours migratoire semé d’embûches, jobs alimentaires déconsidérés, mais surtout beaucoup de rêves : c’est une histoire de résilience sans aucune once de misérabilisme face au sexisme, au classisme et au racisme, qu’on trouve rarement en littérature française.
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Et, refleurir

C’est un premier roman remarquable rendant hommage aux rêves d’une vie meilleure, hors des sentiers tracés par des sociétés conservatrices où la femme n’est pas en capacité de choisir sa vie. Le sujet a été souvent traité ces dernières années mais ici la forme et le style étonnent… J’ai été immédiatement captivé par le souffle puissant de la narration. L’histoire du personnage central, Andoun ou Anne-Marie (changer de prénom pour s’inventer une nouvelle vie…) est inspirée de celle de la grand-mère de Kiyémis. D’ailleurs le pseudonyme de l’autrice est la contraction des prénoms de sa mère et de sa grand-mère.



Andoun naît à Nyokon au Cameroun, village à la vie rythmée par le travail de champs vert émeraude des cultures d’arachides. Son père, très aimant, la qualifie de fille spéciale. Elle a en effet une forte personnalité et n’entend pas rester dans la routine de sa famille. Elle n’abdique jamais alors que les obstacles sont nombreux : volonté d’étudier contrariée, grossesse imprévue, dépendance à un mari imposé… Chaque pas vers une nouvelle étape de sa vie la transforme, elle et ceux qui croisent sa route. De Nyokon à Douala, puis Paris où elle rejoint son frère Stéphane, Andoun affronte avec panache la résistance d’un environnement contraire à ses projets. Tiraillée entre son envie d’appartenance et ses désirs, elle tente de dépasser les préjugés. De 1954 à une période récente, on suit une femme libre au prise avec son envie d’émancipation.



La cuisine est très présente ici, avec des mets typiquement camerounais. Il est question de salade de papaye et tapioca, de miondo (bâton de manioc) accompagnant le poisson braisé, de plantains frits, de délicieux ntoumba (gâteau de manioc frais fermenté, malaxé et mélangé à l'huile de palme rouge, cuit à la vapeur). Évoqué habituellement pour ses problèmes politiques apparaît ici un Cameroun méconnu, avec son environnement foisonnant, ses richesses, un véritable grenier à provision généreux avec des « forêts aux arbres d’un vert d’or », des champs de tomate, d’arachide...



Les hommes offrent leur protection afin de séduire des femmes en manque de droit propre. Elles peuvent être des proies faciles. Avantage d’être en uniforme comme Roger, une première expérience avec à la clé la naissance de la petite Freya. Ensuite Andoun est mariée avec le marchand de poisson, Isaire Koundéré, qu’elle rejette. Attirée par l’aventure et ses désirs, elle croise la route de Solè, l’homme de pouvoir aux promesses envoûtantes. Il y a aussi à Paris, Renaud, l’éternel étudiant et dernier recours pour Anne-Marie et Freya avant la rue quand son frère Stéphane lui a dérobé toutes ses économies.



Les personnages sont bien campés, complexes et divers, permettant au lecteur de voyager dans des thèmes universels mais avec une forme peu rencontrée jusqu’alors. Les femmes suivant leurs désirs d’indépendance doivent jouer de leur beauté, séduire pour survivre à défaut d’autre carte à jouer (Stéphane lorsqu’il l’accueille dans son petit logement en banlieue parisienne lui confisque son passeport). A Paris elle rencontre Johanne qui lui montre le chemin :



Langue fleur, langue paradis, le style capte la poésie de l’instant ; de courts paragraphes alternent avec des retours constants à la ligne pour des vers libres, puis des poèmes – alignés à gauche ou à droite, cherchant leur place ? – reprenant le récit sous une autre forme. Des ouvertures de guillemets jamais refermées, comme des paroles qui ne s’éteignent pas. De cette forme foisonnante émergent des fleurs rares de langage que le lecteur cueille et réunit comme il l’entend dans des bouquets multicolores et sensibles :

« Baignée par la lumière des pétales, elle avait l’impression de danser avec des milliers de soleil. »



Kiyémis est née en région parisienne de parents originaires du Cameroun. Elle est un sacré numéro, une femme « spéciale », si je reprends l’expression utilisée par le père d’Andoun concernant celle qui est pour une partie le double de la grand-mère de Kiyémis dans le récit. En 2017, elle est inscrite en master d'histoire et de sciences politiques à l'Université Paris-VIII. En 2018, elle publie son premier recueil de poèmes, "À nos humanités révoltées". Blogueuse féminisme, engagée dans l’antiracisme et de la lutte contre la grossophobie, "afropéenne qui fait du bruit", elle est une femme très talentueuse, ce premier roman particulièrement attachant le montre amplement qui parvient à donner une si belle floraison à notre littérature. Et, refleurir est un superbe message incitant à continuer de lutter contre la fatalité que seraient les dominations.



J’ai lu ce roman dans le cadre de ma participation au jury Orange du livre 2024. C’est un des livres qui m’ont fortement impressionné. Il pourrait bien être dans la sélection des 5 finalistes le 13 mai prochain ? Réponse le 14 mai...
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Et, refleurir

« A toutes les danseuses, les rêveuses, présentes ou passées, qui méritent d’être illuminées, nous vous construirons, mot par mot, de nouveaux panthéons. » Très bel incipit du livre



Le livre commence dans les années cinquante, le Cameroun est alors une colonie française.



Andoun vit avec sa famille à Nyokon et aller travailler aux champs n’est pas sa tasse de thé « Malgré des années de pratique, elle n’arrivait pas à maîtriser l’outil. Elle tapait à côté, dépouillait les feuilles des plants ». « Andoun, tu n’es pas comme les autres » lui répète son père.



Andoun rêve d’une autre vie, soutenue par son père qui reconnaît en elle un besoin de s’émanciper, elle va chez sa sœur et son mari pour aller à l’école, apprendre. Las, elle sert de bonniche et est refusée à l’école car elle vient avec sa petite nièce bébé… Cela ne se fait pas.



Elle désire toujours apprendre mais une grossesse à seize ans l’oblige à dire adieu, temporairement à ses rêves. Andoun, active, ne se laisse pas aller et devient manucure à domicile. Cela ne lui suffit pas, avec sa fille, elle part à Paris pour une école esthéticienne et pense revenir au pays pour avoir son propre institut.



À Paris, son frère, marié, chez qui elle vit lui pique passeport et économies. encore, projet contrarié. Elle est noire et, voyez-vous, cela ne se fait pas dans une bonne maison d’esthétique. Elle devient donc, ce à quoi les blancs la destine : femme de ménage.



Elle ne baisse pas les bras et fait tout pour que sa fille puisse étudier. Les déboires ne l’empêche pas d’avancer.



Côté mec, ce n’est pas mirobolant. Le père de sa fille la laisse tomber. Elle fuit le mari qu’on lui impose, rembourse la dot. A Paris, son frère veut la caser et, ma foi, elle pense avoir trouver une âme compatissante. Une fois de plus, désillusion. Renaud, qui fait des études d’ingénieur, la laisse avec des loyers impayés. Son bel amant, rencontré lors de son seul retour au Cameroun la prendrait peut-être comme seconde épouse.



Et puis, ne pas oublier d’envoyer de l’argent au pays, sa sœur, veuve



Basta, Andoun décide de vivre seule avec sa fille dans son petit appartement HLM. Andoun, illettrée, a réussi ce qu’elle voulait ; sa fille a fait des études et travaille dans l’administration française. Ses petits-enfants apprécient qu’elle leur raconte son Cameroun.



Que de luttes tout au long de sa vie. Les hommes ne sont pas fiables, la famille veut qu’elle rentre dans le rang et épouse le pêcheur qui sent si mauvais. En France, on l’assigne à ce qu’elle représente, une bonniche invisible et non pas ce qu’elle est.



J’ai aimé la façon dont Kiyémis narre l’histoire de sa grand-mère, j’ai apprécié les poèmes qui scandent l’histoire. Kiyémis raconte la difficulté des immigrés, même légaux, face à un pays dont ils ne connaissent pas les codes. Andoun, femme de courage et de détermination qui a toujours refusé de se plier à des traditions qui veulent l’asservir à un homme, vous êtes un modèle de ténacité, la foie chevillée au corps, malgré toutes les chausse-trappes.



Andoun vous pouvez être fière de votre petite-fille et de vous.



Un très bon livre. « Et, refleurir » figure dans la sélection finale du Prix Orange du Livre en Afrique 2024.




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Je suis votre pire cauchemar !: Un concentr..

Ce livre se lit tres facilement. Quelques très bons passages en côtoient d’autres beaucoup plus faibles. Par moment j'avais l'impression de lire des posts un peu simplistes et bien pensants d'Instagram, et que ça n'allait pas assez en profondeur.

Le mélange des genres entre journal intime et bons conseils m'a assez troublée, j'avais l'impression que ce n'était pas amené avec pertinence.

Certaines phrases étaient extrêmement bien tournée, motivantes avec de belles envolées lyriques, et quelques lignes plus loin c'étaient au contraire des phrases lourdes et pompeuses. L'écriture m'a paru très inégale. Le sujet ô combien important et passionnant mais pas traité aussi profondément que certaines critiques me laissaient présager.
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Plus politisé qu’un hymne au self-love sauce développement personnel, cet essai accessible rappelle combien nos normes esthétiques s’inscrivent dans une histoire sociale du sexisme, du racisme et de la grossophobie.
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J'ai découvert le livre de Kiyémis à la librairie hier et j'ai mordu dedans à pleines dents ! Il est une bouffée d'oxygène, un anti-stress, un réconfort, un apaisement pour moi. Je me retrouve dans son témoignage. J'apprécie son audace, son féminisme sensé, réfléchi, bienveillant mais pas édulcoré.

J'ai lu de nombreux ouvrages sur le thème de l'obésité, du surpoids, etc. et celui-ci restera dans ma bibliothèque !

Merci Kiyémis !
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Petit retour coup de ❤ pour cet essai afro féministe sur la grossophobie... Et plein d'autres sujets en vrai.

On suit les pensées de l'autrice podcadteuse blogueuse militante... Bref d'une femme plus que passionnante, Kiyémis .

Au début j'ai été assez déstabilisée par la forme du livre que je trouvais peu organisée, avec beaucoup d'apports personnels autre que des références scientifiques ou d'autres ouvrages sur le même thème... puis l'idée de suivre une pensée personnelle, comme un podcast avec une forme presque oral un cheminement par thèmes a fini par faire sens👌.

Kiyémis aborde la grossophobie par son parcours, ses réflexions son évolution féministe et afro féministe. Oui, tout l'aspect perso et le fait d'être une femme noire dans une société raciste compte doublement. Elle se livre avec une grande sincérité ne laisse pas sous silence les contradictions les frustrations ce que c'est de se construire comme femme (et femme noire) dans une société tourner sur le regard des hommes et leur validation des femmes comme but ultime. J'ai particulièrement aimé toute la réflexion développée autour du principe de sororité pour deconstruire que cette fausse rivalité, ce faux regard jugeant et toxique qui nous vient de la société. Elle appel à un regard clément une compréhension de l'autre l'accueillir dans ce qu'il est, et deconstruit plein de clichés sur la jalousie et ses raisons. Cela tient en otage tout le monde et j'ai trouvé toute la réflexion vraiment inspirante.

On trouve aussi plein de références de livres, d'autres femmes afro féministes, une réflexion sur ces dernières années dont la pandémie, bref un livre au final court qui frappe par ses pensées et sa volonté d'inciter chacune à un empowerment durable, sororal et multiples. Elle n'oublie pas de parler du validisme de notre société ou des personnes queer... Franchement j'ai peu de critiques à faire.

Offrez le. Offrez vous le. Celleux très deconstruit.e.s informé.e.s y verront peut-être des choses qu'ils connaissent déjà mais reste le récit personnel donc on y trouve son compte.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Un livre anecdotique qui aurait dû rester dans la catégorie "journal intime", de même que les (trop nombreux) poèmes de cette personne. Témoigner, c'est peut-être bien... si c'est bien écrit. Ici, pas d'écriture, juste du verbiage et du "Moi". "Déconstruire" est aujourd'hui le fer de lance de beaucoup de personnes incultes qui, n'ayant pas de socle intellectuel, veulent faire table rase d'un passé qu'ils examinent avec les yeux du sentiment.
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Un ouvrage fort, qui semble à mi-chemin entre l'essai politique et le journal intime (l'intime n'est-il pas politique ?). Kiyémis, en parlant de son enfance où elle cumule deux caractéristiques pour lesquelles la société la stigmatise : le poids et la couleur de peau, vient souffler un vent d'air frais dans le paysage des sorties littéraires françaises.



Avec ce livre, on respire, on déconstruit, on espère aussi. Les lectures qu'elle évoque (bell hooks, Despentes, Audre Lorde etc) sont des lectures que j'ai faites ces derniers mois, et le propos ne résonne alors que davantage.



C'est un témoignage honnête et brillant, qui se fait manifeste pour une vie plus douce, débarrassée des injonctions sur le corps, sa couleur, son poids, sa validité. La fin, sur le ton du "I have a dream" de Martin Luther King, est incroyablement parlante.



Je suis très heureuse de cette lecture.
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Je suis votre pire cauchemar !: Un concentr..

Un essai hyper pertinent, où chacune se retrouvera à un moment donné et avec une fin flamboyante (comme son autrice).

Parfaite lecture pour accompagner celle de Selfie de Jennifer Padjemi

Libérez vous des petites cases et de l'image de la femme parfaite, ou du moins réfléchissez-y
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Je suis votre pire cauchemar !: Un concentr..

Si heureuse de découvrir des ouvrages sur la grossophobie, cette discrimination systémique tellement invisibilisée et intériorisée !



C’est impressionnant à quel point notre société est grossophobe et lire ce genre de livres m’aide tellement.

C’était une très bonne lecture.
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