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Critiques de Agata Tomazic (13)
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Miha, riche banquier qui se vautre dans des restaurants aux menus à multiples zéros,

et son insoutenable désir de batracien,

"Matej, danseur et animateur, enterrements de vies de jeunes filles, anniversaires, fêtes d'entreprise, gay et hétéro, tarifs à débattre", et son insoutenable envie d'un manteau Dolce Gabbana qui coûte la peau des fesses,

Erika et son insoutenable désir de prendre le large,

Elle, et l'insoutenable désir d'avoir une bonne conscience suite à l'acte vil,

La jeune fille et son insoutenable désir de ciel partagé avec les oiseaux,

Le photographe et l' insoutenable désir de coller des photos mentales aux réelles,

Stefan et l'insoutenable désir de la fille aux lèvres de fraise contré par l'insoutenable désir de plaire à maman,

Elle et Lui, et l'insoutenable désir du "Rien",

L'Epouse et La Maîtresse , et l'insoutenable désir de trouver la pièce manquante,

L'insoutenable désir de "l'anémone de mer" pour "le bernard-l'ermite", organismes liés par l'égalité, vivant en symbiose et se facilitant mutuellement l'existence, NON APPLICABLE à l'espèce humaine 😁,

Les petits secrets d'un grand maître de cuisine et son insoutenable désir de mensonges,

La vieille Amalija et son insoutenable désir de vengeance et d'"esprit sain dans un corps sain",

Viktorija et son insoutenable désir d'amour échangé contre " des renards écorchés",



Bienvenue dans le monde loufoque et décalé de l'écrivaine slovène Agata Tomazic ! Treize superbes nouvelles, où tous les personnages flambent de l'insoutenable désir de quelque chose, qui n'est autre que d'exister si non de vivre ! Un bonheur de lecture que je vous invite à partager !



"Dans la vie, il ne faut jamais faire ou subir des choses que l'on ne peut confier à sa coiffeuse ", hé,hé, voilà la leçon 😁!
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Un grand merci à l’amie qui m’a offert ce livre. J’ai passé un très bon moment à lire ces nouvelles hors du commun. Je ne connaissais pas Agata Tomazic mais je peux vous dire qu’elle mérite d’être lue. Ne vous attendez pas à quelque chose de classique. Mais avec le titre, impossible de se dire cela ! Bienvenue dans un monde déjanté où les personnages le sont tout autant ! Cette écrivaine slovène revisite des thèmes connus issus, pour la plupart, du fantastique. C’est fort plaisant, d’autant plus que les critères de la nouvelle sont respectés.



Mais cela ne s’arrête pas là. Il faut lire ces nouvelles à un autre degré. En effet, Agata Tomazic est « la voix » de la Slovénie. Dans tous les récits de ce recueil, nous pouvons retrouver ce petit quelque chose qui la rattache à l’Histoire de son pays.



Bref, j’ai vraiment apprécié la plume de cette écrivaine qui gagne à être connue.
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Les jeunes éditions Belleville ont pris le parti de nous faire voyager avec des auteurs jusqu'alors inconnus chez nous : Turquie, Égypte, Arménie, Moldavie, Croatie ... Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse, premier ouvrage traduit en français de l'écrivaine slovène Agata Tomazic, est un recueil de nouvelles au ton singulier dont le sous-titre, Histoires slovènes délicieusement ordinaires est tout un programme, respecté à la lettre. Ordinaires, oui, car elles racontent des moments de la vie quotidienne de différents personnages, masculins ou féminins, d'âges et de milieux sociaux très différents. Mais ces existences deviennent le fait d'événements surprenants, avec parfois un basculement vers les rives du fantastique comme avec la première nouvelle où un cadre dynamique se transforme peu à peu en ... batracien. Un début kafkaïen mais Agata Tomazic sait varier les tonalités, avec un style délicat et précis, et particulièrement efficace dans le registre de la comédie noire, quand ce n'est pas l'absurde qui s'invite. Ainsi, dans un récit très réjouissant, cette jeune fille qui comprend le langage des oiseaux et le restitue dans toute sa verdeur, au grand dam de son entourage. Certaines nouvelles pourraient sembler bien sombres, car pointant souvent des comportements inhumains dans une société qui l'est également, mais l'auteure y met une belle suavité et une ironie cinglante qui font que oui, effectivement, on peut parler d'histoires délicieuses. Elles donnent en tous cas une irrépressible envie de voir se confronter Agata Tomazic à l'épreuve du roman.



Mes remerciements aux éditions Belleville pour l'envoi de ce livre.
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

En une série d'histoires du quotidien qui semblent d'abord terriblement banales, mais que l'on ne peut malgré tout raconter à sa coiffeuse - et cela, c'est le dénouement qui nous le prouve presque à tous les coups -, Agata Tomažič transfigure la Slovénie en un monde étrangement poétique, tantôt corrosif, qui dénonce des situations on ne peut plus graves, comme par exemple les violences conjugales, ou encore le racisme, tantôt triviales et particulièrement décalées, en un monde qui prête, dans tous les cas, à rire jaune.



En cette transfiguration poétique du quotidien slovène, les portraits des personnages, plus encore que la situation à laquelle ils font face, sont centraux, et remarquables de véracité, de lucidité, de cruelle réalité, en une brièveté qui fait particulièrement mouche.



Une excellente découverte que ces nouvelles slovènes. Je vais de ce pas me procurer d'autres œuvres de l'autrice.
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Frapper le ciel

Après son brillant recueil de nouvelles, Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse, les excellentes éditions Tropismes nous offrent un nouvel aspect du talent de l'écrivaine slovène Agata Tomažič avec un roman paru en 2016 dans son pays, Frapper le ciel. A travers deux personnages, dont on suit les faits et gestes, en parallèle, l'autrice décrit un monde qu'elle connaît d'expérience, celui des journaux écrits, dont l'influence ne cesse de se réduire comme peau de chagrin. Ces deux protagonistes semblent a priori très opposés dans leurs évolution professionnelles : l'un est le rédacteur en chef usé d'un support quotidien de Ljubljana à bout de souffle ; l'autre, également d'origine slovène, s'est adapté à la vie américaine et a construit sa fortune dans la Silicon Valley, Mais de fait, ils se ressemblent beaucoup, handicapés sur le plan des relations humaines et incapables d'aimer ou de se faire aimer. Agata Tomažič les décrit avec une précision d'entomologiste, perçant leurs pensées les plus intimes sans une once de bienveillance. Le roman a un aspect de comédie noire mais sa structure est rigide et quelque peu austère, avec une quasi absence de dialogues et, en revanche, un excès de métaphores. Le sentiment d'une petite déception après ses nouvelles est en partie gommé par l'impression que l'autrice est capable d'écrire dans des styles très différents, selon le sujet abordé. Rendez-vous est pris pour un prochain ouvrage.
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Frapper le ciel

D'abord il y a Metod. Rédacteur en chef d'un quotidien Slovène, reclu dans le confort que lui offre son titre, il s'évertue à se tenir loin des émotions qui pourraient l'assaillir. Les mots il les aime comme il aime les gens. Ordonnés, dociles, justes, et surtout à distance. Le journalisme, c'est les faits, le bon agencement, la bonne orthographe.

Mais dans son enceinte de certitudes, une fissure lézarde. Le nouveau monde l'ébranle. La presse écrite crie son obsolescence. L'avenir ressemble à un trou noir prêt à l'aspirer jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien de lui.



Et puis il y a Ožbej dont on découvre la jeunesse enragée. Pour lui, c'est le passé qui est obscur, l'avenir qui est plein de promesses. Les chiffres, les algorithmes, les nouvelles technologies, il s'en empare comme on s'accroche à une bouée. Ses angoisses semblent s'estomper au fur et à mesure qu'il s'éloigne de ce qu'il connaît : sa terre natale, la Slovénie, sa langue, qu'il délaisse pour l'anglais de la Silicon Valley... Seule ombre au tableau son nom, cet accent sur le z qui trahit tout ce qu'il a fuit.



C'est l'histoire d'un homme de lettres sans avenir et d'un homme de chiffres sans passé. D'une course à l'information qui va trop vite mais qui, peut-être, n'arrive nulle part. Et les mots dans tout ça ? Ils ironisent de ces silences, s'amusent de ces solitudes, à l'abri des protagonistes ils nous font des clins d'œil malicieux et nous nous laissons prendre à cette comédie humaine où les héros ne sont pas forcément ceux que l'on voit.



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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

L’enfance d’Agata Tomazic a été marquée par l’effondrement de la Yougoslavie. Elle en gardera une méfiance pour toute forme d’autorité. Féministe et engagée, elle est aujourd’hui une des voix littéraires de la Slovénie.



« Dans la vie, il ne faut jamais faire ou subir des choses que l’on ne peut confier à sa coiffeuse. »



Mais, à nous lecteurs, Agata Tomazic va nous les confier.



Avec ce recueil de treize nouvelles, elle campe d’étranges personnages, à la fois très ordinaires et étonnants. Un homme d’affaires ou de spectacle, des hommes ou femmes mariés, infidèles ou insatisfaits, une veuve, une fillette, un photographe, un génie des mathématiques, des anciens amis d’enfance, une grand-mère acariâtre. Des êtres normaux plongés dans les péripéties du quotidien qui finalement révèlent leur côté sombre ou prennent parfois un détour fantastique. Le bon père de famille ou la veuve éplorée se font assassins. La vieille grand-mère égoïste malade pousse le vice jusqu’à compromettre son sauveur.



Toute forme d’autorité, pouvoir, argent, parents, mari est ici bousculée. La première nouvelle commence avec l’arrogance d’un financier et le recueil se termine avec l’égoïsme incurable d’un mari. Même ces parents aimants briment leur progéniture comme ce génie des mathématiques ou cette jeune femme qui a l’impression qu’elle ne peut qu’échouer face au bonheur de ses parents.



Seuls le ton, quelques noms de lieux et de brèves allusions à la rancoeur de familles bourgeoises ayant perdu leur statut à la fin de la seconde guerre mondiale teintent ce recueil de couleurs slovènes. C’est bien là mon seul regret.



Les nouvelles sont particulièrement bien rédigées ménageant rebondissements et parfois une chute astucieuse, notamment pour la nouvelle intitulée La pièce manquante. L’auteur capte l’intérêt de son lecteur avec des personnages remarquables, une touche d’ironie, d’humour ou d’illusion.


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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Le mois de la nouvelle commence pour moi sous d'excellents auspices, ce recueil slovène m'ayant fait passer un moment délicieux !

On y croise, issus de divers milieux sociaux, des hommes et des femmes, des jeunes et des vieux. Des quidams ordinaires, acteurs d'existences a priori banals auxquelles Agata Tomažič fait prendre d'imprévisibles virages, dont elle tire prétexte pour révéler les perversions et les névroses tapies sous des dehors policés.



Elle y explore, de l’adultère au meurtre, les manifestations discrètes ou excessives du mensonge et de la cruauté, s’intéresse à l’emprise et à la manipulation, celles d'une mère toxique condamnant son fils à une éternelle solitude ou d'un amant pathologiquement possessif.



Elle décline la palette des obsessions qu’éveillent les valeurs d’une société tournée vers la possession, l’entretien d’une image incessamment perfectible selon des critères toujours plus superficiels et plus difficiles à atteindre, le besoin frénétique de contrôle, de l’autre comme de soi-même, de son environnement et de sa vie. Nous découvrons ainsi les extrémités auxquelles en sont réduits certains -mensonge, oubli de soi- pour assurer le train de vie de leur famille, ce à quoi d’autres se soumettent pour assouvir ce qu’ils croient être le rêve d’une vie, et qui se réduit à posséder un manteau en poils de chameau ou en fourrure de renard.



Nous entendons aussi les souffrances qui naissent de ces contraintes de normalité que l’on s’impose, les concessions faites aux dépens de sa propre intégrité ou d’un bonheur dont est devenu incapable d’identifier les contours, la peur du vide et silence que l’on comble à coup de vains bavardages, ou d’une conjugalité forcée.



D’autres font, en conscience ou poussés par un instinct de survie qui les domine, le pas de côté qui les sort de ces engrenages délétères, rompant avec la mécanique mortifère de la routine, le protocoles absurdes et uniformes qui régissent nos vies, en tournant le dos et s’éloignant d’une porte que l’on vient de fermer, ou de manière plus extraordinaire et radicale, en retrouvent littéralement une vie animale qui se révèle être la seule source possible de réconfort et d’épanouissement.



Avec beaucoup d’habileté, se renouvelant à chaque texte, Agata Tomažič nous livre des contes modernes dans lesquels elle déploie autant de férocité à traquer les travers que dissimulent les dehors de nos apparences policées qu’elle exprime sa tendresse (sans toutefois les ménager) pour ceux qui s’y fourvoient. Tantôt réalistes et tantôt traversées d’éléments incongrus voire surnaturels, tristes ou grinçantes, ironiques ou désespérées, les nouvelles de "Ce que l’on ne peut confier à sa coiffeuse" ont comme point commun d’être empreintes d’un humour décalé qui leur confère une tonalité singulière.




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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Le recueil porte le sous-titre « Histoires slovènes délicieusement ordinaires » et c’est avec le mot « ordinaire » que je vais commencer. Parce que, qu’y a-t-il d’ordinaire chez Miha Jakončič, ce répugnant personnage de la première nouvelle intitulée « Le roi grenouille » ? A première vue, oui, il est bien ordinaire dans sa vulgarité, son ostentation, son mépris de tous les gens qui l’entourent. Seulement, il y a cette mouche qui lui tourne autour au restaurant, et qu’il finit par happer sans que les autres convives s’en aperçoivent.



Elle disparut en un clin d’œil.



Evidemment, il est plutôt curieux qu’un homme jeune, en bonne santé, à qui l’image qu’il projette importe beaucoup, gobe une mouche en plein dîner d’affaires ; mais ce ne sera pas le seul élément curieux de cette nouvelle courte, saugrenue et qui semble pouvoir se lire sans arrière-pensée.

-- Retrouvez toute ma chronique sur le lien ci-dessous --
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

C’est un titre plutôt curieux que voilà, dédié à ces nouvelles de cette auteure slovène, Agata Tomažič. N’hésitez pas à aller lire cet article des Éditions Belleville, dans lequel cette dernière parle de son pays. Vous pourrez d’ailleurs y télécharger deux des nouvelles présentées Le Balcon et Peu réjouissantes prévisions, le premier récit étant l’un de mes préférés du recueil. L’illustratrice est , vous pouvez retrouver également une Storytelling la concernant sur le site des Éditions Belleville. La première nouvelle Le Roi Grenouille est au moins aussi curieuse et a toutes les allures d’un conte pour enfant. Elle reste pour moi la plus curieuse de tout le recueil. Mais, pour un peu que nous nous mettons à chercher un peu plus avant, on comprendra que la dimension allégorique de la métamorphose de cet homme en grenouille pour goûter à la joie de croasser librement dans le marais du coin, en révèlent beaucoup plus sur les influences, ou plutôt les sources d’inspiration de notre auteure issue de ce pays disparu, qui a implosé sous la pression de ses conflits ethniques.





J’évoquais précédemment le terme de contes mais nous n’en sommes pas si loin. Des contes modernes, qui s’ancrent dans cette réalité fin de siècle, désenchantée, désabusée, et qui sont par conséquents le reflet d’une forte désillusion générale et individuelle de l’homme qui n’aspire plus qu’à retourner à l’innocence originelle animale. Agata Tomažič slovène dresse un constat d’échec clair et retentissant, pas de doute à avoir, mais tout son art est d’y avoir mis suffisamment les formes pour que la critique ne prenne pas le dessus sur ces drôles d’histoires, qui se lisent d’un trait. Au fur et à mesure des nouvelles, se dévoile ce besoin impérieux de ces non-héros, qui étouffent dans la place qui est la leur, et finissent par se libérer de ces liens qui les rattachent à une prison invisible. Histoires de libertés retrouvées, d’êtres qui trouvent le courage d’écouter (ou pas) cette voix intérieure qui les poussent à la révolte. Qui n’a pas de retour, évidemment.



Au sein même de cette toute nouvelle société slovène, Agata Tomažič dessine la femme et l’homme, chacun dans leur rôle, qui pèse quelquefois un peu trop lourd sur leurs épaules. Et dans quelques-unes de ces récits l’homme reste au centre des courts récits d’Agata, et il n’est pas épargné! Une fois n’est pas coutume, la femme n’est pas uniquement celle qui incarne la futilité et la légèreté, celle dont la moquerie ne fonctionne plus tellement le cliché a été usé par la plume d’autres écrivains. Ce n’est pas elle qui apparaît comme la potiche écervelée car elle a la malchance d’être coquette. C’est son congénère masculin, et les uns et les autres retrouvent un semblant d’égalité. L’auteure procède à une sorte de déconstruction de l’importance du rôle de l’homme dans la vie de la femme, à travers elle, la femme retrouve sa liberté et son indépendance, l’homme obstacle ou simple moyen pour la femme de s’émanciper d’un joug illicite, d’un parasitisme tellement encombrant. La nouvelle La pièce manquante met en face les deux femmes, épouse et maitresse, d’un homme, menteur et manipulateur. L’auteure ne dit jamais ce qu’il faut faire, elle ne fait que montrer et suggérer cette autre voie. La vie a tant d’autres choses à montrer, que l’attachement presque pathologique à un seul homme apparaît comme un handicap existentiel. J’ai beaucoup aimé lire les nouvelles d’Agata Tomažič, qui se sert de son engagement féministe pour fabriquer sa voix d’écrivain, ou peut -être est-ce l’inverse. Elle décortique les liens, je parlerais davantage de rapports de force, qui les unissent, met en relief les contradictions qui les régissent, invitant sa lectrice, et son lecteur aussi je l’espère, à réfléchir sur les rapports qui régissent hommes et femmes. Le quotidien est finalement un matériau littéraire inusable, dérision dans la tragédie, sarcasme dans la gravité, d’autant plus si les rapports des deux sexes tendent à évoluer.





Une galerie d’histoires, de personnages qui n’ont pas grand-chose en commun si ce n’est de vivre dans ce tout nouveau pays qu’est la Slovénie, tous mus par une propension ou une impossibilité à se libérer d’un joug qu’ils finissent pas éprouver comme tyrannique. Que ce soit leur propre corps, la mère, le mari, leur famille. L’auteure slovène a capturé des instants de vie, qu’ils se comptent en minutes, en heures, en jours, pour retranscrire cette sensation intense de délivrance, qu’ils ressentent et vivement tous différemment, à travers plaisir ou culpabilité de la transgression, soulagement. Comme un interlude de liberté, pour certains, dans leur vie, cette bouffée d’oxygène qu’ils inspirent à grands poumons et qu’ils stockent pour reprendre leur vie. Pour d’autres, c’est définitif et pour d’autres, encore, c’est une impasse.



J’ai ressenti certaines influences d’Agata Tomažič. La première nouvelle m’a fortement marquée, je crois qu’on ne peut pas ne pas nommer Kafka dans cette image d’homme qui se transforme en grenouille ou encore à Nicolas Gogol lors de la deuxième nouvelle Le Manteau. Même s’il n’est pas question d’une vieille pelisse mais d’un très moderne pièce Dolce et Gabbana parfait pour ce fringant jeune homme de ce début de XXIe siècle qui craint moins le froid que l’indifférence de ses pairs. Transparait aussi cette envie à retourner à un état naturel, une sérénité que seuls la nature et le monde animal peuvent accorder. Que ce soit par les grenouilles, les oiseaux, les chiens, la renouée du Japon, ou ces renards écorchés, il apparaît que c’est peut-être indirectement un appel à un retour à la simplicité.



J’ai eu un coup de cœur pour ce recueil d’une Slovénie ordinaire, mais diverse, libre, et féminine. Ma nouvelle préférée? Ne pouvant choisir, je citerais Une pièce manquante, sorte de dialogue indirecte entre l’épouse et la maîtresse, Le manteau et Le balcon. La dernière fois que je suis littérairement allée en Slovénie c’était, en temps de guerre, la deuxième, la patriotique, par le biais de Drago Jancar et de son extraordinaire Cette nuit, je l’ai vue. Ici, le pays a retrouvé une certaine quiétude, cela se ressent à travers ces courts textes, même si les enjeux sont différents. Peut-être celui de retrouver une indépendance totale et sans concession, nationale et individuelle, malgré une mondialisation qui pèse toujours plus sur le pays. Ce recueil d’Agata Tomažič est une belle porte d’entrée sur ce petit mais magnifique pays, celui qui s’en est peut-être le mieux sorti de l’éclatement de la fédération yougoslave.
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Ce que l'on ne peut confier à sa coiffeuse

Un merveilleux recueil de nouvelles écrites par Agata Tomazic, une journaliste slovène. Je suis très heureuse de découvrir de nouveaux auteurs avec un style et un texte merveilleux.



Une fois de plus, je suis convaincue que j'ai évité en vain la prose courte, car parmi des nouvelles et des récits il y a souvent de vraies perles.



Le recueil comprend 13 nouvelles qui sont cousues sur le même thème: c’est à dire l'Homme et ses Désirs (presque maniaques). Au fil des pages, je suis tombée sur des personnages vraiment merveilleux en lesquels on se voit tantôt soi-même, tantôt un voisin, mais toujours un homme assoiffé et volontaire. Bien sûr, c’est très intéressant, car ce sont souvent nos rêves qui nous déterminent et notre chemin de vie.



Le plus mémorable est la nouvelle "Le roi grenouille" qui raconte l'histoire d'un personnage complètement repoussant nommé Micah, qui finit par se transformer en crapaud, et sa couronne dentaire en or commença désormais à couronner sa tête de grenouille complètement lisse. Encore une très bonne nouvelle sur le manteau Dolce & Gabbana "Le manteau", où un jeune fashionista gay est prêt à tout absolument pour posséder cet objet et ne jure même que sur lui.





En général, toutes les nouvelles sont bonnes ! Chacune contient un morceau de Slovénie et de ses habitants, leurs voix, leur mentalité et leur appel à regarder autour, à profiter des choses simples et à être attentifs les uns aux autres.
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Frapper le ciel

Il est rare de tomber sur un ouvrage de littérature slovène contemporaine, alors lorsqu’on en trouve, c’est avec plaisir qu’on la lit : il s’agit d’un titre de la rentrée littéraire de Tropismes Éditions, d’une autrice qu’ils ont déjà publiée par le passé, Agata Tomažič et dont j’ai pu lire le titre précédemment traduit, publié sous l’ancien nom de la maison, Belleville Éditions, Ce que l’on ne peut confier à sa coiffeuse, qui réunissait 13 nouvelles. On retrouve l’autrice ici avec un roman à deux voix, dans lequel la Slovénie est toujours présente, au premier plan ou en arrière-plan, s’incarnant dans les racines des deux personnages, deux hommes séparés par une vingtaine d’année, et qui se partagent le récit.



Il y a d’abord Metod Devetak, la cinquantaine passée, rédacteur en chef d’un quotidien américain, totalement désabusé, surtout depuis que son journal a été racheté par une entreprise. Précisément celle de Ožbej, une vingtaine d’années plus jeune, qui a réussi dans la vie en tant que geek invétéré, développeur d’une application à succès. L’un et l’autre sont originaires de Slovénie et sont venus chercher un avenir à leur avenir professionnel aux Etats-Unis, l’un et l’autre vont se rencontrer pour la première fois à l’occasion de cet achat-vente, les deux hommes vont se remémorera leur passé, leur enfance, l’une comme l’autre, passée en l’absence de tout géniteur. Beaucoup de similitudes entre les deux hommes pourtant, ils se placent à l’opposé l’un de l’autre, l’aîné travaille à l’ancienne dans la rédaction de journaux imprimés, l’autre dans le numérique et ses nouvelles technologies. Deux représentants de deux mondes qui se succèdent l’un à l’autre, deux symboles puissants de ce qui se joue. Cette bataille fratricide se joue entre l’ancien et le nouveau monde, et également du point de vue géographie et temporel, la Slovénie, tout comme tant d’autres pays d’Europe, semble pour ces exilés n’avoir guère plus d’arguments pour un avenir à leur proposer : tout se joue aux Etats-Unis.



À travers Metod c’est le sentiment de l’exilé, qui sait qu’il n’est plus à la page et est sur le point d’être débarqué, mis au ban, au placard, cette peur saute aux yeux du lecteur en ouvrant le récit par la contemplation du Pakistanais qui vend les journaux pour les sans-abris. Ožbej, c’est l’exemple parfait du self-made man à l’américaine, le jeune informaticien brillant qui réussit par lui-même, un Mark Zuckerberg slave, forcément bien intégré puisqu’il apporte succès et argent, à la Silicon Valley, bien loin du « seul pays au monde où l’on réussirait à écrire son nom sans faute : Ožbej Ključevšek. ». À vrai dire, c’est aussi in fine une critique sur l’uniformisation, où les accents inhérents aux langues indo-européennes deviennent une chose désuète, une uniformisation progressive sociale qui va de paire avec les technologies qui évoluent et effacent peu à peu tout caractère, toute personnalité à la vie quotidienne, où les journaux papiers n’y ont plus leur place face à l’efficience du numérique, qui pixelise les images, la réalité, la réduisant en de petits carrés insignifiants et flous, et inconsistants. L’assaut d’une société pixelisée.



Deux conceptions du présent et de l’avenir se disputent ici à travers le face-à-face des deux hommes que le texte met en face, la perspective à la Robert Musil de Metod l’homme sans qualité face à l’homme qui pourrait être son fils, un ancien hacker, idéaliste, persuadé de pouvoir rétablir un équilibre entre dominants et dominés. L’une des choses qu’ils ont en commun, c’est du haut de leur tour, de son bureau au dernier étage pour l’un, de son isolement dans sa tour d’ivoire pour l’autre, d’avoir atteint le ciel, où il n’y a plus rien après, englué dans une inexistence solitaire, dénuée de tout sentiment et sensation, dans un nuage d’atonie rendue plus épaisse avec le temps. Avec un monde qui a tout poli, tout effacé, jusqu’aux accents des noms, tout impersonnalisé à l’extrême, depuis l’inanité des applications dématérialisées sur des serveurs fantômes, dont son journal va devenir partie prenante.



La narration est bien menée et vous surprendra probablement dans son dernier quart, donnant ainsi encore un peu plus de reliefs qu’à une simple critique sociétale plaquée sur l’histoire croisée de deux Slovènes exilés aux Etats-Unis : un retournement de situation qui permet de rétrospectivement considérer les deux récits d’un autre angle, et lui redonner un aspect plus humain, que je vous laisse découvrir.
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Frapper le ciel



Ožbej, sans père connu et une mère qui l'a laissé aux bons soins de ses grands-parents, réussit à la Silicon Valley et devient millionnaire.



Il décide de rentrer chez lui en Slovénie. 



Metod, rédacteur en chef, n'est plus à la page, vieillissant comme le quotidien pour lequel il travaille. Il ne comprend  les changements apportés par les nouvelles technologies et encore moins tous ces jeunes qui travaillent avec lui. Le journal perd de la vitesse,  les ventes baissent. 



Le jeune Ožbej se tourne vers l'avenir,  le vieux Metod regarde le passé.



Ožbej vient à la rencontre de ce rédacteur en chef.



Quelles sont ses réelles intentions en faisant un énorme donation au journal ?  Se venger de son père ? l'humilier ou le connaître enfin tout simplement ? 



En parcourant ce roman, on découvre parallèlement Ožbej et Metod, deux hommes bien différents  J'avoue que je n'ai pas vu tout de suite le lien entre eux. 



Au-delà de tout cela, ce sont les nouvelles technologies et la rapidité avec laquelle les habitudes ont changé face aux journaux et le journalisme lui-même qui sont pointés du doigt par l'auteur. Les médias ont perdu de vue leur mission première, l'information. 

Ils sont rachetés par des gens qui n'y connaissent rien. 



Tout se passe derrière un écran aujourd'hui et c'est regrettable de toujours regarder le monde par la fenêtre de son ordi, son mobile ou son ipad. C'est comme si on portait toujours des lunettes. 

Le monde avance, certains perdent de la vitesse, d'autres vivent avec leur temps. Mais ne perdons pas de vue l'essentiel. 







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