Citations de Alexandre des Isnards (40)
Dans Huis clos, les personnages sont condamnés à « vivre les yeux ouverts ». En open space, les consultants doivent « vivre à visage et écran ouverts ». Tout le monde peut passer vérifier si vous êtes heureux, si vous dormez, soupirez, riez... « Détection de sourire », comme dit la pub pour Canon. Smileys sur son MSN. « Put a smile on your face and you ass on facebook. » Les moins adaptés au jeu du je-t'observe-mais-ne-te-juge-pas-mais-en-fait-si-je te-juge sont vite repérés.
Finalement, ce livre raconte tout ce que les jeunes cadres savent mais qu'ils taisent et donc que les autres ignorent : les nouvelles formes de violence, le diktat de la bonne humeur et de la convivialité, la fausse liberté qu'offre la flexibilité, le supplice du timesheet, la folie de l'évaluation et de l'autoévalation, le manque de reconnaissance etc.
Bref, l'envers du décor de ce néomanagement qui avait tout pour plaire mais qui, à l'usage, ne consiste qu'à rendre cool cette réalité : nous sommes tous des ressources interchangeables.
Très important. Solliciter l’acceptation de l’évalué pour qu’il soit responsable de ses objectifs.
Vive la dictature du bonheur ! Un impératif : s’éclater dans son boulot. Un interdit : se plaindre… Au risque de passer pour un révolutionnaire.
Ça se joue au mental. Conserver la maîtrise de soi, ne pas communiquer son stress. Jamais le travail n’aura été aussi dépendant du facteur psychologique.
Ces expressions antithétiques cachent chez lui la peur de l’incompétence.
La comédie humaine a toujours existé au sein de l’entreprise. Vous y trouverez les affairés et ceux qui font semblant de l’être. Ceux qui pensent que leur travail va être reconnu de lui-même. Il y aura toujours les flatteurs qui veulent attirer l’attention des dirigeants et les frondeurs qui méprisent la hiérarchie. Mais la comédie humaine a de nouveaux codes et la première des choses à apprendre quand vous arrivez dans l’open space, c’est... d’avoir l’air toujours débordé.
Les dirigeants peuvent bien pester contre cette génération qui a perdu la valeur travail et ne pensent qu’à leur vie privée, ils oublient juste une chose ; cette attitude n’est pas une cause mais une conséquence.
Impossible de critiquer dans l’open space sans passer pour des syndicalistes ou des révolutionnaires : c’est la dictature de la positive attitude.
Accessible (tutoiement), ouvert (open-space), le nouveau management joue sur un registre plus intime, plus participatif. De l'extérieur; cela donne envie. De l'intérieur, on se rend compte que rien n'a changé : sur fond d'imposture, d'attaques personnelles et de dictature du bonheur, les rapports sont violents et les hiérarchies bien présentes.
S'épanouir dans son boulot...Bel objectif. C'est vrai. Mais si on n'y arrive pas, on veut juste ne pas être forcé de le faire croire.
“Vous l’avez compris, Isabelle fait partie des “crack-berries”, ces personnes accros aux vibrations des e-mails, comme drogués de l’info plantés devant LCI à mater le tsunami en boucle. Bref on peut avoir un BlackBerry… si on sait l’éteindre”
Vive la dictature du bonheur ! Un impératif : s'éclater dans son boulot. Un interdit : se plaindre... au risque de passer pour un révolutionnaire. "On n'est pas des fonctionnaires ! " Non, nous sommes des jeunes cadres dynamiques jugés sur leurs capacité à s'adapter, avec le sourire, au changement "permanent et inéluctable".
Downsizing : On ne dit plus "réduction des effectifs", on dit Downsizing . Certains, mal élevés ou gauchistes, s'obstinent à utiliser le mot "licenciement".
En open space, les salariés sont mis en concurrence. Par le regard, ils se régulent les uns les autres. Mais de petites solidarités locales viennent casser le jeu de la concurrence pure et parfaite. Les camaraderie endorment la surveillance entre voisins et ça se relâche. Alors, pour réintroduire de l'émulation saine, on brasse, on ventile, on redistribue les cartes par un déménagement interne.
Fin de journée, c'est parti pour le ballet des contorsionnistes. On commence à s'observer pour voir qui sort le premier. C'est normal de partir. Mais quand ? Un cadre ne compte pas ses heures.
L'open space ressemble à un petit village où les petits vieux observent ce qui se passent à travers des persiennes. Les petits vieux, ce sont les Vincent, Guillaume, Sonia and Co, des consultants ni langue de pute ni délateurs, mais des personnes qui jugent. Tout le monde surveille tout le monde. Tout le monde s'entend, se voit, s'épie. Des bruits de couloir, des rumeurs, des réputations se construisent peu à peu.
A longueur de journée, les open space résonnent de : "Il faut y aller ! Il faut mettre le paquet !", "Va falloir se booster !", "On va les déchirer !", "On va être les meilleurs !".
Ouais, c'est ça ! Allons-y ! Jusqu'ici, nous voulions tous être médiocres. On est vraiment cons. Merci,Seigneur, de nous avoir apporté l'énergie et la lumière qui nous manquaient.
S'épanouir dans son boulot...bel objectif, c'est vrai. Mais si on n'y arrive pas, on veut juste ne pas être forcé de le faire croire.
La comédie humaine a toujours existé au sein de l’entreprise. Vous y trouverez les affairés et ceux qui font semble de l’être.