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Vous êtes vous déjà demandé ce qu'était un mendiant ? Qui étaient les mendiants ? Un grand livre explore cette question encore trop souvent tabou...
« La Grève des bàttu » d'Aminata Sow Fall, c'est à lire en poche chez Points Seuil.
L a fortune n'a pas de domicile fixe, Dieu ne l'a pas attribuée d'une manière définitive. Il ne fait que la prêter
......l’imaginaire est mille et mille fois plus vaste que tous les livres de sciences et mathématiques. Deux et deux font quatre : pas d’autre issue possible.
Nous parlions « Mensonge ! » Oui, l’Art dans toutes ses expressions est mensonge ! Mensonge sublime, qui nous sauve.
Arrêtez donc de nous abreuver de ce slogan du tout mathématiques, tout science, tout économie. D’ailleurs, le tout économie a rendu le monde fou, fou, fou !
L’Art est mensonge, oui ! Le seul mensonge qui peut nous guérir, un puissant neutralisant contre les haines, les hostilités, la crétinisation.
Il paraissait avoir beaucoup plus que ses trente hivernages, tant tout son être dégageait un air de pureté de sainteté même, que l'on ne décèle d'habitude que chez des hommes ayant déroulé une longue bobine de vie consommée dans le bien et dans les prières. De tels hommes, forts de la plénitude morale qui les habite, semblent appartenir à un autre monde.
Les rangées de perles toutes blanches qui ornent ses reins sous un beeco immaculé et que les femmes d'aujord'hui dédaignent en ignorant qu'elles abandonnent ainsi une bonne dose de leur sel
Ce matin encore le journal en a parlé ; ces mendiants, ces talibés, ces lépreux, ces diminués physiques, ces loques, constituent des encombrements humains. Il faut débarrasser la Ville de ces hommes - ombres d'hommes plutôt - déchets humains, qui vous assaillent et vous agressent partout et n'importe quand.
(incipit)
La fortune n'a pas de domicile fixe,Dieu ne l'a pas attribuée d'une manière définitive. Il ne fait que la prêter
Diattou, la mère, travaille à la maternité et veut quitter la ville pour éloigner son fils de ce qu’elle estime être de mauvaises influences :
La maternité. Quitter à tout prix la maternité. Elle n’a plus la noblesse et la splendeur d’une source de vie. Elle est hantée par les forces du mal et par la calomnie. Elle est le désastre et le chaos. Le vent sec et chaud de l’harmattan y draine des relents de ruine. Maudite maternité. L’employé des voiries n’y passe plus. « A-t-il peur que je lui dérobe son âme ? » Les toiles d’araignées recouvrent les murs d’un voile lugubre. Les feuilles de bentenier forment un tapis très épais et s’amoncellent sur le gazon desséché. Le soleil les a grillées… leur crissement, sous ses pas, lui donnent le vertige. « Voilà où peut mener ce complot social que j’ai toujours détesté. Guidé par l’aveuglement de l’instinct plutôt que par la lumière de la raison. Mais alors la raison, quelle force a-t-elle si elle ne peut pas balayer ces croyances et ces mythes fondés sur rien ? Si elle ne peut pas tout ramener à la rigueur mathématique, quel est son intérêt ? Me voici victime de ces pressions collectives, haïes et combattues. Quelle aberration ! »
Le souvenir du village l’a assailli sous la forme d’une pieuvre. Elle a résisté et s’est contracté la gorge, comme on si on lui demandait de revenir à ses vomissures.
A son retour d’Occident, lorsqu’elle était partie pour récupérer son fils Nalla, elle avait débarqué en mini-jupe. Son accoutrement et ses cheveux coupés ras avaient scandalisé les villageois. La stupeur n’était pas encore passé qu’elle osa se promener dehors en pantalon, cigarette au coin des lèvres. Les villageois, en observant ses fesses en forme de calebasses moulées dans le pantalon et en les voyant rebondir lorsqu’elle marchait, avaient pensé que Diattou leur jouait une scène de dérision. Mais ils n’en avaient pas ri. Une profonde secousse les avait ébranlés et en premier lieu, Mame Fari.
- Diattou, as-tu tout ton esprit ? avait demandé sa mère.
Ses éclats de rire avaient résonné dans le ventre de Mame Fari comme une insolence. Elle n’avait pas perçu l’horreur que montrait le visage de sa mère.
- Bien sûr que j’ai tout mon esprit ! Pourquoi tu me le demandes ?
- Ta mise est indécente, ma fille… que diront les gens ?
- Mais, ils n’ont rien à dire ! Ce que je fais ne les regarde pas. Est-ce que je me mêle de leurs affaires ?
- C’est notre tradition de nous regarder et de noue redresser mutuellement, ma fille.
- Le monde n’est plus ce qu’il était hier. Personne ne peut arrêter le progrès. Il faut vivre dans son siècle, sous peine de s’éteindre. Notre siècle, c’est celui du progrès et de la liberté.
Mame Fari n’avait pas eu le courage de rapporter cette conversation. Elle avait senti que la colère grondait dans les cœurs. Et aussi l’indignation. Le conseil des anciens avait été réuni.
- Je ne vous appartient pas, avait dit Diattou, sans pudeur et sans le moindre respect
pour ces braves laboureurs aux mains calleuses et à la barbe blanche. Vous n’êtes ni mon père ni ma mère, vous n’avez donc pas à vous mêler de mes affaires. Je suis grande maintenant. Je suis majeure. Je peux disposer de ma personne comme je l’entends. Personne n’est mon tuteur.
- Le diable sera ton tuteur, avait dit le vieux Madiodio courbé sous ses
quatre-vingt-treize ans.
Il symbolisait la dictature aux yeux de Diattou. Il l’exaspérait.
Le lendemain de cette fameuse réunion, elle s’était embarqué avec Nalla pour la capitale.
Un regard d'enfant ne s'éteint jamais
La fortune n 'a pas de domicile fixe , Dieu ne l 'a pas attribuée d 'une manière définitive . Il ne fait que la prêter .
Celui qui a besoin du bien d'autrui doit satisfaire jusqu'à ses caprices