Citations de Antonin Artaud (994)
LE RETOUR D'ARTAUD LE MÖMÖ
L’esprit ancré
vissé en moi par la poussée psycho-lubrique du ciel est celui qui pense toute tentation, tout désir, toute inhibition.
O dédi
A dada orzoura
O dou zoura
Adada skizi
O Kaya
O Kaya ponoura
O ponoura
A pona
Poni
C’est la toile d’araignée pentrale, la poile onoure d’ou-ou la voile, la plaque anale d’anavou
(Tu ne lui enlèves rien, dieu parce que c’est moi tu ne m’as jamais rien enlevé de cet ordre, je l’écris ici pour la première fois, je le trouve pour la première fois)
Non la membrane de la voûte non le membre omis de ce foutre, d’une déprédation issu
Mais une carne, hors membrane hors de là ou c’est dur ou mou
Ja passée par le dur et mou,
étendue cette carne en paume, tirée, tendue comme une paume de main exsangue de se tenir raide, noir, violette de tendre au mou.
Mais quoi donc à la fin, toi le fou ?
Moi ?
Cette langue entre quatre gencives,
Cette viande entre deux genoux, ce morceau de trou pour les fous.
Mais justement pas pour les fous, pour les honnêtes, que rabote un délire à rôter partout, et qui de ce rôt firent la feuille,
Écoutez bien :
firent la feuille du début des générations, dans la came palmée de mes trous,
à moi.
Lesquels, et de quoi ces trous ?
d’âme, d’esprit, de moi, et d’être ;
mais à la place où l’on s’en fout, père, mère, Artaud et itou.
Dans l’humus de la trame à roues, dans l’humus soufflant de la trame de ce vide, entre dur et mou
Noir et violet, raide pleutre et c’est tout.
Ce qui veut dire qu’il y a un os, où
dieu s’est mis sur le poète, pour lui saccager l’ingestion de ses vers, tels des pets de tête qu’il lui soutire par le con, qu’il lui soutirerait du fond des âges, jusqu’au fond de son trou de con, et ce n’est pas un tour de con qu’il lui joue de cette manière, c’est le tour de toute la terre contre qui a des couilles au con.
Et si on ne comprend pas l’image,
— et c’est ce que je vous entends dire en rond, que vous ne comprenez pas l’image qui est au fond de mon trou de con, —
c’est que vous ignorez le fond non pas des choses, mais de mon con
à moi, bien que depuis le fond des âges vous y clapotiez tous en rond comme on clabaude un aliénage complote à mort une incarcération
Re re ghi reghéghi geghena a zoghena a gogha riri
Entre le cu et la chemise
Entre le foutre et l’infra-mise
Entre le membre et le faux bond entre la membrane et la lame entre la latte et le plafond
Entre le sperme et l’explosion tre l’arête et tre le limon entre le cu et la main mise
de tous sur la trappe à haute pression d’un râle d’éjaculation n’est pas un point ni une pierre
éclatée morte au pied d’un bond ni le membre coupé d’une âme
(l’âme n’est plus qu’un vieux dicton) mais l’atterrante suspension d’un souffle d’aliénation violé, tondu, pompé à fond par toute l’insolente racaille de tous les empafrés d’étrons qui n’eurent pas d’autre boustifaille pour vivre que de bouffer
Artaud
Mômo
Là, où l’on peut piner plus tôt que moi et l’autre bander plus haut que moi en moi-même s’il a eu soin de mettre la tête sur la courbure de cet os situé entre anus et sexe
De cet os os sarclé que je dis dans la crasse d’un paradis dont le premier dupé sur terre ne fut pas le père ou la mère qui dans cette antre te refit mais
JE vissé dans ma folie
Et qu’est-ce qui me prit d’y rouler moi aussi ma vie ?
MOI
RIEN, rien
Parce que moi
J’y suis
J’y suis et c’est la vie qui y roule sa paume obscène
Bien
Et après ?
Après ? Après ?
Le vieil Artaud est enterré
dans le trou de la cheminée qu’il tient de sa gencive froide de ce jour où il fut tué !
Et après ? Après ?
Après !
Il est ce trou sans cadre que la vie voulut encadrer
Parce qu’il n’est pas un trou
mais un nez qui sut toujours trop bien renifler
Le vent de l’apocalyptique
tête qu’on pompe sur son cu serré
et que le eu d’Artaud est bon pour les souteneurs en miserere
Et toi aussi tu as la gencive
La gencive droite enterrée
dieu toi aussi ta gencive est froide depuis infiniment d’années que tu m’envoyas ton cul inné
pour voir si j’allais être né
à la fin depuis le temps que tu m’espérais
en raclant
mon ventre d’absent
menendi enenbi
embenda tarch enemptle o marchte rombi tarch pai et a tinenptle orch pendu o patendi a marchit orch yorpch ta urchpt orchpt ta tou taurch campli ko ti aunch a ti aunch aungbli
« Je souffrirai le christ en moi comme une Mère d’abord afin de lui donner corps et comme un Père dans toutes les tentations de la
TROP TÔT
mort et cette Mère qui le refusa en le faisant je la lui donnerai pour qu’elle achève de le frapper d’amour et elle ne l’aura jamais contenu sauf quand Elle était morte et pas née et qu’elle n’était que la Volonté Propre de son Verbe qui derrière mon épaule droite un jour se vit en corps et refusa la perception des corps. - Alors ils se sentiront être et Il sera le Fils de Dieu et de Celle qui fut Mère en Dieu la Volonté de Virginité car le christ dormant en sa Volonté n’y touche pas quand Il dort et qu’il est mort mais Invisible et sans substance Il est ce qui n’est pas substance et s’il se voit être c’est de l’autre côté, celui de ce qui n’est pas et qui ne commence pas et l’Antechrist qui me tient pour empêcher cette Manifestation de Non-Être qui sera, elle, Manifestée ne me tient qu’en être et idée et le Non-Idée n’est pas son Abandon mais un état force et cet état force n’est pas état mais croix et l’éclatement de Dieu dans ce non-état n’est pas le mien mais celui d’un être que je ne veux pas ou que je veux et je ne me verrai plus croix d’être mon étant comme sur cette terre extérieure, mais ce que je serai je ne peux pas l’imaginer en conception parce que cela est le Péché mais le vivre et le mériter en mourant jusqu’à ce que je croie que je ne suis pas autre que Rien de ce qui est, fut ou sera.
Être vierge devant son propre moi, c’est-à-dire ne plus percevoir de vision de soi ni visionner de sensation. » [
« Me tenant hors de ce moi distant j’ai pensé, me voyant dans l’être et son électricité : je vais finir moi aussi, si l’être ne finit pas et si je n’ai pas d’autre issue que l’être, par réaliser le désir charnel de me confondre avec ce féminin,
tenant cela pour une expérience et une supposition, je me voyais glissant dans la croyance en la véracité d’une vraie tentation. »
« [...] le Père tuera éternellement la Vie jusqu’à ce que Dieu l’Infini ait renoncé en Lui à être et qu’il aura consenti enfin à la Suprême humilité - un glaive dans son estomac et une croix entre la colonne vertébrale, l’estomac et le cœur.
C’est de cette humilité de cette Douleur revendicatrice suprême que la Sainte Vierge de la Substance, la Sainte Vierge Nommante naîtra que l’Antechrist du cœur a voulu empêcher de naître et de parler parce qu’Elle est l’âme incarnée de l’Eternelle Vérité. »
« Canaille de canaille de Dieu, innommable fuyard du ciel, intronisé exécrable de l’être, c’est l’être qui t’a fait Dieu et non toi, avant lui tu ne l’étais pas, et qui t’a permis de me mettre où je suis, qui t’a permis de disposer de mon être à moi qui n’en suis pas un et qui me sens mangé par l’être jusque dans l’être de mon propre néant que seule l’idée de non-être me permet chaque fois de fuir.
Jusqu’à quand me faudra-t-il me réfugier dans le non-être pour avoir le droit d’être ce que je suis. »
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
LA NUIT OPÈRE
Extrait 1
Dans les outres de draps gonflés
où la nuit entière respire,
le poète sent ses cheveux
grandir et se multiplier.
Sur tous les comptoirs de la terre
montent des verres déracinés,
le poète sent sa pensée
et son sexe l'abandonner.
Car ici la vie est en cause
et le ventre de la pensée ;
les bouteilles heurtent les crânes
de l'aérienne assemblée.
…
p.227
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
LE MAUVAIS RÊVEUR
Mes rêves sont avant tout une liqueur, une sorte
d'eau de nausée où je plonge et qui roule de sanglants
micas. Ni dans la vie de mes rêves, ni dans la vie
de ma vie je n'atteins à la hauteur de certaines images,
je ne m'installe dans ma continuité. Tous mes rêves
sont sans issue, sans château-fort, sans plan de ville.
Un vrai remugle de membres coupés.
Je suis, d'ailleurs, trop renseigné sur ma pensée
pour que rien de ce qui s'y passe m'intéresse : je ne
demande qu'une chose, c'est qu'on m'enferme défini-
vement dans ma pensée.
Et quant à l'apparence physique de mes rêves, je
vous l'ai dit : une liqueur.
p.224
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
VITRES DE SON
Vitres de son où virent les astres,
verres où cuisent les cerveaux,
le ciel fourmillant d'impudeurs
dévore la nudité des astres.
Un lait bizarre et véhément
fourmille au fond du firmament ;
un escargot monte et dérange
la placidité des nuages.
Délices et rages, le ciel entier
lance sur nous comme un nuage
un tourbillon d'ailes sauvages
torrentielles d'obscénités.
p.229
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
L'ARBRE
Cet arbre et son frémissement
forêt sombre d'appels,
de cris,
mange le cœur obscur de la nuit.
Vinaigre et lait, le ciel, la mer,
la masse épaisse du firmament,
qui gîte au cœur épais de l'ombre.
Un cœur qui crève, un astre dur
qui se dédouble et fuse au ciel,
le ciel limpide qui se fend
à l'appel du soleil sonnant,
font le même bruit, font le même bruit,
que la nuit et l'arbre au centre du vent.
p.225
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
Dans la lumière de l'évidence et de la réalité du
cerveau,
au point où le monde devient sonore et résistant
en nous,
avec les yeux de qui sent en soi se refaire les choses,
de qui s'attache et se fixe sur le commencement d'une
nouvelle réalité.
Ces états où la réalité la plus simple, la plus ordi-
naire n'arrive pas jusqu'à moi, où l'instante pression
de la réalité coutumière ne perce pas jusqu'à moi,
où je n'atteins même pas le niveau nécessaire de
ma vie.
…
p.218
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
BARAQUE
L'orgue n'avait pas d'accoucheuse
Mais la baraque crépitait
Et ma mère était la logeuse
Où je m'enfournai tout entier.
Des colombes de feu léger
Dardaient leurs flammes floconneuses
Sur la poitrine captieuse
Où le rêve me ligotait.
Mais plus tard la mariée creva
La membrane de toile claire
Où l'étroite tente solaire
Emprisonne tous nos ébats.
p.200
DEUXIÈME PARTIE
TEXTES ET POÈMES INÉDITS/BILBOQUET
MUSICIEN
Voici que s'embrase ton masque
Musicien aux veines cireuses
Allume les bobèches creuses
Avec tes notes en fusion.
La foudre partage les ventres
Des vaisseaux nouveaux que tu lances
Construis-nous un petit enfer
Avec tes firmaments en antres.
Les astres que tu dilapides
Les métaux précieux que tu crées
Composent le temple rapide
De nos sentiments familiers.
Mais voici la belle église
Qui ouvre ses canaux profonds
Belle église cent fois décrite
Où n'habitent que des démons.
p.199
Nul n’a jamais écrit ou peint, sculpté, modelé, construit, inventé, que pour sortir en fait de l’enfer.
Il ne sait pas comment utiliser son corps
mais le pécheur non plus ne sait pas non plus toute la
fécalité,
il n'a pas encore trouvé tous les péchés
et tous les vices,
il lui manque encore
bien d'ignobles sensations à éprouver
car le registre en est infini et inépuisable.
Je sais que dans le débat actuel, j’ai avec moi tous les hommes libres, tous les révolutionnaires véritables qui pensent que la liberté individuelle est un bien supérieur à celui de n’importe quelle conquête obtenue sur un plan relatif.
Mais c'est qu'Héloïse aussi a des jambes. Le plus beau c'est qu'elle ait des jambes. Elle a aussi cette chose en sextant de marine, autour de laquelle toute magie tourne et broute, cette chose comme un glaive couché.
Or, c’est l’homme qu’il faut maintenant se décider à émasculer.
Que j'aie le sang en fer et glissant, le sang plein de marécages, que je sois giflé de pestes [...], contaminé [...], pourvu que persiste la douce armature d'un sexe de fer. Je le bâtis en fer, je l'emplis de miel, et c'est toujours le même sexe au milieu de l'âcre vallonnement. C'est le sexe où convergent les torrents.