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2.55/5 (sur 28 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Nouméa , 1995
Biographie :

Né en 1995, Basile Galais a grandi en Nouvelle-Calédonie. Il quitte l'île pour étudier en métropole, d'abord aux beaux-arts de Biarritz puis de Nantes, ou il pratique la peinture, puis en création littéraire, au Havre.
Aujourd'hui, il vit sur son voilier dans la petite rade de Nouméa.
"Les sables" est son premier roman.

- Les sables août 2022

Source : Editions Acte sud
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« Ce qui m'intéressait dans ce texte et dans l'écriture, et ce que j'ai vécu aussi, c'est un doute, c'est une plongée, une immersion en soi, une interrogation perpétuelle du réel. Voilà, c'est ça qui m'importe et je crois que c'est avant tout de ça dont il est question : d'une littérature qui produit du décalage, qui produit de l'étrangeté, qui produit de la remise en question face à un réel qui finalement n'est jamais saisissable, ou n'est saisissable que par bribes. » Basile Galais --- **Les Sables** premier roman de Basile Galais Dans une ville portuaire, angles droits, blocs massifs, verre et béton sur sable, tempêtes et ciel champ de bataille, une succession de dérèglements, une histoire de disparitions et d'oubli. **Les Sables** est une enquête artisanale menée par des personnages qui ne sont pas flics, menée par vous et moi, et dont l'objet est la première énigme. C'est une expérience d'immersion dans un univers immédiatement sensible dont la richesse chromatique est une aventure en soi. Un roman-pilote en haute définition qui fait de l'insaisissable un art et une destination. https://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature/les-sables --- #rentréelittéraire #rl2022

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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Un vent frais pénètre la pièce. Ces rêves obscurs l'habitent depuis son retour du centre de recherches, mais la fréquence avec laquelle ils se manifestent s'accroît depuis le mensonge à la télé. Les doutes qui l’assaillent lorsqu'elle se réveille sont de plus en plus fondamentaux. C’est comme si son expérience sur l'île et la mort du Guide n'étaient qu’une seule et même chose, une sorte de jeu de miroirs orchestré par un illusionniste voulant la rendre folle. p. 37
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(Les premières pages du livre)
LA ZONE
Il avançait comme le spectre d’un lieu hanté. Il était l’ombre de la zone, l’enfant d’un hors-champ.
Les lampadaires se dépliaient dans la brume, de grands cônes de lumière jaune qui s’évaporaient dans le noir. Les allées étaient désertes, quelques emballages volaient le long du trottoir. Au loin, la myriade de lumières du complexe éblouissait la nuit. Un souffle grondait, s’arrêtait puis recommençait. La flamme emplissait le ciel, une lumière vacillante apparaissait sur son visage puis le noir s’emparait de nouveau des formes. C’était un immense crachat de feu qui s’échappait des cheminées et cela lui semblait la plus belle chose qui soit. Ces quelques mètres de combustion le bouleversaient depuis toujours.
Marlo était né là. La zone était déjà abandonnée à l’époque, supplantée par le complexe qui venait de s’établir. Son père l’avait imprégné de sa méfiance face à ce monstre rutilant qui l’avait poussé à passer ses journées dans le canapé du salon, vêtu de son éternel jogging maculé de taches de gras, il s’enfilait son premier whisky à quatorze heures, jamais avant. C’est la faute au complexe, il disait. Le doigt de Marlo aussi, c’était la faute au complexe, cette protubérance qui s’échappait de son auriculaire droit, cette petite monstruosité qui se faisait l’écho des cheminées cracheuses de feu et des cuves chromées dont les reflets déformaient l’espace alentour. Tous les médecins qu’il avait consultés s’étaient tus en la voyant, comme s’il n’y avait là rien à redire, ils avaient simplement échangé un regard entendu, les hommes en blouse blanche et ses parents.
Il avait grandi entouré par la haine du complexe, une haine qui se développait proportionnellement à sa protubérance, une croissance lente et inexorable. Pourtant, depuis qu’il avait sept ans il sortait chaque soir par la fenêtre de sa chambre pour aller admirer les machines qui s’y activaient la nuit. Un grouillement de lumières et de sons, c’était l’atmosphère dans laquelle il s’était construit. Il se demandait si c’était dû à son petit doigt, cette fascination pour les géants mécaniques.
Il errait comme chaque nuit, porté par les souffles qui s’échappaient des cheminées du port. Les barbelés brillaient dans l’éclat fugitif des flammes. Au loin, les lumières de la Cité vibraient. L’air était lourd et saturé d’une odeur qui lui piquait la gorge et les yeux. Ses pas résonnaient un instant dans la nuit avant de se fondre dans le murmure des machines. Il y avait quelque chose d’organique dans ce ballet de lumières et de sons, quelque chose qui lui faisait considérer le complexe comme une créature vivante, avec ses râles, ses grognements et son pouls battant la mesure.
Il longeait la clôture, enveloppé par cette étrange harmonie, lorsqu’un mouvement rompit le calme. À une centaine de mètres devant lui, au niveau de la guérite marquant l’entrée du complexe, un projecteur découpait nettement les silhouettes qui se contorsionnaient dans la nuit. Un jeune homme aux cheveux longs se débattait face à deux colosses en costume noir. Il s’agrippait de toutes ses forces à un caméscope que les deux hommes tentaient de lui extirper. Le jean du jeune chevelu qui se tortillait dans tous les sens avait glissé au niveau de ses genoux et son tee-shirt commençait à partir en lambeaux dans la lutte. Les colosses, avec leurs crânes luisants, prenaient nettement le dessus.
Ils parvinrent enfin à le maîtriser et se dirigeaient vers l’intérieur du complexe quand le jeune homme se mit à hurler dans la direction de Marlo 99.9 la parole du loup qui dort, 99.9 rien ne stoppe les flux invisibles, 99.9 le pouvoir n’a pas de prise sur le vide ! Il avait la voix d’un possédé, on aurait dit un fou en plein délire, un prophète déclamant une litanie. Les hommes en costume se retournèrent et balayèrent l’obscurité du regard. Marlo se plaqua au grillage, le souffle court. Il entendit le captif se contorsionner dans un ultime effort et crier 99.9 ! Son cœur était à deux doigts de lui exploser le thorax. Quand il se dégagea du grillage pour jeter un œil à la scène, les trois silhouettes avaient disparu. Il ne restait qu’une tache de lumière, vide.
Lorsqu’il arriva à la bicoque, l’horizon commençait déjà à bleuir. Le rideau de sa chambre oscillait dans le vent qui s’engouffrait par la fenêtre entrouverte, de la fumée s’échappait par la grille d’aération, une flaque reflétait un morceau de lune. Il aperçut la silhouette de son frère endormi, il l’observa quelques instants, détaillant ce visage qui aurait pu être le sien, cette peau translucide qui ne pouvait voir le jour sans brûlure, et ces yeux, derrière les paupières closes, qu’il savait azurins. Il trouvait toujours étrange de pouvoir contempler son double exact, il ne s’était jamais habitué à cette sensation paradoxale, cette façon qu’il avait de se retrouver dans l’autre sans jamais parvenir à s’y reconnaître totalement. Son jumeau dormait paisiblement. Une douleur aiguë irradiant l’extrémité de sa main le sortit de sa rêverie. Il enjamba la fenêtre sans bruit, se glissa dans les draps glacés et aperçut son doigt ; la protubérance était violine.
Ça, il était le seul à l’avoir.
Un jour, alors que les vieux barbus grisonnants s’étaient regroupés dans le salon, comme ils faisaient quelquefois, parlant fort et crachant leur haine envers le complexe, le plus en verve, un gros à la moustache drue qui sentait le rance, l’avait saisi par les aisselles et brandi devant les autres comme un trophée de chasse, exposant son petit doigt aux regards ébahis de ses camarades. Son père ne l’avait pas supporté et ils s’étaient battus dans le salon, mettant tout sens dessus dessous. Les objets avaient valdingué, l’ancienne table basse en verre s’était brisée. Tout s’était terminé quand sa mère était sortie de la cuisine et avait hurlé. Le gros moustachu, son père et les autres qui braillaient autour s’étaient arrêtés net. C’était sa force, à sa mère, elle ne disait jamais rien, elle faisait tout, et de temps en temps elle hurlait. Il y avait en elle un feu qui par instants jaillissait, autrement, il restait tout entier contenu dans sa chevelure cuivrée. Marlo s’était tenu là, le gros moustachu et les autres s’étaient tirés en vitesse et son père s’était affalé dans le canapé l’air hagard. Il avait du sang déjà sec sur la lèvre inférieure et sous la narine droite. Depuis, les barbus grisonnants n’avaient pas reparu si ce n’est au détour d’un article dans la presse locale décrivant une énième tentative de blocage du complexe par un groupe de récalcitrants, et son père n’avait plus décollé son derche du canapé. Marlo s’était senti responsable de cette déchéance, il avait appuyé tous les jours sur son petit doigt pour que la protubérance disparaisse, cette petite excroissance qui semblait la cause de tous les maux.
La radio tournait à plein tube quand il se réveilla. Les voix du monde pénétraient sa chambre, celle d’un chroniqueur à la diction saccadée, celles d’hommes en colère, de femmes éplorées, d’enfants en détresse ; des tonalités et des langues qui lui emplissaient l’esprit d’images mentales variées, un désert à perte de vue, des visages mats enturbannés, de grands tissus dans le vent, des kalachnikovs. Le lit de son frère était vide, le salon aussi. La radio diffusait pour les objets, le canapé défoncé par le cul de son père qui s’y enfonçait chaque jour, le poste télé à l’écran bombé, le papier peint crasseux qui se décollait en lambeaux, les semblants de plantes que sa mère s’entêtait à conserver bien qu’elles soient toutes à moitié mortes, le tapis à poils qui abritait des années de poussière, une guirlande cramée pendue à la bibliothèque, les quelques livres jaunis qu’elle contenait, les sacs poubelles remplis de bouchons en plastique que Marlo collectait. C’était la première fois qu’il voyait ces objets isolément et cela lui parut bizarre. Il prit alors conscience de l’absence de ses parents, de l’absence de son frère. Il s’approcha de la fenêtre de la cuisine donnant sur la zone et l’ouvrit.
L’odeur avait quelque chose d’iodé, un parfum qui se déposait sur la peau. Des cristaux de sel constellaient le montant de la fenêtre. Une lumière étrange éclairait les ensembles de béton et de tôle. Les plantes grimpantes continuaient d’envahir les surfaces ; on disait de certaines espèces qu’elles avaient la force de briser des carreaux. Les structures des silos se découpaient à contre-jour, le quai jonché d’éclats de verre scintillait.
Un courant d’air traversa la pièce, portant avec lui l’atmosphère suspendue de la zone. La radio tournait toujours. Il était question d’un martyr, d’une vengeance prochaine et d’une foule qui se piétinait et s’automutilait dans sa procession. Ça braillait à travers le poste dans une langue inconnue, il y avait de l’exaltation, du désespoir bruyant. Ici, c’était vide, Marlo était seul. Pourquoi ne parlait-on que du bruit ? Il sentait son monde se rétrécir dans les cris qui s’échappaient du poste. Il alluma la télé, l’image hésita un instant puis une foule vue du ciel apparut, matérialisant la plainte qui s’échappait de la radio. Une journaliste blonde au teint clair dit Le Guide est mort. Marlo sentit une bouffée d’angoisse monter. Un élancement sourd parcourait son petit doigt, la malformation semblait plus grosse et plus violette que la veille. Il se dirigea vers la porte et sortit dans la zone.
Une lumière diaphane imprégnait l’espace d’une sorte de transparence. Il longea le quai désert, passa devant les docks aux verrières brisées par la végétation hargneuse. Des grillages et des panneaux d’interdiction en barraient l’entrée, le maillage métallique crevé en plusieurs endroits découvrait des restes de squats à l’intérieur des enceintes. Les nomades qui habitaient ces lieux précaires avaient disparu. Il sentait l’angoisse le coloniser lentement.
Ses pas sonnaient creux, comme si l’esplanade avait perdu sa consistance. Il continua d’avancer, se dirigeant
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C’est un jour neutre. Le paysage portuaire se dilue dans l’atmosphère sans contraste. Un vent léger menace de forcir. La mer grise est froissée par le clapot. La ville est muette et figée, pas une présence ne s’en extrait hormis quelques feuilles qui volent. Seuls les goélands rompent le calme, ils gueulent et tournoient dans le ciel laiteux.
Ils ont certainement tous reçu le même e-mail une semaine auparavant, sinon ils ne seraient pas là à se jauger, ne sachant pas vraiment quel désir les a poussés jusqu’ici. La curiosité, ou autre chose peut-être. Le silence de la Cité qui s’étend et l’absence de contours auxquels se rattacher instillent une certaine méfiance au sein du groupe qui petit à petit s’étoffe de nouveaux membres. Ils sont tous vêtus de noir. Rien de tel n’était mentionné dans le courriel qu’ils ont reçu. Pourquoi donc cette connivence austère ? Ce hasard qui ne semble pas en être un fait grandir le soupçon, des yeux anxieux se croisent et s’évitent.
Une corne de brume résonne au loin. Le silence se réinstalle, les goélands sont partis à l’assaut du bateau encore masqué par la digue. Plus personne n’arrive, le groupe semble complet. Les regards sont devenus des coups d’œil hâtifs accompagnés de gestes nerveux. Une berline noire aux vitres fumées s’approche et se gare à quelques mètres du groupe.
Un chauffeur en costume en sort, contourne la voiture par l’arrière et ouvre la portière. Un homme tout de blanc vêtu apparaît. L’attention du groupe est désormais tournée vers lui. Elle remarque immédiatement ses yeux, ils sont gris.
Ester ne s’attendait pas à ça. Elle a pris sa valisette, elle déteste ne pas avoir ses affaires à portée de main. Quand l’homme au complet blanc a annoncé que le centre de recherches n’était atteignable que par bateau elle a failli s’effondrer. L’ambiance avait été suffisamment pesante jusque-là, avec tous ces inconnus qui se regardaient de biais. Elle avait d’emblée flairé qu’il s’agissait d’intellects supérieurs, ça se sentait à la manière qu’ils avaient tous de rouler des yeux.
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La ville est secouée. C’est sonore. Rien ne bouge. Seuls les stores des commerces se gonflent et se dégonflent. Les sifflements, les souffles plus rauques et les claquements créent un drôle de vacarme, presque harmonieux. Les piétons qui occupent les trottoirs se déportent en faisant une série de petits pas chassés à chaque rafale. D’autres semblent vouloir se prémunir de tels écarts en adoptant une démarche étrange, ils avancent penchés, le corps obliquant du côté d’où proviennent les bourrasques. C’est une chorégraphie inédite qui se joue entre les immeubles droits. Le ciel s’abaisse puis remonte sous les grains qui se succèdent.
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