Citations de Benjamin Constant (330)
En vain l'on s'obstine à ne consulter que son coeur ; on est condamné tôt ou tard à écouter la raison.
C'est un grand pas, c'est un pas irréparable, lorsqu'on dévoile tout à coup aux yeux d'un tiers les replis cachés d'une relation intime ; le jour qui pénètre dans ce sanctuaire constate et achève les destructions que la nuit enveloppait de ses ombres : ainsi les corps refermés dans les tombeaux conservent souvent leur première forme, jusqu'à ce que l'air extérieur vienne les frapper et les réduire en poudre.
Elléonore, en un mot, était une lutte constante avec sa destinée.
il n'y a point d'unité complète dans l'homme, et presque jamais personne n'est tout à fait sincère ni tout à fait de mauvaise foi.
Il y a des choses qu'on est longtemps sans se dire, mais quand une fois elles sont dites, on ne cesse jamais de les répéter.
Je suis né le 25 octobre 1767, à Lausanne, en Suisse, d'Henriette de Chandieu, d'une ancienne famille française réfugiée dans le pays de Vaud pour cause de religion, et de Juste Constant de Rebecque, colonel dans un régiment suisse au service de Hollande. Ma mère mourut en couches, huit jours après ma naissance.
1772 - Le premier gouverneur dont j'aie conservé un souvenir un peu distinct fut un Allemand nommé Stroelin, qui me rouait de coups, puis m'étouffait de caresses pour que je ne me plaignisse pas à mon père. Je lui tins toujours fidèlement parole, mais la chose s'étant découverte malgré moi, on le renvoya de la maison. Il avait eu, du reste, une idée assez ingénieuse, c'était de me faire inventer le grec pour me l'apprendre, c'est à dire qu'il me proposa de nous faire à nous deux une langue qui ne serait connue que de nous : je me passionnai pour cette idée. Nous formâmes d'abord un alphabet, où il introduisit les lettres grecques. Puis nous commençâmes un Dictionnaire dans lequel chaque mot français était traduit par un mot grec. Tout cela se gravait merveilleusement dans ma tête, parce que je m'en croyais l'inventeur, et je savais déjà une foule de mots grecs, et je m'occupais de donner à ces mots de ma création des lois générales, c'est-à-dire que j'apprenais la grammaire grecque, quand mon précepteur fut chassé. J'étais alors âgé de cinq ans.
Malheur à l’homme qui, dans les premiers moments d’une liaison d’amour, ne croit pas que cette liaison doit être éternelle.
Adolphe , me dit-elle , vous vous trompez sur vous-même ; vous êtes généreux , vous vous dévouez à moi parce que je suis persécutée ; vous croyez avoir de l'amour , et vous n'avez que de la pitié .
Pourquoi prononça-t-elle ces mots funestes ? Pourquoi me révéla-t-elle un secret que je voulais ignorer ?
Elle voulut pleurer, il n'y avait plus de larmes.
Ellénore, lui écrivais-je un jour, vous ne savez pas tout ce que je souffre. Près de vous, loin de vous, je suis également malheureux. Pendant les heures qui nous séparent, j'erre au hasard, courbé sous le fardeau d'une existence que je ne sais comment supporter. La société m'importune, la solitude m'accable. Ces indifférents qui m'observent, qui ne connaissent rien de ce qui m'occupe, qui me regardent avec une curiosité sans intérêt, avec un étonnement sans pitié, ces hommes qui osent me parler d'autre chose que de vous, portent dans mon sein une douleur mortelle.
… Et peut-être un jour, froissé par ces cœurs arides, vous regretterez ce cœur dont vous disposiez, qui vivez de votre affection, qui eût bravé mille périls pour votre défense, et que vous ne daignez plus récompenser d’un regard.
Que je n 'entende de vous , dit-elle , aucun ,mot cruel .Je ne réclame plus , je ne
m 'oppose à rien ; mais que cette voix que j 'ai tant aimée , que cette voix qui
retentissait au fond de mon coeur n ' y pénètre pas pour le déchirer Adolphe ,
Adolphe , j 'ai été violente , j 'ai pu vous offenser; mais vous ne savez pas ce que
j 'ai souffert . Dieu veuille que jamais vous ne le sachiez !
... chacun ne s'instruit qu'à ses dépens dans ce monde ...
Je la sentais meilleure que moi ; je me méprisais d'être indigne d'elle . C'est un affreux malheur de ne pas être aimé quand on aime ; mais c'en est un bien grand d'être aimé avec passion quand on n'aime plus .
....parce que le mépris remplace la moquerie , et que le mépris est silencieux .
Ellénore se croyait de nouveaux droits ; je me sentais chargé de nouvelles chaînes.
Nos coeurs défiants et blessés ne se rencontraient plus.
Serait-ce parce qu'il y a dans l' espérance quelque chose de douteux , et que,
lors qu' elle se retire de la carrière de l' homme, cette dernière prend un
caractère plus sévère , mais plus positif ?
Quoi qu 'il soit, le bonheur que je goûtais près de Charlotte
a disparu. Est-ce folie ? est-ce aveuglement ? Qu' importe
le nom ! la chose parle assez d' elle-même !
Je ne savais pas alors ce que c'était que la timidité, cette souffrance intérieure qui nous poursuit jusque dans l'âge le plus avancé, qui refoule sur notre cœur les impressions les plus profondes, qui glace nos paroles, qui dénature dans notre bouche tout ce que nous essayons de dire, et ne nous permet de nous exprimer que par des mots vagues ou une ironie plus ou moins amère, comme si nous voulions nous venger sur nos sentiments mêmes de la douleur que nous éprouvons à ne pouvoir les faire connaître.