Citations de Brenda Jagger (41)
Inévitablement, il arrive qu’elles se fassent accoster par des hommes d’un genre douteux. Ce qui a donné à cette profession une réputation de laxisme moral que je ne tolère pas chez mes employées. On prétend même, avec de bonnes raisons sans doute, que durant la morte-saison certaines couturières arrondissent leurs revenus en accordant leurs faveurs à des hommes pour de l’argent.
Elle savait que le bonheur de ses parents était réel et s’attristait un peu de sa propre incapacité de désirer le même. Elle aimait pourtant son père. Elle admirait ses qualités d’homme d’affaires, sa solidité et respectait son intégrité et son jugement. Mais devenir l’épouse d’un tel homme aurait signifié une lente suffocation, peu importait que ce fût dans le velours et la soie.
Elle fait de son mieux pour rester à la page. Mais les modes passent vite de nos jours et les femmes se lassent rapidement…
Travailler à l’extérieur était impensable pour une femme de la bonne société. Sa destinée était donc de vivre du travail des autres et Gemma, avec honnêteté, admettait qu’elle ne saurait pas comment réagir sans la sécurité que lui offrait la fortune de son père. La liberté, dans ce cas,paraîtrait sans doute précaire : liberté d’avoir faim, comme cette fille si elle ne réussissait pas à vendre ses châles et ses bonnets.
Elle n’était pas d’une beauté classique, celle d’une femme du monde au teint de porcelaine, aux yeux pensifs et à la silhouette fragile, ce que la mère de Gemma qualifiait de « à la mode ».
Elle n’était pas d’une beauté classique, celle d’une femme du monde au teint de porcelaine, aux yeux pensifs et à la silhouette fragile, ce que la mère de Gemma qualifiait de « à la mode ».
Daniel s’était montré tendre avec les femmes, mais aussi léger et presque distrait. Il cajolait ou taquinait, pour obtenir ce qu’il désirait. Avec Cara, c’était bien différent ; il ne pouvait supporter l’idée qu’elle lui échappe, il fallait qu’elle soit à lui.
Il se débattait dans le courant de ces émotions nouvelles et lui en voulait de ne pas deviner ses sentiments ; il était en colère contre lui-même à cause de son impuissance à les lui exprimer.
Impossible d’accorder du temps à Daniel, elle devait sauver ce qui pouvait encore l’être. Elle savait aussi que donner libre cours à ses sentiments pour le jeune homme ne ferait que précipiter le désastre.
Elle luttait contre les émotions qui l’envahissaient, en se disant que, quand tout irait mieux, elle prendrait le temps de penser à elle-même. Elle éprouvait un élan de joie fou à la vue de Daniel, en même temps que la nécessité de l’éconduire. La terreur de ne pas le revoir lui nouait la gorge et les larmes qu’elle essayait de refouler donnèrent à sa voix une intonation désagréable.
Enfant, il se rendait régulièrement à l’école le dimanche avec le plus grand sérieux pour y apprendre à lire et à écrire. Une chance que Sairellen n’avait pas eue. Elle avait bien émis quelques grognements d’approbation, mais rien de plus. Plus tard, il avait étudié à l’Institut de Mécanique. Il passait son temps plongé dans des livres d’histoire ou dans l’étude de cartes anciennes. Elle avait manifesté un peu plus d’enthousiasme quand il avait été promu contremaître aux filatures Braithwaite. Elle faisait en sorte qu’il y eût toujours pour lui un dîner chaud et une chemise propre, qu’il rencontrât le moins possible ses locataires et ne lui prenait sur son salaire pas un penny de plus que nécessaire. Elle le laissait en paix avec ses livres et l’interrogeait rarement au sujet de ses activités, tant amoureuses que sociales. Elle avait confiance en son sens de la décence.
Elles allaient boire le lait de la vache, cueillir des mûres dans la lande, ou encore ramasser des champignons dans le pré communal.
C’était une vie simple et fruste, loin d’être paradisiaque, comme certains inclinaient à le croire maintenant mais qui respectait au moins la dignité et la liberté de chacun. L’ère des machines y avait mis fin et il n’y avait rien à gagner à s’appesantir sur le passé.
Il était difficile de réclamer de l’argent à une femme sans appui ; de cela, elle faisait son affaire.
C’est une vieille fille acide comme le vinaigre. Et… les vieilles filles peuvent aussi éprouver des sentiments qui tournent au rance quand elles les contiennent trop.
Cara ne l’entendit pas, obnubilée par la pensée de son père. Il était fantasque et indépendant, dépensier mais toujours là quand on avait besoin de lui. Cara s’était souvent querellée avec lui, mais elle l’aimait. Il avait quelque chose de merveilleux et, parfois, se montrait si tendre ! Elle ne connaissait pas d’homme plus amusant et plus charmant que lui. Elle savait déjà qu’il lui manquerait toujours…
Elle éprouvait envers lui une gratitude dont elle ne se serait pas crue capable. Mais payer sa dette, il n’en était pas question. Les risques étaient considérables : celui d’être mère à nouveau et cet autre, plus grave encore, de voir sa vie sombrer dans l’incohérence aux côtés de cet homme.
Elle savait qu’une cabane de torchis ne menait à rien, sinon à une autre masure. Il n’y avait pas d’avenir à Tipperary. On n’échappait pas à sa misère.
Daniel n’avait pas besoin d’entendre son histoire pour savoir que le désespoir l’avait amenée là ; son mari avait dû mourir un an auparavant, et avec lui avaient disparu la maison et le lopin de terre. Le propriétaire les avait repris pour ne pas s’encombrer d’une femme seule et de ses enfants.
Elle avait besoin d’un compagnon de voyage, jeune de préférence, suffisamment présentable pour accompagner une femme en bottines de chevreau et capeline de paille aux rubans de soie, et qui se chargerait de ses deux sacs tandis qu’elle-même porterait Liam. Avec une telle escorte, elle échapperait à la vigilance des officiers de l’Immigration, des tenanciers de bordel et des rabatteurs d’ouvrières pour les ateliers. L’homme idéal aurait également de bonnes raisons d’éviter les contrôles officiels et serait disposé à faire une partie du voyage en sa compagnie.
Quand elle pensait à son amant, aujourd’hui, c’était avec une vague nostalgie, mais sans rancœur. Elle l’avait aimé, même si elle ne savait plus très bien comment. Il ne lui semblait pas porter une tendresse excessive à son enfant, car elle se comportait avec Liam comme avec elle-même, veillant à ce que rien ne pût leur nuire. Il faisait partie d’elle
Elle avait appris l’endurance ; non pas la patience, mais l’art d’attendre son heure