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3.34/5 (sur 395 notes)

Nationalité : États-Unis
Né(e) à : Chicago , le 7/01/1961
Biographie :

Catherine Mavrikakis est une écrivaine et essayiste québécoise.

Elle a partagé son enfance entre Ville d’Anjou, Montréal-Nord, Villers-Bocage en Normandie et Bay City (Michigan) et a été élevée avec son plus jeune frère par le poste de télévision auprès duquel elle dormait. Elle a subi une éducation stricte dans un lycée français à l’ “étranger” où elle a appris beaucoup de choses, dont l’injustice. En 1979, elle choisit vraiment Montréal, où elle fait des études de littérature et une dépression, qui la conduira à de longues années de psychanalyse. Il lui en restera toujours quelque chose…
Pendant dix ans elle a enseigné à l’Université Concordia (à Montréal) où elle était heureuse. Mais tout a dégénéré dans le monde après le 11 septembre. Elle s’est donc retrouvée en 2003 à l’Université de Montréal, ce qui lui laisse beaucoup de temps pour écrire.

Depuis 2000, elle a publié quatre romans : "Deuils cannibales et mélancoliques" (Trois, 2000), "Ça va aller" (Léméac, 2002), "Fleurs de crachat" (Leméac, 2005), "Le ciel de Bay City", (Héliotrope, 2008) et une pièce de théâtre Omaha Beach (Héliotrope, 2008). Elle a écrit un essai-fiction sur la maternité avec Martine Delvaux : "Ventriloquies" (Leméac, 2003) et rédigé un essai "Condamner à mort. Les meurtres et la loi à l’écran" (PUM, 2005). Elle anime une émission “Rêvez pour moi” sur Radio-Spirale où les invités doivent parler de leurs rêves, ce qu’ils ne font pas toujours de bonne grâce.

Elle fait du yoga et de la méditation. Sa pose préférée est savasana. Elle a une fille de presque huit ans, un mari assez rustre, des amies roumaines, un filleul adorable et bavard et deux marraines extraordinaires pour sa fille. C’est pourquoi elle partage une devise avec les Républicains, des Conservateurs et les Grecs: Vive la Famille!

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Citations et extraits (117) Voir plus Ajouter une citation
Une légende veut que les oiseaux depuis 1945 ne chantent pas à Auschwitz. Le monde se serait tu là-bas. Je suis allée en Pologne en mai 1995. Cinquante ans après la libération du camp, le 27 janvier 1945. C’était le printemps. Il faisait un soleil radieux. L’air était doux. Les oiseaux s’en donnaient à cœur joie et chantaient dans le ciel bleu, indifférent à la terreur humaine. L’azur est un cancer. Imperturbablement vivant. Le cri des oiseaux déchirait mes oreilles. Des hommes, des femmes, des petits avaient dû entendre des oiseaux, se gargariser de leur cri printanier et du bleu de l’horizon, avant de mourir. Il avait fait beau temps et puis aussi mauvais temps, mais cela n’avait rien changé à la terreur devant ce ciel polonais, gueule effrayante qui engouffra tout un peuple. Il pleuvait, il neigeait, le soleil se levait radieux et les gens mouraient, sans que le manège de la vie terrestre s’arrête un instant. Pas d’éclipse pour saluer l’horreur et pas de catastrophe cosmique pour accueillir les morts, les millions de crevés. Rien. Pas même le silence. Les oiseaux piaillaient de joie à Auschwitz. Ils célèbrent en chœur le jour qui se lève, toujours plus glorieux. Nous pouvons nous réjouir : le Jugement dernier est remis à demain ! Oui, l’apocalypse a eu lieu, certes, mais le ciel continue de nous provoquer.
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Sous le ciel de l’Amérique, la vie est impavide. A Bay City, je n’ai que la mort dans l’âme. Je me rêve pendue, découpée en morceaux, ou encore je me prends pour une Ophélie verte, chancie, retrouvée noyée au fond de la piscine bleue de ma tante. J’imagine mes suicides. J’invente mes morts. Il y en aura eu tant pendant ces dix-huit années passées à Bay City. Mais pour se brûler la cervelle ou se faire sauter le caisson, il faut quand même croire à la vie et lui donner une quelconque importance. A Bay City, je n’ai aucune raison d’exister. Encore moins de mourir. Le ciel est saumure, je l’avale chaque soir. J’espère m’empoisonner aux fumées âcres du Michigan.
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Moi, je n'aime qu'Alice Cooper, réellement né dans le Michigan, à Detroit, comme moi et qui a trempé dans l'horreur de nos contrées et de nos petites villes américaines mesquines, immondes. Je chante à tue-tête à mes amies abasourdies Welcome To My Nightmare. En 1976, toutes les filles de Bay City sentent le shampoing Herbal Essence et le déodorant féminin Johnson's à l'odeur de poudre pour bébés. Alice Cooper, avec son khôl autour des yeux, ses cheveux noirs, ses serpents et ses vêtements de perpétuelle Halloween, est le diable en personne.
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En 1974 encore, je perds ce qui me restait de virginité vaginale dans une Plymouth 1970 Superbird Road Runner violette au toit noir. Nous allons le soir, toute une bande d’amies de Veronica Lane, Linda, Pamela et Patricia, dans un bois derrière le K—Mart pour nous entraîner à l’hétérosexualité, à ses pratiques éclairs et à des techniques de blow job qui vont faire de tous nos petits copains de l’époque des pères de famille éjaculateurs précoces, des batteurs de femmes, des violeurs en série ou des hommes adultères qui se feront une collègue dans un motel lors de voyages d’affaires à Detroit. La sexualité est somme toute à l’époque moins ennuyeuse que ma famille. Et puis parfois cela me rapporte un peu d’argent que je peux dépenser au K-Mart où je vais jusqu’à trois fois par jour pour m’acheter du vernis à ongles et me faire rembourser mes flacons achetés la veille dont je n’aime pas la couleur. Toutes mes copines prennent la pilule. On s’arrange avec des sœurs ou des amies un peu plus grandes que nous. Il ne faut pas tomber enceinte. Ca, c’est sûr. Cela pose trop de problèmes. L’avortement n’est pas évident dans le Michigan pour les enfants de treize ans dans les années soixante-dix et les faiseuses d’anges se font rares. Quand on est mal prises, on s’entraide le week-end avec des aiguilles à tricoter dans les cuisines désertées par des parents partis faire des courses à Saginaw. Mais rien n’est vraiment sûr et les perforations d’utérus ou les hémorragies tragiques sont à craindre. Pour les malchanceuses, elles conduisent à l’urgence de l’hôpital et aux aveux. La mort est presque préférable. Néanmoins, « les filles qui ne couchent pas » sont encore plus connes que nous, « les filles des voitures », « les filles des aiguilles à tricoter ». Elles rêvent de se marier avec des gars qui ont passé leur jeunesse à enfiler les femelles humaines et animales des environs, après les matchs de football par exemple où l’on finit toujours par enculer une jument ou une femme sans observer une différence sensible. « Les filles qui ne couchent pas » rêvent de se faire faire en douceur des gosses par des crétins aux yeux bleus et à la bite molle, frileuse, anesthésiée. Elles rêvent d’une maison plus grande que celles que l’on trouve à Veronica Lane. Elles rêvent d’un driveway dans lequel il y aurait quatre ou cinq voitures, une vraie piscine creusée comme celle de ma tante et de mon oncle et non pas une piscine hors terre comme toutes celles qui jonchent les cours du quartier. Elles rêvent d’une boite aux lettres dans la fente de la porte d’entrée, et pas d’un contenant en métal, collé à celui des autres. Elles rêvent de mariages blancs et de larmes sincères. D’aiguilles à tricoter aussi, mais pour la layette de bébé. Moi, je ne rêve jamais à rien. Surtout pas à l’avenir.
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l y a ceux qui s’en veulent de ne pas l’avoir aidé. Il y a ceux qui disent qu’il faut être lâche pour quitter la vie. Il y a ceux qui déclarent qu’on ne pouvait rien y faire. La vérité est quelque part, là où je n’ai pas prise.

(Héliotrope, p. 115)
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On me parle d’Israël, de l’idée de faire de l’horreur, de la peine, un territoire, une guerre, une identité. Mais je ne suis pas de Jérusalem, de Tel-Aviv ou encore des colonies de la bande de Gaza. Je suis une fleur nourrie au fumier de tôle du Michigan, née dans le Nouveau Monde. Je ne trouverai pas dans un pays une quelconque consolation. Je suis une fille des usines de Flint, une fille de la fumée toxique de la modernité américaine. Je ne vis les choses que par procuration. Je suis hantée par une histoire que je n’ai pas tout à fait vécue. Et les âmes des juifs morts se mêlent dans mon esprit à celle des Indiens d’Amérique exterminés ici et là, sur cette terre. Ils sont tous là présents en moi, parce que l’Amérique, du Michigan au Nouveau-Mexique, c’est cela. Un territoire hanté par les morts d’ici ou d’ailleurs, venus de partout, un territoire encore troué comme une passoire, même après le 11 septembre, les barricades et les fortifications frontalières. En lui, la mémoire comme le vent, s’engouffre d’est en ouest, du nord au sud, en hurlant son chagrin. Le ciel de l’Amérique est multicolore, mais il ne porte que les couleurs de la peine. Il héberge l’extermination des Amérindiens, abrite les désespoirs et les génocides de tous les exilés venus trouver refuge dans le grand cimetière qu’est cette terre. Ils sont venus de partout pour enterrer leurs espoirs, pour enfouir leurs douleurs dans les réserves des autres, de ceux dont les ancêtres naquirent ici, avant d’être massacrés.
Le ciel de l’Amérique est toujours en deuil du mal qu’il a su enfanter. Le ciel de l’Amérique est bleu, saignant. C’est une plaie béante, une hémorragie.
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Miss McDonald ne sent pas encore qu’avec des enfants comme nous, il n’y a rien à faire. On ne peut qu’attendre… que notre génération s’élimine, qu’elle se suicide, qu’elle meure du sida, qu’elle crève du cancer, d’un accident de la route ou d’une crise cardiaque causée par le gras de nos vies adipeuses et sottes. Miss McDonald meurt en 1975, décapitée dans sa voiture. Des jeunes gens souls, un dimanche, prennent le volant sans permis et roulent à tombeau ouvert. Ils tuent une dizaine de personnes sur l’Interstate 75 qui passe derrière la maison de ma tante et qui mène mythiquement en Floride, au bout du monde. Souvent je me promène au bord de la 75. Je fais du stop en espérant qu’on m’embarquera, me kidnappera, me ravira à la médiocrité de ma vie et que je pourrai me retrouver ailleurs, loin, bien loin de Bay City. Mais je me fais ramasser par des cons qui me reconduisent dans ma famille ou qui me tripotent avant de me laisser devant le K-Mart ou dans un rest area entre Bay City et Saginaw d’où je téléphone à la maison. Miss McDonald meurt, sans s’être mis dans la tête qu’il ne fallait rien attendre de cette jeunesse américaine des années cinquante et soixante qui n’est bonne qu’à produire des présidents des États-Unis portés sur la voiture, le blow job, le mensonge, la sécurité ou la guerre.
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Plus de poésie après Auschwitz, a dit un philosophe. Je pense en effet que la poésie aurait dû être interdite dès 1945. La poésie blasphème l’horreur de ce monde. Il est totalement indécent de croire dans les mots, dans l’art et dans l’espoir alors que les catastrophes empilent les cadavres sur cette terre.
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Mais qu'est-ce que ces Nord-Américains, ces Occidentaux peuvent comprendre à la mort? Il faut être oriental pour approcher cela...
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David a travaillé toute la nuit à la station-service où il est pompiste et caissier. J’aime l’odeur d’essence que son corps exhale. Je respire souvent son sexe pétrolifère, rassurant, véritable geyser et j’y trouve un certain bonheur. Le sperme de David a selon moi un goût d’essence. Quand je lui dis cela, David, dans un premier temps, s’excuse et puis il éclate de rire. Tous les garçons de Bay City sont circoncis. La mode et une conception de l’hygiène nord-américaine privent de prépuce tous les hommes du continent depuis des décennies. J’ai donc l’habitude de baiser avec des gars à la peau du pénis coupée. Mais avec David, je peux fantasmer que c’est parce qu’il est juif qu’il a en permanence le gland exposé et endurci.
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