"Clandestinement vôtre", premier roman de Charles Cédric Tsimi
Je n'avais ni emploi ni emploi du temps. Le temps vide emplissait mes journées.
Dans son premier roman « Clandestinement vôtre , publié dans la nouvelle collection Grenade des édtions JC Lattes, Charles Cédric Tsimi raconte l’histoire d’un jeune homme qui rêve de quitter le Cameroun pour étudier les Sciences Politiques en France .
Charles, jeune camerounais décide finalement d'accomplir ce rêve et de partir en France.
Sauf que tout n'est pas si simple et que l’administration française exige de sa part, un test qui prouve un niveau de langue française suffisant pour accéder aux papiers.
il n'y avait aucun avenir pour moi dans ce pays..;Je songeais à partir en France pour mieux y revenir. La République m'avait déjà sauvé une fois, dans ma tendre enfance, pourquoi pas cette fois? Nos destins, me disais-je naïvement, n'étaient-ils pas liés? Ce serait un mariage à durée déterminée, le temps de me former à l'école de la Terreur de Robespierre, pour revenir au bercail et m'imposer comme leader charismatique lors d'un coup d'Etat déguisé en élection. La jeunesse du Cameroun attendait qu'on la décalcine.
L'écriture sans-papiers était un tour de force, une magie noire, une première, une révolution... Non, plutôt une contre-révolution puisque l'imprimerie n'avait pas été inventée pour nous. Un sans-papiers, ça n'imprimait pas. Notre écriture étant clandestine, pas inclusive, il me fallait entrer dans le milieu de l'imprimerie avec fracas, quitte à fâcher les tonitruantes féministes de ce pays qui avaient pris la mauvaise habitude de m'agacer prodigieusement.
Oui, madame, après ma formation je reviens au Cameroun... du travail m'attend par ici Je gagne bien ma vie dans le cacao. Cette formation lyonnaise va juste me donner encore plus de valeur et le ministère des relations extérieures ne pourra pplus vraiment se passer de moi . Promis je ne vais pas caler dans votre beau pays, Madame..Je viens d'une famille respectacle et non misérable...je vous jure!"
Je me rendais à l’université la peur au ventre. Les bus qui assuraient le transport quotidien des étudiants entre la capitale et le site universitaire ne payaient guère de mine. En cas d’accident, l’État répondait aux abonnés absents. Pas de bouquet de fleurs. Pas de dédommagement. Pas de polémique nationale.
Ma mère m'avait accompagné seule en France, guère assistée par un médecin de l'Etat camerounais. C'est elle qui affronta tous les spécialistes, répondant brillamment à toues leurs questions. C'est elle qui crut me voir mourir entre ses mains après m'avoir vu naître entre ses jambes.
" Je me rendais à l’université la peur au ventre. Les bus qui assuraient le transport quotidien des étudiants entre la capitale et le site universitaire ne payaient guère de mine. En cas d’accident, l’État répondait aux abonnés absents. Pas de bouquet de fleurs. Pas de dédommagement. Pas de polémique nationale.”
En réalité, la condition des clandestins me fendait le coeur. Le sort de ces fusillés, c'est-à-dire aussi mon sort, le sort de l'humanité, était l'aîné de mes soucis. Mais dès qu'un sans-papiers avait le culot d'exister à côté de moi, je piquais une colère. Je tombais dans un malaise. Et, quand il s'éloignait, je prenais mon stylo pour dénoncer les injustices et me déclarer ami des petites gens. Qu'il était donc facile et paisible de parler au nom de ceux qui souffrent ! Je jouais à cette réelle comédie : celle des droits de l'homme ! Je saisissais ce que c'était qu'être un homme politique... de gauche : jouer. Mal jouer !
Paris pue le cul, avais-je noté au stylo rouge dans mon calepin à mon arrivée à Paris. Sacrée belle ville infernale, dont chacune des artères sent l'art passé et le cul présent. Parie pue le cul. Paris respire le sexe. L'ambiance parisienne est digne du cul. Elle incite au cul, davantage qu'à l'égalité, au socialisme.