AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Charles Wright (63)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le chemin des estives

Quel randonneur remplacerait son téléphone portable par « L’imitation de Jésus Christ » et sa Carte de Crédit par les « Oeuvres complètes » d’Arthur Rimbaud, Edition La Pléiade ?



C’est le choix réalisé par Charles Wright et Benoit Parsac pour pérégriner d’Angoulême à Notre Dame des Neiges dans les montagnes ardéchoises. Sept cents kilomètres, en été, vers l’abbaye où Charles de Foucauld fut moine avant de rejoindre l’Afrique du Nord. Dans des paysages variés, en partie désertés, au milieu d’une faune et d’une flore magnifiques, nos deux marcheurs ont le temps de lire, de méditer, de discuter, de se disputer.



Ils sont l’un et l’autre au noviciat jésuite de Lyon. Benoit semble être un Soldat de Jésus discipliné ; Charles a le profil d’un corsaire en quête de découvertes. Esprit éclectique il a publié un ouvrage sur « Casanova ou l'essence des Lumières » et un autre sur « Le chemin du coeur » consacré à l’Abbé du monastère trappiste du Mont des Cats, puis ermite, André Louf (1929-2010). Toujours en train de vivre le grand écart, sa progression est aussi curieuse que joyeuse et confronte ses méditations aux enseignements de « L’imitation de Jésus Christ », aux errances des oeuvres de Rimbaud et aux questionnements de Charles de Foucauld.



Démarche qui rappelle les excursions de Sylvain Tesson ou celles de François Sureau dans « Ma vie avec Apollinaire ». A la grande différence que ceux là avaient leur téléphone portable et des moyens de paiement.



Quêter le gite et le couvert durant plusieurs semaines, dans une région en déclin, en dépeuplement, est une école d’humilité car les refus, les mépris, les craintes sont nombreux. Mais c’est aussi la source de rencontres authentiques, variées, parfois croustillantes. Benoit et Charles ont été accueillis tour à tour dans les salons dorés d’une préfecture ou le logis plus modeste d’une employée d’un EHPAD. Croyants ou incroyants, jeunes ou vieux, leurs hôtes, ouvrent leurs coeurs, leurs interrogations, leurs passions et ces rencontres sont à chaque fois fort différentes et m’ont passionnées et réjouies.



Le chemin des estives nous mène au coeur d’une France rurale, oubliée par nos gouvernants, vivant à son rythme paisible, où les habitants sont la véritable richesse et l’espoir d’un avenir où « le bonheur est à portée de main, il suffit de faire confiance et d’ouvrir les yeux ».
Commenter  J’apprécie          1162
Le chemin des estives

Je l'avoue , j'avais éprouvé un immense plaisir à lire ," Immortelle randonnée " de Rufin et "Sur les chemins noirs " de Tesson et c'est tout naturellement que j'ai voulu découvrir " Le chemin des estives "de Charles Wright . Mon intérêt pour ce livre était du reste décuplé par le fait que , le Massif Central et plus particulièrement le département de la Creuse , département cher à mon coeur,étaient le cadre de cette longue aventure et qu'il me plaisait particulièrement de les découvrir à travers le regard d'un pèlerin de passage .Un pèlerin ou plutôt deux puisque Charles était accompagné de Parsac , jésuite en quête de réponse à une foi particulièrement forte mais sans certitude quant à la poursuite d'une vocation qui pouvait s'en trouver renforcée ou ...ébranlée.

Imaginez , deux pélerins sans le moindre sou en poche , sans lieu de repos bien défini , il en faut du courage et de la volonté....

Je n'en dirai guère plus sur ce contexte particulier et cette épreuve que l'auteur nous donne à partager , tout est sur la quatriéme .

Non , je vais plutôt vous parler de mon ressenti , de mon intérêt qui s'est un peu émoussé au fil des quelques 700 kilomètres du parcours . Déjà , il ne faut pas ignorer le contexte religieux qui anime les deux personnages , un contexte qui pourrait gêner certains lecteurs , et qui entérine le fait que le christianisme connait un grand déclin dans les régions traversées . Les églises y sont souvent trés mal entretenues , les paroisses confiées à des prêtres africains ou polonais . Ensuite , il y a les gens dont l'accueil n'est pas toujours à la hauteur, désintérêt oblige , où le statut de pèlerin n'est plus un laisser - passer universel comme cela a pu être le cas dans un passé révolu . Certes , certaines personnes restent généreuses mais on se pose la question de savoir s'il ne s'agit pas plus de vaincre l'ennui et la solitude dans un monde rural de plus en plus dépeuplé que de pratiquer la charité chrétienne .

Les bourgs traversés sont ( trop ? ) rapidement décrits , le plus souvent là aussi pour traduire leur absence de vie . Reste la nature et là, le charme opère : solitude , liberté de l'esprit , absence des médias , des réseaux sociaux et une grand paix intérieure qui s'installe , avec la fatigue comme seule compagnie . C'est amusant , le maire d'un des villages traversés où j'ai travaillé quelques années m'avait dit que le département de la Creuse deviendrait un jour un " département ressource ", idée parfaitement " juste " que l'on peut du reste étendre à toute la contrée parcourue . Alors , Charles Wright nous confie ses yeux mais , surtout , il nous livre ses pensés érudites , vraiment trés érudites pour délivrer des messages qui , s'ils sortent des ornières du chemin , peuvent paraître redondantes et fastidieuses . J'avoue m'être parfois ennuyé en dehors des moments de rencontres du soir , drôles ou émouvantes . A peine saurons nous que Parsac sortira de cette épreuve conforté dans ses idées , contrairement à Charles mais leurs échanges de points de vue qui auraient pu s'avérer essentiels n'auront jamais lieu .

Aprés , il faut le reconnaître , l'écriture est belle et efficace .

Peut - être ce livre subjuguera - t -il ,nombre de croyants qui y verront des motifs d'espérer et tant mieux . Pour moi qui suis une personne baptisée , qui a fait sa Communion (trois jours d'école en moins , tout de même ,et des cadeaux !!! ) qui s'est mariée à l'église et qui souhaite passer par l'Eglise pour le grand départ ( plus tard , les valises sont pas faites ) , bref , une personne qui a suivi le chemin des hommes et femmes de l'époque , sans croire , athée , donc , mais pour faire " comme tout le monde " et trés respectueuse par contre des idées des gens convaincus , certains faisant du reste partie de mes amis proches , je n'ai sans doute pas pu percevoir le message profond que , néanmoins , je n'attendais pas .

Un avis mitigé , certes , mais aucun regret de m'être lancé sur ce " chemin des estives " et traversé une contrée fabuleusement belle , au calme extraordinaire .



Commenter  J’apprécie          795
Le chemin des estives

Tout quitter et partir à l'aventure sur les sentiers. Qui de nous n'en a pas rêvé? "Ne plus rien prévoir, s'ouvrir à l'inattendu, n'appartenir qu'à la route".



Charles Wright a beaucoup étudié avant de devenir journaliste. Le travail, les amours, le métro, les infos, les réseaux sociaux... Cet homme avait une vie parisienne bien remplie. Mais quelque chose de plus grand l'appelait ailleurs. C'est ainsi qu'en 2019, il rejoint une communauté de jésuites pour y faire son noviciat. Veut-il devenir moine? Il ne le sait pas encore. Pour l'heure, il explore les régions du cœur que le monde moderne laisse en jachère, la bienveillance, la gratuité, le partage, le dénuement.



Au cours de ce noviciat, il doit, avec un autre novice, s'acquitter d'un pèlerinage. Cela fait partie de leur chemin spirituel. A pied, sans argent et sans tente, Charles et Benoît devront parcourir près de 700 kilomètres pour rejoindre un monastère dans le Sud. Pendant un mois, ils seront des vagabonds, des mendiants, des pèlerins d'un autre temps.



Le chemin des estives est le récit de ce long voyage sur les routes de France, une aventure humaine avant tout. Car devant quémander chaque jour le gite et le couvert, ils vont de rencontre en rencontre. Mais la méfiance et l'individualisme s'étant installés partout, ils ne trouvent pas toujours l'âme charitable qui les sauverait de la faim. Qu'il est humiliant de réclamer son pain! Qu'il est inconfortable de dormir à même le sol! Mais quelle joie quand les portes et les cœurs s'ouvrent, vous offrant la confiance en même temps qu'un bon dîner. "La pauvreté est une voie vers la joie parce qu'elle ouvre un espace illimité d'accueil. Quand on n'a rien, on est obligé d'ouvrir les mains, et on se dispose à tout recevoir."



Au cours de son périple, Charles Wright dresse un état des lieux du christianisme. Tous ces villages jadis construits autour des églises semblent avoir perdu leur phare et les messes du dimanche ne font plus recette. "Il faut être aveugle pour ne pas voir qu'en France le christianisme connaît une éclipse, un passage par le vide, une traversée des tombeaux." nous dit-il. "Du Christianisme, il ne reste que des lambeaux: le culte des morts, les enterrements, la Toussaint, les Rameaux..."

Cette désertion pourrait le faire douter mais pas de regrets ni d'amertume pour notre apprenti jésuite. Franciscain qui s'ignore ou infiltré, celui-ci voit Dieu en toute créature vivante et au fond se fiche bien des églises. Un âne, une vache le mettent en joie. Pour lui, l'amour est dans le pré et non dans le kitsch des statues en plâtre.



Mais il est tout de même légitime de s'interroger. Dans ce monde d'images et de vitesse, cela a-t-il encore un sens de vouloir devenir moine? A écouter nos politiques, la valeur d'un homme ne se mesure qu'à l'aune de son utilité sociale. Et quoi de plus inutile qu'un moine?

Pourtant Charles Wright croit en un avenir pour ces hommes qui vivent hors de la course. "L'époque a besoin d'hommes de silence, de solitude et de prière. On ne peut pas vivre indéfiniment sans orienter son regard du côté des étoiles".

Des étoiles, nos deux novices vont en voir beaucoup, eux qui dorment le plus souvent en plein air. Et peu à peu, ils prendront goût à cette vie qui va de l'avant, sans savoir où elle va. "La vie errante est la liberté à l'état pur."



Loin des radios qui déroulent l'information en continu, loin des réseaux sociaux qui réagissent trop vite et trop fort à la moindre chose, nos deux hommes vont se reconnecter à la nature et à leur intériorité." Quand on se coupe du vacarme ambiant, qu'on se dégage de l'écume, l'âme s'allège et se dilate. On devient attentif à ce qui compte vraiment et se produit souvent sans bruit, dans le secret, loin des caméras: un lever de soleil, l'apparition d'une bête, le souvenir d'un être cher."



Oh bien sûr il y a des moments de découragement, quand la nuit tombe et que l'avarice garde les portes fermées. Quand il faut dormir dans la pluie et le vent. Quand les coutures de vos chaussures vous lâchent sur un chemin de pierrailles. Ou quand l'autre vous agace, cet autre avec lequel vous cheminez mais que vous n'avez pas choisi. C'est presque rien mais ça vous titille jour après jour, ses petites manies. C'est aussi cela Le chemin des estives, un chemin d'acceptation et de fraternité. Apprendre à s'oublier pour mieux découvrir l'Autre.



De belles rencontres, ils en feront. Des gens de peu qui partageront leur repas ou leur prêteront une chambre. Sans surprise, ce ne sont pas les plus riches ni les plus dévots qui seront les plus généreux. Les jardins des maisons bourgeoises ont de hauts murs pour se protéger des mendiants. "C'est une peine de l'avouer: jusqu'ici, ce n'est pas chez les chrétiens patentés que nous avons reçu le meilleur accueil..." Mais ils vivront des soirées mémorables en compagnie de vieux retraités ou de marginaux retirés du monde. Le hasard (ou faut-il l'appeler Dieu?) finissant toujours par mettre un bon samaritain sur leur route.



Ainsi Charles Wright chemine, se nourrissant des pensées de Charles de Foucauld et de la poésie de Rimbaud, deux hommes qu'il admire, deux hommes qui vivaient en dehors des normes et qui poussaient toujours plus loin la découverte et le chemin.

"L'homme n'existe-t-il pas que dans le mouvement qui l'ouvre à l'infini? N'y a-t-il pas dans son cœur un appel à ne jamais se contenter du rivage?"



Mais comment Charles Wright, nourri de la pensée de ces hommes épris d'absolu et de liberté pourrait-il finir ses jours cloîtré dans un monastère? Les paysages sauvages du Massif Central ont exercé une fascination sur son esprit. La vie de pèlerin lui a donné le goût d'une vie humble mais sans contrainte. "La sobriété n'est pas la vie à basse intensité." nous dit-il.

Aussi, sans surprise, l'auteur quittera le noviciat à la fin de cette aventure pour s'installer dans une vieille ferme en Ardèche. Il y écrira son récit et d'autres ouvrages encore. C'est décidé, l'homme ne sera pas moine mais écrivain, ce qui est une autre façon de se cloitrer.



J'ai refermé Le chemin des estives" à regret, tant je m'étais attachée à ces deux-là, tant j'enviais leur confiance et leur foi inébranlable. Et si c'était le "hasard" qui avait mis ce livre sur mon propre chemin? Croyant, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie ou pas du tout, ce Chemin des estives est à mettre entre toutes les mains, chacun pouvant y puiser sa manne. Charles Wright ne fait ni angélisme ni prosélytisme. Il nous ouvre simplement son cœur et nous invite à partager ses réflexions. Et comme l'homme est cultivé, intelligent et plein d'humour, je vous assure qu'on ne s'ennuie pas une seconde au cours de ce voyage.

D'ailleurs, conquise par cet idéal du peu et de l'instant présent, je lui laisse le mot de la fin:

"Ne partageant pas le credo actuel selon lequel une vie réussie est une vie remplie, je prends plaisir à gaspiller les heures, à me délecter du vide, à écouter le silence. En guise de télévision, la fenêtre de ma chambre découpe un bout de montagne et de ciel bleu."
Commenter  J’apprécie          639
Le chemin des estives

Une ode à la liberté, découvrir et se redécouvrir entre les monts d'Auvergne. Oser penser et oser vivre simplement sans l'injonction des ondes !



L'étonnante invitation au voyage, de Charles Wright, est servie par la savoureuse métaphore de Rimbaud, " j'irai par les sentiers, picoté par les blés", "rêveur, j'en sentirai la fraîcheur, à mes pieds".



Et en même temps citant "arides et desséchés sont les chemins, qu'il faut suivre"... Charles Wright semble se contredire. La fin de la phrase, " jusqu'à la source", dévoile le propos, vivre avec son corps toutes les rencontres, mais soutenir aussi une autre quête : quelle sera ma place demain dans ce monde ?





L'exercice de la marche est peut être une mode, l'envisager comme un temps de repos ou de recul, une nécessité. Inverser toutes nos priorités devient les premiers jours une pirouette insensée, stupide ou dangereuse pour les uns, après 5 jours de marche, changer l'ordre de ses ultimes devoirs, une évidence.





Beaucoup ont adoré Sylvain Tesson et ses Bois noirs, d'autres Stevenson et son âne...Combien sont émus de raconter leurs St Jacques. Charles et Benoît Parsac difficilement miscibles forment un couple bancal qui à pas comptés finiront par aplanir leurs amertumes pour mieux optimiser l'attelage.



L'invitation de Charles Wright n'est pas d'aller à la découverte du plus déprimant des parcours. Au coeur de la France, un espace unique nous ouvre des paysages et des sentiers à saisir d'émotion le plus desséché de nos citadins. L'Auvergne déversera tout au long de leurs découvertes une nature démesurée. Les arbres centenaires vous livreront les notes cristallines, de leurs locataires musiciens, des oiseaux perchés sur les plus hautes branches.





Tout devient émerveillement et l'accueil des pèlerins engendre une richesse indicible dans le calme des repas partagés d'une lenteur auvergnate. C'est le temps que nos deux compagnons, cultivent pour abuser des pauses. Les siestes et les lectures voient défiler Julien Gracq, Rimbaud, La Roche Foucauld, Camus, le Tao, Chardin, Homère....



On commence à comprendre que la sobriété n'est pas une vie de basse intensité, avouent-ils, page 167. " Ces petits riens si on sait les saisir, révèlent leur poids de beauté et de mystère."



Au terme de ce sentier les deux novices suivront deux chemin différents, l'un devenant Jésuite, Charles trop sensible à son besoin de grande liberté poursuivra sa route en dehors du noviciat.
Commenter  J’apprécie          450
Le chemin des estives

Voici donc l’aventure de deux novices jésuites, temporairement pèlerins mendiants, jetés à pied et sans argent, sur les chemins qui les mèneront d’Angoulême à l’abbaye Notre-Dame des neiges.

Ce pèlerinage imposé aux novices est un très judicieux révélateur de la nature authentique de leur foi car, au-delà de la véritable épreuve physique, à la croisée des chemins, l’acédie les guette.



C'est curieux comme l'écriture de Charles Wright m’a immédiatement et craintivement fait penser à celle de Sylvain Tesson.

Craintivement, car je n'aime pas l’arrogance bourgeoise et éthylique de ce dernier.



trois liens unissent « Le chemin des estives » et « Dans les forêts de Sibérie »

Le désir de rupture, la convocation d’auteurs et l’énoncé de pensées.



Chez Tesson, Les références aux auteurs catalyseurs de son esprit sont un déballage prétentieux, chez Charles Wright, elles sont un véritable point d’appui, un socle sur lequel poser les pieds sur les chemins.

Néanmoins ces références à Arthur Rimbaud, à Charles de Foucauld m’ont paru un peu trop présentes, presque obsessionnelles. Le thème du livre m'invitait plus parmi les vaches et les puys, voire l'introspection, les rapports avec la foi, les difficultés de compréhension des non croyants, les églises désertées et à la suspicion au lieu de la bienveillance. Je ne m’attendais pas à lire des biographies d’auteurs.



Allez, je continue sur ma lancée : Même les « pensées » assenées – autre point commun aux deux auteurs – n’ont pas la même épaisseur. Banalités et évidences chez l’un, elles deviennent nettement plus spirituelles - certes, sous des aspects parfois enfantins ce qui n’est pas un défaut - chez l’autre. L’autre étant Charles Wright, vous l’avez compris.



Je sais, on ne peut pas plaire à tout le monde, et ceci n’est que mon impression.



Donc, bien que la forme et le style de ces deux témoignages les unissent, nous sommes ici à l’exact opposé d’une prétention mal déguisée en humilité, d’un retrait de la société très assisté et très alcoolisé.

En parcourant le chemin des estives, nous sommes dans l’humilité authentique, la rupture totale avec la société des injonctions. Et pourtant, pas de Sibérie, juste ce magnifique Massif Central, à deux pas de chez nous



Un témoignage qui m’a beaucoup plu : simple, sincère, authentique sur la nature humaine, notre société et sur la foi chrétienne d’un homme droit qui ne pourra jamais se soumettre à des entraves, de quelque nature qu’elle soit….







Commenter  J’apprécie          4013
Le chemin des estives



« Pour expliquer cette incongruité, je dois faire mon coming out chrétien. J’ai bien conscience qu’afficher cette qualité n’est pas la meilleure façon d’entrer dans un livre. Avouer par les temps qui courent que l’enseignement d’un charpentier juif donne du sel à votre vie, la conduit même vers les profondeurs, c’est se condamner à récolter des haussements d’épaule. »



Après une vie professionnelle riche, Charles Wright décide à trente-sept ans d’intégrer le noviciat jésuite de Bron. Durant sa formation, il doit partir un mois (le mois « mendiant ») avec un autre novice qu’il n’a pas choisi, cheminer sur les routes en quêtant chaque jour le gîte et le couvert. Sans un sou en poche, sans téléphone, sans carte de crédit, il choisit d’emporter dans son sac la pléiade de Rimbaud et L’Imitation de Jésus Christ, et de traverser le Massif central d’Angoulême à Notre Dame des Neiges. Ce parcours n’est pas anodin, ses pas le portent dans une région peu peuplée sur les traces de Charles de Foucauld.



Charles Wright nous raconte ici son périple avec Benoit Parsac, ce qu’ils vivent au quotidien alors que la cohabitation n’est pas toujours facile. Il nous fait découvrir des paysages magnifiques dans ce coin de France qui compte désormais plus d’églises que de fidèles. Il nous relate surtout les rencontres avec des personnes, bien souvent athées d’ailleurs, qui acceptent de les recevoir et de partager. Ce voyage met en lumière quelles sont les vraies richesses, loin de toute possession matérielle, sans néanmoins nous leurrer. Ne rien posséder, ne pas savoir ce que le jour vous réserve, ne pas être sûr de manger à sa faim, compter sur la générosité d’autrui, n’est pas toujours rassurant et idyllique.



En arrière-plan, nous devinons que Charles Wright réfléchit s’il se sent prêt à devenir jésuite. Vous connaîtrez sa réponse à la fin de ce livre. Bien que ce livre ne soit pas spécifiquement destiné à un lectorat croyant, il m’a fait réfléchir à la place du chrétien dans notre monde. De façon prosaïque, dans cet environnement où l’on me répète sans cesse de me méfier de tout et de tout le monde, oserais-je accueillir deux hommes inconnus qui demandent l’aumône ?





Commenter  J’apprécie          381
Le chemin des estives

A 36 ans, après avoir bien roulé sa bosse, Charles Wright devenu aspirant Jésuite doit réussir l'épreuve', découvrir la vie du peuple en voyageant un mois sans argent, sans smartphone, en duo avec un aspirant qu'il n'a pas choisi.



Au long des 700km traversant le Massif central l'auteur raconte la faim, la mendicité à laquelle on finit par s'habituer, l'accueil bien souvent par les vieux, les plus démunis, les incroyants, l'entente parfois difficile avec son compagnon Parsac, mais aussi l'émerveillement face à la nature.



Il en résulte une prose simple et belle, une prose du coeur, évoquant fréquemment ses deux maîtres que sont Rimbaud et Charles de Foucauld.



Me reste l'image de l'accueil de cette vieille de 92 ans: "La mort est devant moi. Quand je repense à ma vie, ce qui m'a rendue heureuse, c'est les gens à qui j'ai rendu service"





Commenter  J’apprécie          340
Le chemin des estives

« Une fois encore, je reçois une leçon d’humanité de la part de deux incroyants. Comme un vin tourne à l’aigre, il arrive que le christianisme vire à l’idéologie. Dans ses rangs se trouvent encore des doctrinaires qui crachent des anathèmes et cherchent à tout prix à amener les autres à la vérité dont ils se croient les dépositaires. Mais le christianisme n’est pas une opinion, une idée à laquelle on tient. Charles de Foucauld dit qu’il faut « bannir l’esprit militant ».



Il y a cinq de cela l’auteur, alors engagé dans un noviciat jésuite, est parti sur les grands chemins du GR4, pendant trente jours. Il était accompagné d’un autre novice, Benoît. Pendant cette période, pour la réalisation de cet exercice, ils s’étaient engagés à ne rien emporter avec eux et de quémander chaque jour eau, nourriture et logement… Un exemple de pauvreté évangélique on ne peut plus décalée avec notre époque connectée et marchande.



Partis d’Angoulême ils se dirigeront vers le Massif central, pour le traverser intégralement. Le but ultime est l’arrivée en Ardèche, à l’abbaye Notre Dame des Neiges où Charles de Foucauld a été brièvement novice. Le parcours de cet homme a toujours fasciné Charles Wright, qui est lui aussi incapable de se fixer longtemps quelque part. Mais c’est avec deux livres qu’il aborde ce pèlerinage : l’œuvre complète d’Arthur Rimbaud dans une édition Pléiade fatiguée et un classique de la littérature religieuse, « L’imitation de Jésus-Christ ».



Ce duo qu’il forme avec Benoît connaît rapidement ses premiers tiraillements. Il faut dire que ces deux hommes sont on ne peut plus dissemblables. Et chacun devra supporter l’autre jusqu’au bout du parcours ! Charles Wright n’est plus tout jeune, il a multiplié les expériences dans divers environnements professionnels et religieux sans parvenir à trouver une ligne directrice à son existence.



Ce mois de juillet est très chaud, et les marches sont épuisantes comme il fallait s’y attendre. Cette randonnée difficile va les mener au bout d’eux-mêmes…



J’aime ces récits qui prennent les chemins buissonniers pour des leçons de vie. Mon préféré dans ce genre, depuis sa lecture dans les années 1970, reste « Chemin faisant » de Jacques Lacarrière. J’ai aussi aimé plus récemment « Sur les chemins noirs » de Sylvain Tesson. Et je dois avouer que ce « Chemin des estives » tient bien la comparaison. Evidemment cette relation de pèlerinage a ses aridités : on n’échappe pas à une forme de monotonie malgré les nombreuses digressions autour de la vie de Rimbaud et de Foucauld. Mais globalement on suit avec intérêt les aventures de ces deux novices, dont l’un est raide dingue des vaches ! Et il va en rencontrer beaucoup en chemin.

Commenter  J’apprécie          290
Le chemin des estives

Un très grand merci à Babelio et aux éditions Flammarion J'ai lu pour l'envoi de ce livre solaire.

J'ai passé un excellent moment en sa compagnie. Que de belles réflexions, paysages. Je me suis régalée.

Lisant souvent des livres de marcheurs j'ai bien retrouvé cet esprit qui colle à la peau des poètes-marcheurs voire philosophes. Se dépouiller pour mieux recevoir non des choses inutiles mais juste l'essentiel de quoi subvenir à ses besoins primaires et le reste à vous de voir que se soit la foi en soi, aux autres ou toute autre forme de spiritualité. Marcher c'est avancer vers soi vers les autres, c'est quitter son monde matérialiste pour un monde autre plus léger sans doute. Tu n'as pas, demande au chemin et tu recevras.

C'est tellement beau à lire que j'ai eu du mal à le quitter.

Très belle plume, poétique et teintée d'humour.

J'ai passé un agréable moment et mon dieu que ça fait du bien de pouvoir se ressourcer au cœur d'un livre. De constater que vous n'êtes pas seul à croire que l'important ce n'est pas d'avoir mais d'être dans le moment présent tout simplement.

Faites de la marche et vous comprendrez.



Je ne m'étale pas car beaucoup de très belle critiques me précédent.



Encore merci pour ce beau partage.
Commenter  J’apprécie          230
Le chemin des estives

Je confesse que le confinement m'a laissé des séquelles. La plus importante, c'est cette envie de liberté, de ne plus avoir de périmètre ni d'horaire de sortie. Alors je marche, je vis dehors, je fais du vélo. Je recherche l'immensité au bout de la rue, la vue dégagée sur la mer, les sommets ou du vert. Et bien entendu, je lis des livres de marcheurs, d'ermites, de road trips. Des livres sur le choix d'être où on veut. Alors quand j'ai vu sur Facebook (parce que parfois un réseau social ça a du bon), la photo d'une lectrice tant absorbée par sa lecture de ce roman lors d'un voyage en train, tentée de louper son arrêt, voire de tirer sur le signal d'alarme pour prolonger le moment, je n'ai pas hésité.

Je viens de le refermer et comme son auteur, je suis un peu triste que le voyage soit déjà fini. J'ai vraiment passé un moment délicieux. Les pages ont fait résonné en moi une multitude de cordes sensibles. J'aurais bien aimé que l'auteur puisse rencontrer ma grand-mère. Elle était de ces croyants qui vivent leur foi au quotidien, par une multitude de petits gestes vers l'autre, sans en faire de publicité. Au contraire de certains donneurs de leçon qui vivent sans générosité, mais font un pèlerinage annuel qui devrait racheter leurs fautes des 12 derniers mois. Elle était joyeuse, blagueuse, marcheuse. Parfois elle partait en retraite. Elle m'a légué j'espère son naturel joyeux, un peu de sa gentillesse et surtout son goût pour la marche. Enfant, elle m'emmenait à l'église et je chantais à tue-tête. Elle ne me l'a jamais interdit ; on s'asseyait juste vers fond pour ne pas déranger les autres. En revanche, la foi n'étant pas génétique, je suis passée à côté. Peut-être pas toujours convaincue par les discours parfois un peu poussiéreux et austères de certains catholiques. Il reste que j'aime les églises et l'épaisseur de leurs silences. Cette odeur particulière de cire, d'encens, de poussière et de pierre froide. J'aime aussi entrer dans un lieu de culte d'une autre religion. Où la densité de silence s'intensifie de mystère, d'inconnu. J'aime le recueillement. Je regrette le manque de spiritualité de notre vie actuelle. Alors je lis. Alors je marche.

J'aime aussi l'idée que l'autre est bon. Qu'on n'est pas tous méchant. Je me dis que si l'on met de la bonté dans sa vie, elle va finir par déteindre sur les autres et se multiplier. Alors cette marche , au rythme de la générosité des bonnes âmes, a été une bouffée de fraicheur, d'espérance. La connaissance de pas mal de coins auvergnats a ajouté à mon enchantement. Je salue le courage des deux compagnons. Je l'avoue, je n'oserais pas. Trop habituée à prévoir, j'ai besoin d'avoir un chemin et un planning, même flou. Mais j'aspire à me défaire de ces marottes qui peuvent devenir des tares. Et ce récit donne des bouffées d'allègement. Des envies de se débarrasser du trop. Trop de choses, trop de mails, trop de bruit, trop de réseaux sociaux. Bon, on garde babelio quand même.

Ce qui est appréciable, dans ce récit, c'est la candeur et la franchise de l'auteur à dire que non, ce n'est pas évident. Avec son compagnon de route ils ont mal aux pieds, ils tâtonnent à trouver la façon de demander à manger ou un toit pour la nuit, ils s'agacent, ils cherchent des toilettes, ils avouent leur foi chancelante, ils s'émerveillent des paysages et de la générosité qui se cache derrière des portes ou des visages inattendus.

Et on se pose fatalement la question : et moi, est-ce que j'ouvrirais ma porte à des vagabonds ?

C'est également en filigrane, une étonnante double biographie de Arthur Rimbaud et Charles de Foucauld . Comme je connaissais un peu le premier (peu versée dans la poésie) et très peu le second (encore moins versée dans la vie des saints), ce fut aussi l'occasion d'enrichir ma culture générale.

Je suis juste navrée pour Charles Wright qu'il ait du traverser cette zone en n'aimant pas le fromage. C'est un…sacrilège.



Alors, faut-il le lire ? Oui. Ce livre est une lumière, un sourire. Pas de panique si vous n'êtes pas de la partie (catholique) : ce n'est pas non plus un récit qui tente de convaincre les incroyants. Même si ce roman a du forcément et à juste titre passer en bonne place dans les conseils de lecture de Pèlerin magazine, il est tout public. Humain.



Message pour l'auteur : moi non plus je n'ai pas encore réussi à voir celui qui peint les petits traits rouges et blancs sur les GR.

Commenter  J’apprécie          221
Le chemin des estives

Je remercie Babelio et les éditions Flammarion, J’ai Lu pour ce livre dont j’ai été bénéficiaire lors de la dernière opération masse critique.



Le début du livre est de bon augure. Cette édition de poche glisse des caractères de bonne taille, l’interligne est généreux, les chapitres sont titrés, l’éditeur a eu la bonne idée de schématiser le tronçon du GR 4 parcouru avec des points d’étapes illustrés, le tout ne peut que rencontrer mon approbation.



Charles Wright a 37 ans. Il nous dit que son année au noviciat l’a mis face à son inaptitude à épouser une forme de vie, à se décider sur une orientation à prendre. Parcourir à pied 700 km d’Angoulême à l’abbaye Notre Dame des Neiges où a vécu, une petite année, Charles de Foucauld devrait donner selon lui une réponse à sa désorientation. Ce sera une marche éprouvante, dans une partie de France dépourvue de population, à perte de vues des pâtures, des bois, des crêtes, des volcans, une France sauvage. Sur ce projet, une grosse difficulté qui s’ajoute aux autres, voyager avec un compagnon qu’il n’a pas choisi. Pendant quatre semaines, ils devront se supporter et tâcher d’avancer ensemble, dans une promiscuité de chaque instant et des conditions de vie qui mettra les nerfs à rudes épreuves.



Voilà, Charles en route avec Benoit Parsac, quarante ans. Ils mendieront la nourriture au bout de journées de trente kilomètres de marche. En effet, il était décidé qu’ils voyageront sans un sou en poche. Pas de smartphone, pas de tente, juste une carte IGN. Le dimanche sera, journée de repos, ponctué par une eucharistie.



Le narrateur est Charles qui aura pris des notes pour témoigner de faits survenus lors de ce pèlerinage. Il ne cachera pas les difficultés rencontrées avec son compagnon de route. Il nous apprendra que les campagnards sont plus généreux que les citadins, qu’il ne faut pas être chrétien pour être généreux.



Les parties du récit sur lesquelles, moi lecteur, je me suis le plus accordé, ce sont, les couples, les solitaires, les cabossés qui ont offert le gîte et le couvert, qui ont vidés leur sac, c’est-à-dire qu’ils se sont timidement livrés sur leurs difficultés de vie. A cela Charles précise : « Parsac et moi nous avons été les réceptacles de ces cœurs qui s’épanchent, d’écouter sans juger, et s’il faut absolument dire quelque chose, de les assurer que nous sommes frères dans le malheur. Ce sera une amitié d’un jour. Nous poursuivrons notre route, eux la leur ».



Une femme de quatre-vingt -douze ans nous donne à boire. Elle nous dit : « Mes petits, quand je repense à ma vie, ce qui m’a rendu heureuse, c’est les gens à qui j’ai rendu service …. Charles pense alors à une parole de Jean de la Croix : « Au soir de notre vie, on sera jugé sur l’amour. »



Lors d’une rencontre Charles souligne : Une fois de plus, je reçois une leçon d’humanité de la part de deux incroyants. Certains doctrinaires crachent des anathèmes et cherchent à tout prix à amener les autres à la vérité dont ils se croient dépositaires. Mais le christianisme n’est pas une opinion, une idée à laquelle on tient. Le chrétien doit manifester de l’accueil, une relation aimante. Dominique et Marie ne sont pas chrétiens mais ils nous manifestent une hospitalité. Le Christ nous enseigne dans l’Evangile : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger. J’ai eu soif et vous m’avez donné à boire. »



Charles met en toile de fond de la marche ce qu’ont dit et réalisés Rimbaud et Charles de Foucauld sur lesquels, il est très documenté.



Il est également très documenté sur les vaches limousines, de salers, les Aubrac et que sais-je encore. Il a sur elles un regard bien veillant, un échange confiant qui se manifeste par une caresse, qui lui vaut en retour un coup de langue râpeuse.



Lors d’un repas où nous sommes accueillis, Bertrand nous dit : « L’Eglise se défait à vue d’œil. Pendant des siècles, ce coin de terre était quadrillé par près de trois cents paroisses. Il n’y en a plus que six. Du christianisme, il ne reste que des lambeaux : le culte des morts, les enterrements, la Toussaint, les Rameaux … ; quelques femmes fidèles, souvent âgées maintiennent la lampe allumée de l’église de village ; elles veillent quand tout s’éteint. Qui ouvrira l’église à leur mort ?



Plus loin, dans le texte, quelques lignes que je partage entièrement. « … la souffrance n’a pas de sens, et ne sert qu’à envenimer les existences. Elle est contre nature. Nous sommes faits pour le bonheur. L’Evangile, qui orchestre le passage des larmes du Vendredi saint à la joie du dimanche de Pâques, de l’humilité du Golgotha au Glorifié de la Résurrection, ne dit pas autre chose.



J’ai résisté à faire un saut, en cours de lecture, sur le dernier chapitre ou l’épilogue, me demandant que va apporter à Charles ces 700 kilomètres de marche, parfois et même souvent de tortures ?



La réponse s’offre à vous futurs lecteurs !



Commenter  J’apprécie          220
Le chemin des estives

Charles Wright, qui nous avait offert en 2018 un livre admirable sur la vie de Dom Louf intitulé Le chemin du cœur que j’avais chroniqué ici, nous propose ici un autre chemin, un chemin plus personnel. A 37 ans, à l’occasion de son noviciat chez les Jésuites qu’il finira par quitter, il lui est demandé, avec un autre compagnon de route, d’expérimenter pendant un mois la vie d’un pèlerin mendiant. Et il part, avec un sac à dos, sur les chemins de la Creuse, du Massif central, de la France cantonale comme il le dit lui-même, en direction de Notre-Dame des Neiges. Ce livre est le fruit de ce qu’il a noté jour après jour, avec Rimbaud dans une main et l’Imitation de Jésus-Christ dans une autre.



Charles Wright ne ménage pas sa peine à nous décrire son parcours, ses déconvenues, ses joies, ses difficultés, l’hospitalité des gens qu’il croise, les églises fermées, une France presque oubliée de gens simples que l’agitation des grandes villes n’atteint pas. Il nous offre de très belles pages sur la nature, les vaches qu’il affectionne particulièrement, la pauvreté évangélique, l’abandon, la confiance. En érudit qu’il est, il émaille son livre de belles citations qui prennent tous leurs sens à l’orée de son dénuement, de ses longues marches et paysages souvent désertiques.
Lien : http://alarecherchedutempspr..
Commenter  J’apprécie          220
Le chemin des estives



À 40 ans tout juste sonnés, Charles Wright semble déjà avoir vécu plusieurs vies. Historien de formation, il a été entre autres journaliste, éditeur puis plume de ministre pendant plusieurs années. Derrière ce tableau de réussite sociale se cache cependant une âme désillusionnée par le monde qui l’entoure. La “comédie sociale” à laquelle il prend part le laisse vide, fondamentalement insatisfait. Cette "pénurie de l’être", invitation à se reconnecter avec ses aspirations les plus profondes, le pousse à s'engager sur une voie spirituelle.



En 2019, il fait son entrée au noviciat des Jésuites de Lyon. L'expérience communautaire menée auprès des disciples d'Ignace de Loyola se révèle éprouvante et les pratiques religieuses telles qu'elles lui sont données à observer vides de sens. “Je pratiquais une religion buissonnière, faisant mes dévotions en contemplant les frondaisons des arbres plus volontiers que dans les églises où des liturgies plates arasaient le mystère”. 



Reléguant ses tourments vocationnels en arrière-plan, il décide de se consacrer au “mois-mendiant”, un rite initiatique consistant en une marche de 4 semaines sans argent ni tente ou moyen de communication accompagné d'un autre apprenant. Épreuve de pauvreté, confiance en la providence, compagnonnage imposé, la formation jésuite valorise le savoir d'expérience. Avec Parsac, son acolyte désigné, ils s'accordent sur le choix d'un itinéraire en marge des assauts de la modernité et de la frénésie de notre société.  



Le chemin des estives est le récit lumineux et bienfaisant de ce mois de pèlerinage passé à sillonner le Massif Central. Partant d'Angoulême en Charente, une traversée pédestre de 700 kilomètres les attend avant de rejoindre l'abbaye de Notre-Dame-des-Neiges logée dans la montagne ardéchoise. Soumis à un dénuement total, les deux vagabonds sont tout au long de leur périple tributaires des circonstances et des habitants pour pourvoir aux besoins les plus rudimentaires. 



Méfiance et refus font le plus souvent place à des élans de générosité, de bonté, d’hospitalité et d’intimes confidences. Charles Wright qui consigne chaque jour les bribes de son expérience itinérante dans un carnet, témoigne de l’intensité de ces rencontres tant éphémères qu’indélébiles lui procurant bien plus qu’une inestimable consolation. Village après village, l’auteur dresse le portrait d’une France profonde oubliée à bout de souffle mais dont le cœur recèle de “trésors d’humanité”.



Voyagent à ses côtés des compagnons de vie invisibles dont la pensée imprègne chacun de ses pas. Quel ne fut pas mon plaisir de côtoyer Arthur Rimbaud et Charles de Foucauld tous deux omniprésents mais aussi Charles Baudelaire, Henry Thoreau, Emil Cioran, Thomas Kempis pour ne citer qu'eux. De nombreuses références choisies sur mesure viennent tour à tour étayer, étoffer et sublimer l'expérience vécue par l'auteur. 



Ode à la liberté, éloge de la sobriété, hommage à la nature et aux gens de peu, "l'explorateur de sous-préfectures" comme il lui plaît de se nommer, nous offre également d'éclairantes observations à la fois historiques, géographiques, géologiques, sociologiques, philosophiques et spirituelles. Sa plume lucide, délicate, poétique et cultivée a su faire écho en moi. 



Merci à lui pour cette échappée livresque inspirante et enthousiasmante non dénuée d'humour ainsi qu'à ceux qui auront eu la patience (que dis-je le courage) de me lire jusqu'à la fin. Quand on est charmé, difficile de se museler. Un livre à découvrir, lire, relire, offrir, je recommande assurément. 



Une invitation pour chacun d’entre nous à parcourir son propre “chemin des estives”... 







Lu en novembre (2021) - Rapatriement des quelques retours partagés sur mon ancien compte avant fermeture définitive.

Commenter  J’apprécie          204
Le chemin des estives

Un livre qui fait du bien moralement, spirituellement et physiquement. le tout tranquillement installé dans votre fauteuil ! Avec Charles Wright vous parcourez 700 kilomètres du GR4, de la Charente à l'Auvergne, et vivez l'expérience du dépouillement qui révèle et fait voir l'essentiel. ”Quand on cesse de s'inquiéter de soi, de son confort, de son avenir, et qu'on s'abandonne à ce qui vient, la vie nous sourit.” Charles et Benoît, son compagnon de route, vous font découvrir des paysages de la France profonde, à couper le souffle, avec eux vous faites de belles rencontres, éphémères mais authentiques, de celles qui comptent vraiment et qu'on n'oublie pas ; et parallèlement une rencontre avec vous-même. Vous testez votre endurance, mettez à nu vos aspirations et vos résistances, votre foi aussi.

Le chemin des estives est le récit de l'expérience que fit Charles Wright, au sortir d'un an de noviciat chez les Jésuites. Il fut envoyé sur les routes, sans rien : ni argent, ni portable, avec pour seuls bagages un duvet et quelques livres : Thoreau, Rimbaud, l'Imitation de Jésus Christ et l'Evangile. "Chaque jour pendant un mois, j'ai griffonné des notes qui forment la matière de ce livre. Trois fois rien : des rencontres, des sensations, un paysage, des choses vues. Ce récit est le sac reprisé où j'ai déposé cette moisson quotidienne. La récolte de mes journées couchée sur le papier."  Au départ une question et à l'arrivée la réponse. Au départ un futur prêtre et à l'arrivée un homme nouveau, un homme libre qui a trouvé sa véritable vocation. "J'ai compris qu'entre toutes ces inclinations qui se disputaient mon coeur, il ne fallait pas choisir. L'existence consiste à accorder les vérités multiples dont nous sommes tissés, non à amputer telle partie de sa personnalité au profit d'une autre. Il faut sortir de la mentalité cartésienne et de nos catégories qui ont toujours tendance à être rigides : ce qui est blanc ne peut pas être noir. La vérité est plus ample qu'on l'imagine."

Le chemin des estives est une marche, un cheminement intérieur aussi. Un récit plein d'humour et d'autodérision, où Arthur Rimbaud et Charles de Foucaud sont omniprésents. Une belle aventure humaine et spirituelle.



Commenter  J’apprécie          140
Le chemin des estives

Charles Wright est un homme brillant. Après des études d’histoire, il travaille dans une vie trépidante pour un ministre, dont il écrit les discours. Homme actif, qui ne cache pas ses conquêtes féminines, il comprend que sa vie passée à courir n’a pas de sens, et commence une longue recherche de lui-même.



Il entre d’abord à l’abbaye de Lérins, où il reste un an, puis est admis au Noviciat des jésuites, rue de Sèvre à Paris.



Parmi la formation proposée aux jeunes jésuites, on lui propose de vivre le « mois mendiant » : un mois de marche sans argent, en compagnie d’un autre novice jésuite. Comme Charles est fasciné par Charles de Foucauld, qui a commencé sa vie de moine à la trappe de Notre-Dame-des-Neiges, il imagine un parcours qui traverse, globalement, le Massif Central, d’Angoulême jusqu’au monastère trappiste. Il a en poche les œuvres complètes d’Arthur Rimbaud, poète qu’il affectionne, et l’Imitation de Jésus-Christ, livre spirituel reconnu entre tous.



Charles est en quête d’absolu, de grandeur, de silence, de contact avec la nature, de calme, de paix… Il sera comblé par l’immensité des paysages qu’il va traverser.



Les deux novices, sans argent, sans avoir le droit de dire qu’ils sont jeunes religieux, « font la manche » de village en village, rencontrent des personnes qui leur donnent à manger, ou un toit, ou discutent avec eux. Charles a une grande facilité pour se lier d’amitié avec les gens, et comme manifestement il inspire confiance, plusieurs personnes se confient à lui. Beaucoup ont traversé des moments difficiles.



Le récit est fabuleux, le vocabulaire est riche, le style exceptionnel : il s’agit d’un récit de grande qualité. Preuve en est que l’on ne s’ennuie pas (en tout cas, je ne me suis pas ennuyé !) et que l’on a envie de parcourir le chemin que nos deux novices viennent de traverser.



On peut tout de même être un peu surpris par ce type de formation pour des apprentis religieux. Formation dans laquelle la prière est peu présente, l’eucharistie dominicale uniquement. On pourrait presque penser qu’il s’agit d’une formation pédagogique ou psychologique, mais pas d’une formation spirituelle. Pour comprendre ce que je veux dire, « on n’emmène pas des apprentis joueurs de foot faire du saut à la perche ». J’ai essayé d’en savoir plus sur ce « mois mendiant », mais je n’ai pas trouvé beaucoup d’informations à ce sujet.



Enfin, Charles Wright nous fait régulièrement part de son insatisfaction face à la vie contemporaine ; son désir de liberté lui fait refuser toute organisation quelle qu’elle soit.



« Un corps de religieux ? Comme le périple au Massif Central me l’a révélé, je suis bien trop sauvage pour m’incorporer à un groupe, être assigné à résidence, fixé dans un lieu ».



« Un ordre sacerdotal de l’Église ? La traversé des hautes terres m’a définitivement converti à la religion buissonnière. »



Oui, comme Charles Wright, nous sommes beaucoup à ressentir cet appel de la nature, cette joie profonde devant la Création. Mais Charles Wright n’a peut-être pas encore perçu que cet soif d’infini n’est comblée que par le don de soi.



Il est d’ailleurs assez curieux que dans la présentation vidéo du livre (ci-dessous) l’auteur parle de son appel de la nature, de la beauté des paysages... comme si son périple n’était qu’un simple parcours sportif pour fuir les grandes villes, alors que l’autre problématique fondamentale du livre est tout de même sa vocation jésuite.



Si la vie n’est pas donnée, elle est stérile, « si le grain de blé tombé en terre ne meurt, il ne donne pas de fruit ».
Lien : https://blog.peuterey-editio..
Commenter  J’apprécie          140
Le chemin des estives

rès belle invitation à prendre son temps, Le chemin des estives est une magnifique randonnée à travers le Massif Central, souvent un peu oublié. Assez particulière cette longue marche. Charles Wright, alors trentenaire aspirant jésuite, entame une virée buissonnière de 700 km dans le "milieu" de la France à travers sept départements entre Charente et Ardèche. En binôme avec Benoit, lui est un prêtre confirmé. Un peu sur les traces de Charles de Foucauld, un peu inspiré par les semelles de vent de Rimbaud, beaucoup pour s'interroger. Certains vont chercher le bonheur en Sibérie ou en Alaska, moi je lorgne ducôté d'Aubusson, de Saint-Flour et du plateau de Millevaches...Je suis un aventurier de la France cantonale, un explorateur de sous-préfectures.



Ne croyez pas mettre vos pas dans un austère chemin de croix, moralisateur et ennuyeux, Mr. Wright est drôle et impertinent parfois et sait aller à la rencontre des gens de là-haut, de là-bas, de là-centre. Pittoresque voisinage d'étrangers ayant choisi l'Auvergne en recul de leur propre existence, de braves villageois dont la méfiance ne résiste pas au sourire de nos curieux touristes, de commerçants plus ou moins généreux, de prêtres autochtones congolais ou rwandais ombrageux qui n'aiment pas trop partager la lumière dominicale de leur église de canton avec Benoit. Il y a des athées bien sympathiques et des croyants obtus. Il y a le contraire. Il y aurait donc une vie entre Loire, Garonne et Rhône.



Il y a aussi de bons petits vins de la Sioule et nos voyageurs n'y voient rien à redire, vraiment rien. Et moi je ne vois rien à redire à ce pélerinage à hauteur d'homme sinon qu'il a donné naissance à un joli bouquin, un bouquin chemineau, un bouquin de haies et de landes, un bouquin d'ampoules au pied et de lits fourragers. Un bouquin qui tord le cou au prétendu regard bovin, Charles Wright s'y entendant tout à fait à sympathiser avec limousines, aubrac et salers.
Commenter  J’apprécie          132
Le chemin des estives

Dans la formation jésuite, les novices doivent expérimenter un mois de mendicité : un pèlerinage de quatre semaines, sans argent, sans téléphone, sans tente et sans carte de crédit. C'est ce pèlerinage, qui doit se faire à deux, que Charles Wright, accompagné d'un prêtre novice, Benoit Parsac, a fait en juillet 2019, allant d'Angoulême à Notre-Dame des Neiges, en Ardèche.

Le Chemin des Estives rejoindra certainement tous ceux qui ont fait l'expérience d'une marche de nature spirituelle, que ce soit sur le chemin de Compostelle ou ailleurs. Ayant eu la chance de marcher jusqu'à Saint-Jacques, j'ai retrouvé plus d'éléments de notre itinéraire (qui n'était pas le chemin du Puy, il est vrai) que dans tous les ouvrages lus jusqu'à présent.

Charles Wright est un écrivain, un homme cultivé et un homme en recherche. Le livre est truffé de belle pépites qui sont nourries par ces caractéristiques de l'auteur. Il donne matière à réflexion et à contemplation.

J'ai pourtant ressenti quelques agacements, suite à certaines redites. L'auteur écrit avec peu de filtres et son regard sur autrui recherche la bienveillance, mais ne peut s'empêcher d'être souvent jugeant, voire condescendant. En cela, il ressemble sans doute à la plupart d'entre nous, mais risque de heurter une fois ou l'autre tel ou tel lecteur qui se sentirait visé, directement ou au travers de proches. C'est le paradoxe de ce livre d'un auteur qui se livre tellement qu'il force le lecteur à un face à face personnel avec lui, sans prendre le temps de la découverte réciproque, de l'ajustement à autrui et de l'apprivoisement, alors même que l'expérience dont il nous parle est faite de tout le contraire...
Commenter  J’apprécie          130
Le chemin des estives

Un réel plaisir à lire ce "chemin des estives", au cœur d'une France rurale et à découvrir le regard de Charles Wright, le pèlerin avant son noviciat, accompagné d'un jésuite dans cette "escapade".

Une invitation à un voyage méditatif, animé par l'évocation des échanges avec les gens rencontrés, les grandes figures qui surgissent, et éclairé par des pensées et une érudition qui en décuplent le plaisir...
Commenter  J’apprécie          122
Le chemin des estives

J'ai beaucoup aimé ce livre, tout en ayant conscience que je suis partial : j'ai visualisé la traversée des Combrailles puisque c'est un des centres de gravité de mon existence, où je vais probablement passer une grande partie de ma retraite, où 2 vélos m'attendent déjà. Quant à Lugarde, dans le Cantal, c'est le village natal de mon beau-père, qui avait 2 ans de plus que le Henri qui a accueilli Charles et Benoit, tel que relaté dans ce livre.

Au-delà de ces aspects personnels, ce texte offre au lecteur un vagabondage, au sens propre du terme, puisque les deux compères vaquent et vivent de la charité des personnes rencontrées. Charles, citadin qui a fait des études poussées raconte ses sensations au contact des paysages et de la nature (des vaches en particulier), ses rencontres parfois étonnantes, fait des détours réguliers par les vies de deux autres Charles, De Foucault et Beaudelaire, se laisse guider par Thomas A Kempis, moine du 15ème siècle.
Commenter  J’apprécie          110
Le chemin des estives

J'ai bien aimé ce long cheminement de ces deux errants qui, loin des chemins de pèlerinage médiatisés, se lancent dans une marche de sept cents kilomètres. Partant d'Angoulême, les deux marcheurs devront rallier l'abbaye de Notre Dame des Neiges, en traversant les reliefs du Massif Central. Tous deux sont aspirants jésuites et doivent, à ce titre, vivre un "mois mendiant", c'est à dire un pèlerinage de quatre semaines sans argent. Au fil du temps, la traversée de multiples paysages aux beautés secrètes se fait et les figures de Charles de Foucauld et Arthur Rimbaud se détachent en filigrane. le livre est riche en descriptions de sites oubliés qui témoignent d'une vitalité jadis importante du christianisme , en portraits d'hommes et de femmes qui, même s'ils semblent fermés au départ, sont prêts à accueillir et à donner et de réflexions multiples sur le monde d'aujourd'hui et ses addictions, l'importance du cheminement spirituel et la difficulté à se détacher des usages du monde.

Ce Chemin des estives est rédigé dans une langue alerte et interrogative. On peut bien sûr trouver à redire et rester sur sa faim en estimant qu'il ne s'agit là que d'une suite d'impressions et de réflexions et qu'une recherche spirituelle qui se respecte demande plus que quelques semaines sans téléphone portable, mais pour ma part, cet aspect ne m'a pas dérangé. J'ai aimé cette longue parenthèse.







Commenter  J’apprécie          100




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Charles Wright (489)Voir plus

Quiz Voir plus

L’étranger, d'Albert Camus

Où Meursault rencontre-t-il Marie Cardona le lendemain de l’enterrement de sa mère ?

dans une salle de cinéma
à l’établissement de bain du port
sur une plage aux environs d’Alger

10 questions
1326 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}