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Citations de Claude Duneton (151)


— Maman, qu’est-ce à dire : « que ton règne advienne » ? demanda-t-il un soir.
— C’est que le Royaume du bon Dieu s’étendra un jour sur la terre entière, Louis ; ici et partout. Il n’y aura que paix alors et félicité pour tous ceux qui auront été bons et pieux – et tous les méchants seront chassés. Nous voulons que ce moment advienne, n’est-ce pas, mon fils ?
— Quand viendra-t-il donc ?
— À la fin des temps.
— Quand cela sera-t-il ?
— Je ne sais pas, Louis, et nul ne le sait encore, sauf Dieu luimême. — Serai-je encore petit ?
— Oh non ! Auparavant, vous aurez été roi, Dieu veuille ! Mais vous n’aurez garde d’oublier, cependant, que vous êtes le vassal du Tout-Puissant, qui vous a donné la vie et qui vous donnera un jour votre royaume, quand Sa Majesté votre père ne sera plus.

Deuxième partie.Des châteaux en Espagne
Chapitre VI
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— Sont-ce bien des diables, maman ?
— Ce sont des âmes damnées qui souffrent en Enfer. Mais les âmes que le diable emporte ne périssent point, elles brûlent éternellement.
— Qu’est-ce à dire : éternellement ?
— Leur tourment n’a jamais de fin et le feu qui les cuit durera jusqu’au Jugement.
— Je ne veux point aller en Enfer, maman ! Le Dauphin était inquiet ; il y avait une supplication dans sa voix.
— Aussi n’irez-vous point, Louis, si vous dites bien vos prières et n’offensez jamais Dieu. — Assurément ?
— Il est vrai. À condition que vous soyez vigilant et que vous aimiez toujours notre sainte mère l’Église, ajouta Anne, qui lui caressait la joue pour le rassurer.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre V
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— Savez-vous seulement ce que sont les poils du con, Monseigneur ? s’enquit-elle d’un ton guilleret.
Petit Louis fit un signe de dénégation timide.
— Comme cela ? Ne savez-vous point ce que sont les petits conins des demoiselles ? Les petits conins velus ? N’avez-vous jamais grattouillé celui de mademoiselle votre nourrice quand elle vous tient au lit tout nu ?
À chacune de ses questions, le garçonnet continuait de secouer la tête avec un air de parfaite ignorance qui affligeait la duchesse. — Ah ça ! dit-elle en se relevant, que lui enseignez-vous donc, ma fille ?
« Ma fille » prenait un air des plus pincés.
— Je lui enseigne, ne vous déplaise, madame, à ne pas offenser Dieu et à bien dire ses prières, comme il est de mon devoir. En outre, je ne crois pas que Sa Majesté la Reine approuverait cette conversation sur le velours des dames.
— Et Dieu, qui nous donne la vie par ces petits trous, n’est-il pas bien aise qu’on en parle aux enfants ? s’indigna Mme de Rallewaert, se moquant avec éclat. Quand je pense que son père au même âge mettait sa main sous mes jupes et qu’il tendait hardiment sa guillerie en relevant sa cotte pour qu’on la lui branlât ! Ah ! les temps deviennent bigots et revêches. Son grand-père, notre bon sire – Dieu ait son âme ! –, doit se retourner dans son tombeau à SaintDenis ! Adieu, Monsieur.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre V
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La duchesse, qui semblait venir d’un autre âge, avait jadis appartenu aux filles d’honneur de la reine Marguerite ; elle avait reçu, pendant le temps de sa grande fraîcheur, qui était celui de la jeunesse de l’édit de Nantes, le fréquent hommage du roi Henri, notre sire, auquel elle avait donné deux enfants bâtards morts en bas âge. Elle continuait à se vêtir à la mode ancienne et portait toujours le vertugadin, dont elle disait en badinant qu’il lui servirait encore, à l’occasion, à cacher ses amants.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre V
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Il y avait aussi ce conseil, utile pour un homme qui hantait les palais des souverains : « La vérité n’est pas toujours bonne, il la faut bien souvent taire ; ou s’il y a de la nécessité à la déclarer, il est besoin de faire comme les Pharmaciens & les Apothicaires, qui dorent la pilule pour la mieux faire avaler. »

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre IV
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Le Dauphin tétait si fort et si goulûment qu’il épuisait régulièrement aussi bien la nouvelle nourrice que la suppléante, ce qui fut la cause qu’on en changea une nouvelle fois. On finit par découvrir une paysanne de Chantilly dont le lait crémeux et sucré semblait inépuisable tant les mamelles de cette jeune personne, pleine de santé, étaient imposantes, avec cela blanches et rondes, et propres à ravir, avec des bouts larges et roses qui sentaient bon le chèvrefeuille. Petit Louis reprit dans cette confortable abondance une grande partie de sa bonne humeur.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre I
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D’Espagne, il arriva une autre nouvelle : il venait de naître une petite infante à Madrid, presque en même temps que le Dauphin – en vérité le mardi 7, jour de Fontarabie ! Elle s’appelait Maria Teresa. Il ne pouvait exister parente plus proche de Petit Louis par le sang, puisque cette enfant était la fille de la sœur du Roi, Mmc Élisabeth, et du roi Felipe, le frère de la Reine… La petite princesse était donc sa double cousine germaine, presque une sœur, et la concomitance de ces deux naissances parut à plusieurs comme un signe divin en faveur de la paix. Certains se hâtèrent de murmurer qu’il ne resterait plus, dans quelques années et la guerre ayant cessé entre les deux nations fraternelles, qu’à marier ces deux princes pour rapprocher encore les liens qui les unissaient. La petite infante n’était-elle pas, elle aussi, un quart de souche française par descendance du roi Henri ?...

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre I
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Le Dauphin avait à son service, dès les premiers jours de son existence, une petite armée de femmes toutes dévouées à le satisfaire. Après la gouvernante, qui avait la charge conjuguée de sa vie matérielle et de sa première éducation, la nourrice venait en tout premier lieu ; elle était à la fois la main et la manne : elle portait le petit prince, le chatouillait, lui parlait, se jouait à lui et surtout lui donnait le sein. Le lait de la nourrice était censé contribuer grandement au tempérament de l’enfant, comme d’autre part le sang de sa mère déterminait ses inclinations. Il disposait d’ailleurs d’une nourrice en second, ou suppléante, pour le cas où un accident adviendrait à la première et, plus ordinairement, en prévision des jours où le lait de la première ne suffirait pas à apaiser sa faim… Une autre femme, immédiatement après celle-là dans la hiérarchie et de grande importance dans l’assiduité des soins qu’elle donnait, était la remueuse. Comme son nom l’indiquait, elle avait la charge du sommeil et devait « remuer » le berceau pour endormir l’enfant et le garder de pleurer ; mais elle participait aussi activement aux soins du corps, à la toilette, ainsi que, plus tard, à l’administration des premières bouillies et aux agaceries, jeux et autres mièvreries dont on a accoutumé de divertir les petits enfants.
Ces trois femmes constituaient les trois piliers de l’existence de Dieudonné, lequel pouvait dès lors, en principe, se passer de mère.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre I
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En se donnant une postérité, gage de survie du royaume, le Roi et la Reine fournissaient à leur peuple, enfin ! l’assurance que Dieu les aimait et qu’il n’abandonnerait pas la France au pillage et aux exactions des mercenaires étrangers… Ils prouvaient que les prières étaient efficaces et utiles, et donc, implicitement, que Dieu existait, dans toute sa gloire paternelle. Le retard de ce Dauphin, né après vingt années d’attente commune, constituait une preuve supplémentaire que sa venue était exceptionnelle et miraculeuse, et son existence au-dessus du commun.

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre I
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Louis XIII, appelé le Juste, était fort souvent comparé à un soleil éclairant le royaume très chrétien ; sa gloire éclipsait alors celle du Grand Turc, représenté par son croissant de lune traditionnel. C’est ainsi, avec l’habitude d’opposer le soleil à la lune, que l’on attribua tout naturellement à Dieudonné, qui venait de paraître, le symbole de l’astre du jour au commencement de sa carrière…

Deuxième partie. Des châteaux en Espagne
Chapitre I
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Pour dire autrement, ce nouveau dauphin de France se trouvait être proprement le neveu de l’Europe entière. Il aurait dû devenir, dans ce royaume dédié à la Vierge en honneur de lui, un prince de famille : un Jésus de paix.
Il n’en fut pas ainsi… Dieudonné, dit Louis comme son père, dit XIV encore enfant, était né d’un orage. Sa vie ferait hurler les foules et tonner les canons : sa vie ne serait que bruit, tumulte, fêtes, fracas, plaintes aussi, et guerres, et rugissements – elle serait couronnée par les cris des pauvres gens.
Pierre de La Porte, qui, pour l’heure, coulait à Saumur des jours monotones, pourrait écrire, trente années plus tard, sur ses carnets, parlant du nourrisson de ce dimanche de septembre : « Avec raison, on le pouvait appeler le fils de mon silence. »

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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Ces soins du corps étant accomplis, il restait à donner au dauphin de France, avant toute chose, ce qui devait être la première action de sa vie : il lui fallait entrer dans le sein de l’Église.

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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Louis regarda la basilique et pensa à tous les tombeaux des rois défunts, ses ancêtres. Ils allaient aujourd’hui avoir un nouveau successeur, avec la grâce de Dieu, en la personne de cet enfant qui allait naître, dont il avait demandé à la Vierge que ce fût un dauphin. Il pensa à son père, le roi Henri, à qui il donnait un continuateur ; (...).

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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Anne attendit la communion du prêtre avec extase : le mystère du Christ présent à quelques pas d’elle lui rendait la paix ; les douleurs se firent plus aiguës, sans l’inquiéter aucunement… Peut-être allait-elle mourir ce matin, songea-t-elle – et elle ne fut pas émue par cette pensée. Mourir pendant une messe ! Rien au monde n’était si aisé !… C’était aller au Créateur tout droit sur les ailes des anges, portée par les chants suaves qui sonnaient agréablement aux oreilles du Père tout-puissant. Elle songea soudain à son grand-père, le vieux roi fils d’Empereur qui avait fait construire un monastère gigantesque autour de sa chambre : une chapelle à côté de son lit ! Elle comprenait tout à coup ce qui l’avait intriguée pendant son enfance : cette disposition des pièces à San Lorenzo, où tout communiquait avec la chapelle. Son grand-père, elle en était sûre à présent, avait fait construire l’Escorial pour pouvoir mourir en écoutant la messe…

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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(...) la chambre du Roi était un lieu plus sacré que la sienne ; le Roi était oint des saintes huiles, il était le lieutenant de Dieu, il avait le pouvoir de guérir. Quels que fussent l’ennui ou l’agrément de son caractère, il était en liaison avec Dieu, fût-ce à son insu. Le Roi était nécessairement magique, jusqu’à un certain point ; Anne pensait qu’elle serait davantage en sécurité dans sa chambre, où le Tout-Puissant ne saurait abandonner une enfant qui était en quelque sorte comme son sous-lieutenant…

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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Il y avait, de plus, M. de Metz, abbé de Saint-Germain-des-Prés, qui avait apporté, en compagnie de plusieurs de ses moines bénédictins, les reliques de sainte Marguerite, que la Reine avait fait demander. Il y avait surtout, dans sa présence rassurante, le grand aumônier d’Anne d’Autriche, Philippe de Cospeau, évêque de Lisieux ; ce saint homme, âgé de soixante-dix ans, avait été l’ami du cardinal de Bérulle, fondateur de l’Oratoire, avait connu François de Sales – l’auteur du Traité de l’amour de Dieu. M. de Lisieux fréquentait assidûment Vincent de Paul et tout ce qui existait de charitable et de dévoué à la cause chrétienne ; il était doux, sage, très pieux et appelait Anne « ma bonne fille ». Elle, qui l’aimait, le traitait exactement comme elle eût fait de son propre père…

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre XI
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La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre enflammée par la torche d’un sapeur ; d’emblée, elle fut considérée à Paris et dans tout le royaume comme la marque d’une intervention divine. Toutes ces prières ardentes, toutes ces offrandes, toutes ces supplications enfin – y compris la dernière, qui fut faite un beau soir de décembre par les âmes pieuses de la capitale –, toutes ces dévotions n’avaient pas été en vain ! Les prières avaient été entendues, les offrandes avaient été acceptées par la main de Dieu.

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre X
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Le roi Louis XIII aimait son confesseur. Le Père Caussin avait succédé dans la tâche subtile de diriger la conscience royale à un vieux jésuite écossais, le Père Gordon, qui était devenu paralytique et ne pouvait plus assurer ses fonctions. Le côté amical et direct, l’air de franchise qui se dégageait de toute la personne de ce confesseur suppléant, son amour du bien et de Dieu, enfin le caractère un peu naïf, sans doute, mais parfaitement sincère de cet honnête chrétien plaisaient infiniment au prince, qui l’écoutait volontiers ; il s’entretenait avec lui fort souvent des affaires temporelles aussi bien que des spirituelles.

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre X
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Le Roi avait passé la journée dans le trouble et l’exaltation secrète causés par la compagnie prolongée d’une jeune vierge cloîtrée. Son corps, transi par le froid soudain qui avait suivi la pluie de décembre, réagissait en une flambée d’érections incontrôlées ; il fit, cette nuit-là, merveille. La Reine, surprise et ravie de tant de sève ravivée chez son époux débonnaire, remerciait le ciel à tout instant ; elle récitait dans la joie et l’aise, à voix très basse, une oraison à Notre-Dame, une autre à saint Norbert, chanoine de Cologne, qui, après d’innombrables dévotions et suppliques, semblait enfin répondre à ses vœux. Saint Norbert, homme viril, ayant été frappé par la foudre à un moment de grande exaltation, son vit était demeuré éternellement roide sous l’effet de la commotion ; c’est la raison qui le faisait supplier par les femmes dans le besoin d’enfants et prier des amantes qui vivaient chastement… Anne ne voyait jamais un orage sans une pensée pour lui – ce soir encore, à sa fenêtre en haut, elle avait vu le feu du ciel s’abattre et avait imploré dans son âme le bon saint de la fécondité. À mesure que saint Norbert lui répondait de plus en plus clairement, la Reine adressait toutes ses prières à la Vierge Marie et une à saint Guerluchon en Berry, pour que la semence royale, en elle, portât ses fruits.
C’était également le souhait le plus cher de toute la France – ensemble avec le désir ardent de la paix –, et ses sujets, dans la grande cité autour d’elle, l’accompagnaient dans son élan. Car un mystérieux cavalier, bravant la pluie d’orage, s’était mis en chemin aussitôt que le Roi était entré au Louvre. Il était allé par les rues de la ville : « Priez, bonnes gens ! » Ce messager diligent s’était arrêté dans toutes les églises, tous les monastères, toutes les chapelles les couvents, portant la nouvelle aux prêtres, aux vierges, aux bourgeois, aux manants, disant : « Priez, car ce soir le roi Louis connaîtra la Reine. Priez pour que Dieu nous donne un dauphin ! »
En sorte que cette nuit-là, pendant que le Roi était ainsi couché sur la Reine et la besognait, Paris, sa bonne ville qui ne dormait pas, était à genoux à ses côtés, dans l’ombre, et priait.

Première partie.Le fils de mon silence
Chapitre IX
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L’âme doit rencontrer son Créateur seule à seul, disait-il.
Et c’était l’opinion de saint Ignace.
Louis était fasciné par la perspective de ce face à face géant avec Sa Divine Majesté. Il en parlait avec des yeux luisants, fixés sur la lumière qui tombait de la fenêtre haut placée du côté du cloître, derrière la grille, et qui enveloppait Angélique dans une auréole céleste…

Première partie. Le fils de mon silence
Chapitre VIII
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